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61e session plénière du Giec : toujours pas d’accord sur le calendrier de publication du 7e rapport d’évaluation
Du 27 juillet au 2 août 2024, le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat ou IPCC en anglais) a tenu sa 61e session plénière (IPCC-61) à Sofia (Bulgarie), réunissant pour l’occasion plus de 230 délégués représentant 114 Gouvernements nationaux (au total, le Giec compte 195 Etats membres). Il s’agissait de la 2e réunion plénière du 7e cycle d’évaluation (2023 à 2028-2030, la date d’achèvement n’ayant pas été arrêtée lors de la session précédente du Giec, IPCC-60 – voir encadré ci-dessous).
Objet de cette 61e session
L’objet de cette 61e session du Giec était notamment :
- de définir en détail et approuver le calendrier de planification stratégique pour la production et la publication de l’ensemble des rapports du Giec prévus dans le cadre du 7e cycle d’évaluation ;
- de définir et approuver les grandes lignes (draft outlines) des deux rapports thématiques prévus (voir encadré ci-dessous): rapport spécial sur le climat et les villes et rapport méthodologique sur les forceurs climatiques à courte durée de vie[1] ; et
- de tirer des enseignements du déroulement et des résultats du 6e cycle d’évaluation (2015-2023).
Ainsi, la 61e session du Giec visait à établir les éléments de base essentiels de son 7e cycle d’évaluation.
Contexte
Lors de sa 60e session (IPCC-60, 16-20 janvier 2024 à Istanbul, Turquie), le Giec a concrètement lancé son 7e cycle d’évaluation qui a formellement démarré en juillet 2023 après l’élection du nouveau Président du Giec, Jim Skea (lire notre article). Les délégués sont parvenus non sans difficulté à se mettre d’accord sur le programme de travail du 7e cycle d’évaluation, sous forme de feuille de route (cf. décision IPCC-LX-9) :
▪ rapport de chacun des trois groupes de travail dans le cadre du 7e rapport d’évaluation (dit AR7) : WG I (sciences physiques), WG II (impacts, adaptation et vulnérabilité) et WG III (atténuation), comme pour chaque cycle ;
▪ rapport de synthèse (publication prévue fin 2029) ;
▪ rapport révisant et mettant à jour les lignes directrices techniques de 1994 du Giec sur les impacts et l’adaptation (y compris les indicateurs, métriques et méthodologies en matière d’adaptation) ;
▪ rapport spécial sur le climat et les villes (décidé lors de la 43e session en avril 201), sortie prévue en 2027) ;
▪ rapport méthodologique sur les inventaires pour les forceurs climatiques à courte durée de vie (sortie prévue en 2027) ;
▪ réunion d’experts et rapport méthodologique sur les technologies d’élimination du CO2 et sur le CCUS (captage, utilisation et stockage du CO2) (sortie prévue fin 2027).
Lors de cette 60e session, les discussions ont notamment fait ressortir de fortes divergences d’opinion sur les échéances à définir pour la publication des trois volets de l’AR7. La plupart des pays (les pays industrialisés, les petits Etats insulaires et les pays les moins avancés notamment) ont insisté sur l’importance d’avancer les dates de publication de ces trois rapports pour les aligner avec l’échéance du 2e bilan mondial (Second Global Stocktake ou GST-2) qui aura lieu en 2028. Selon ces pays, les résultats et les conclusions des trois volets de l’AR7 devraient alimenter et éclairer le GST-2.
C’est l’article 14 de l’Accord de Paris qui prévoit la réalisation tous les cinq ans, à commencer par 2023, d’un bilan mondial. La décision 19/CMA.1 (adoptée lors de la Conférence de Katowice du 2 au 16 décembre 2018) est venue préciser les modalités de réalisation de ce bilan (lire pp. 30-34 de notre dossier de fond sur les résultats de Katowice). Il s’agit d’un bilan de la mise en œuvre de l’Accord de Paris afin d’évaluer les progrès collectifs, et non ceux des pays individuels, vers la réalisation de ses objectifs à long terme [articles 2 et 4]. Le bilan mondial doit servir de catalyseur pour renforcer le niveau d’ambition collective dans la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. La première GST (2023 – lire notre article sur les enjeux du GST-1 et notre article sur les résultats obtenus) était destiné à éclairer la prochaine série de contributions nationales que doivent soumettre les Parties à l’Accord de Paris en 2025.
Par ailleurs, lors de la COP-28 (Dubaï, Emirats arabes unis 30 nov. – 12 déc. 2023), dans la décision 1/CMA.5 sur le GST-1, les Parties à l’Accord de Paris « invite[nt] le [Giec] à envisager comment aligner au mieux ses travaux [de l’AR7] avec le [GST-2] et les [GST] suivants et demande[ent] également au [Giec] de fournir des informations pertinentes et opportunes pour le [GST-2] » (cf. § 184 de la décision 1/CMA.5). Tenir l’échéance de 2028 impliquerait donc soit d’accélérer les travaux du Giec, soit de raccourcir l’ensemble du cycle de sept à cinq ans.
Cependant, quelques pays menés par l’Arabie saoudite, l’Inde et la Chine, se sont fermement opposés à cette proposition de calendrier accéléré. Ils ont souligné qu’un programme de travail accéléré aurait pour conséquence de précipiter le processus scientifique, conduirait à la production de rapports compromis, tant en termes de contenu que d’inclusivité, et ne laisserait pas suffisamment de temps pour les pays en développement d’apporter leurs contributions scientifiques ou de mener à bien leur travail de relecture/révision.
Au terme de négociations intenses et tendues frôlant l’échec, le 20 janvier 2024, les délégués réunis ont fini par parvenir à un compromis de dernière minute : ils ont décidé de reporter la décision du calendrier de l’AR7 et chargé le bureau du Giec (lire notre article) de proposer des échéances pour examen et adoption lors de la session suivante du Giec (IPCC-61, session qui fait l’objet du présent article) (cf. décision IPCC-LX-9 sur la planification du 7e cycle d’évaluation – options pour le programme de travail dans le cadre du 7e cycle d’évaluation).
(sources : Climate Home News, 22 jan. 2024 + IISD, 22 jan. 2024).
Résultats
Les produits du 7e cycle d’évaluation hors AR7
Les délégués du Giec réunis à Sofia ont pu se mettre d’accord sur :
- les grandes lignes du rapport spécial sur le changement climatique et les villes (décision IPCC-LXI- 5) ;
- les grandes lignes du rapport méthodologique sur les inventaires pour les forceurs climatiques à courte durée de vie (décision IPCC-LXI-7).
Futur rapport spécial sur le changement climatique et les villes
Les délégués se sont mis d’accord, d’une part, sur le calendrier de production (août 2024 à février 2027) et de publication de ce rapport (date de publication prévue : mars 2027) et, d’autre part, sur les grandes lignes de son contenu (cf. annexe 1 de la décision IPCC-LXI- 5). Il comportera cinq chapitres :
- chapitre 1er: Les villes dans le contexte du changement climatique – cadrage du rapport,
- chapitre 2 : Les villes dans le contexte d’un climat qui change – tendances, défis et possibilités,
- chapitre 3 : Les actions et les solutions pour réduire les risques urbains et les émissions [de GES des villes],
- chapitre 4 : Comment faciliter et accélérer le changement,
- chapitre 5 : Les solutions par type de ville et de région.
Futur rapport méthodologique sur les inventaires pour les forceurs climatiques à courte durée de vie
Les délégués se sont mis d’accord, d’une part, sur le calendrier de production (3e trimestre 2024 au 2e semestre 2027) et de publication de ce rapport (date de publication prévue : juillet 2027, pas de date plus précise selon la décision adoptée à Sofia [source : annexe 4 de la décision IPCC-LXI-7, Plan de travail du rapport méthodologique] mais le site du Giec indique juillet 2027) et, d’autre part, sur les grandes lignes de son contenu (cf. annexe 2 de la décision IPCC-LXI-7). Il comportera cinq volumes :
- volume 1er: Lignes directrices générales,
- volume 2 : Secteur de l’énergie,
- volume 3 : Secteur des procédés industriels et de l’utilisation des produits (en anglais : Industrial Process and Product Use ou IPPU),
- volume 4 : Secteur Agriculture, Forêt et autres utilisations des sols (AFOLU),
- volume 5 : Secteur des déchets.
Le rapport fournira des lignes directrices sur les émissions des forceurs climatiques à courte durée de vie qui sont d’origine anthropique (NB. le rapport ne couvrira pas les substances secondaires d’origine anthropique), nationales, annuelles et rapportées en unités de masse pour chaque spéciation individuellement émise (carbone suie, HFC, COVNM, NOx, etc.).
Le rapport AR7
A Sofia, les délégués ont repris le sujet du calendrier de planification stratégique, dont la finalisation était restée en suspens lors de la 60e session du Giec à Istanbul (voir encadré ci-dessus) suite à l’opposition de certains pays membres (Chine, Inde et Arabie saoudite en tête).
Appel de 40 auteurs du Giec provenant de pays en développement
En amont de la 61e session à Sofia et à l’initiative d’un des trois anciens vice-Présidents du 6e cycle d’évaluation, Dr Youba Sokona du Mali, un groupe de 40 auteurs du Giec provenant de pays en développement, a publié une lettre ouverte dans laquelle ils ont souligné que les trois rapports de l’AR7 « peuvent et doivent » être produits d’ici juin 2028 afin de rester pertinents pour éclairer l’élaboration des politiques climat au niveau planétaire. En clair, le Giec doit produire son AR7 à temps pour éclairer le GST-2 et il est essentiel que le calendrier du 7e cycle du Giec soit aligné sur l’échéance du GST-2.
Une synthèse des principaux arguments formulés dans cette lettre ouverte a été rédigée par Dr Youba Sokona et publiée le 31 juillet 2024 par le site spécialisé sur le climat, Climate Home News.
Ainsi, selon ces 40 auteurs, les rapports du Giec jouent un rôle central dans l’évaluation des connaissances scientifiques sur le changement climatique et fournissent des données et informations rigoureuses, solides et fiables qui sont essentielles pour éclairer les décisions des Gouvernements, tout particulièrement dans le contexte des négociations multilatérales (surtout au sein de la CCNUCC). Ils estiment qu’Il est essentiel de veiller à ce que le 7e cycle d’évaluation du Giec s’aligne sur les échéances du GST-2 pour maintenir l’intégrité de la coopération internationale en matière de climat.
Par ailleurs, selon les auteurs de la lettre ouverte, il vaudrait mieux accorder la priorité aux efforts visant à améliorer l’inclusion des voix des pays en développement, plutôt que d’accepter de retarder excessivement la publication des rapports de l’AR7, ce qui pourrait compromettre la pertinence de l’AR7 pour le GST-2.
Toujours selon la lettre ouverte, les pays qui ne sont pas en faveur d’une publication accélérée des trois rapports thématiques de l’AR7 (voir plus loin) justifient leur position, en avançant trois arguments, selon lesquels accélérer le processus de production des trois rapports pourrait poser le risque :
▪ de conduire à une sous-représentation des pays en développement, notamment vulnérables. Un retard pourrait compromettre l’inclusion des représentants de l’ensemble des pays du Sud et des non-anglophones, ce qui réduirait la diversité des points de vue qui sont indispensables pour réaliser une évaluation complète ;
▪ de conduire à une réduction de la couverture des sujets couverts par l’AR7. Il est essentiel d’assurer un large éventail de sujets pour aborder la nature multidimensionnelle du changement climatique et fournir une compréhension holistique ; et
▪ de disperser les messages clés des trois groupes de travail du Giec. La prise en compte en temps utile des analyses des trois groupes de travail est cruciale pour une évaluation cohérente et complète.
Enfin, les 40 auteurs soulignent que l’accélération de la production à raison de quelques mois ne compromettrait pas la robustesse de l’AR7. Les rapports d’évaluation précédents ont été menés à bien en cinq à six ans, par exemple, le 5e cycle d’évaluation a été réalisé en six ans (2008-2014).
Sources : Climate Home News du 31 juillet 2024 et Carbon Brief, 6 août 2024.
Comme lors de la 60e session du Giec, les sept jours de négociation intenses, complexes et en partie tendues à Sofia ont donné lieu à de fortes divergences d’opinion, notamment sur la question de savoir si et comment les travaux des trois groupes de travail (Working Groups ou WG) du Giec (WG I : bases physiques du changement climatique ; WG II : impacts, adaptation et vulnérabilité ; WG III : atténuation) vont alimenter les travaux du 2e bilan mondial (Second Global Stocktake ou GST 2), prévu en 2028 par l’article 14 de l’Accord de Paris.
A Sofia, plusieurs options ont été débattues, et notamment :
- un calendrier proposé par les six co-Présidents des trois groupes de travail (chaque groupe de travail ayant deux co-Présidents, voir page du site du Giec consacrée aux Working Groups), dont la durée totale serait de six ans, soit le même ordre de grandeur que celle des 5e et 6e cycles d’évaluation (respectivement 2008-2014 et 2015-2022) : publication des trois rapports en décalé, à savoir respectivement en mai, en juin et en juillet-août 2028 (et le rapport de synthèse en mai 2029). Cette proposition a été présentée suite à la demande en ce sens adressée au bureau du Giec lors de sa 60e session,
- un calendrier accéléré dans le cadre duquel le rapport de chacun des trois groupes de travail serait publié d’ici la conférence de Bonn sur le climat en juin 2028 (sessions du SBSTA et du SBI). Ce calendrier a été proposé par Belize et soutenu par les Etats-Unis, les Pays-Bas et le Royaume-Uni (source : IISD, 5 août 2024),
- un calendrier prolongé afin de donner davantage de temps aux auteurs pour terminer les rapports.
Les deux premières propositions de calendrier permettraient que l’ensemble des résultats et conclusions de l’AR7 éclairent le GST 2.
Une cinquantaine de pays industrialisés, pays émergents et pays en développement (Allemagne, Antigua-et-Barbuda, Argentine, Australie, Bahamas, Barbade, Belarus, Belgique, Belize, Brésil, Canada, Chili, Corée du Sud, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Haïti, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Japon, Kiribati, Lettonie, Luxembourg, Malawi, Monaco, Nigeria, Norvège, Pérou, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Singapour, Suède, Suisse, Timor-Leste, Turquie, Tchad, Ukraine, Uruguay et Zimbabwe, ainsi que l’UE dans son ensemble) a soutenu le calendrier proposé par les six co-Présidents des trois groupes de travail du Giec, plusieurs d’entre eux insistant sur l’importance du fait que l’AR7 doit alimenter le GST-2 (source : IISD, 5 août 2024).
Certains pays, dont les petits États insulaires et les pays les moins avancés, ont insisté pour que les rapports de l’AR7 soient livrés rapidement afin de garantir une contribution adéquate du Giec au processus d’évaluation technique du GST-2. Ils ont fait valoir que la contribution du Giec au GST-2 est particulièrement cruciale pour les pays qui n’ont pas les capacités à mener leurs propres recherches et qui sont les plus vulnérables aux impacts immédiats du chang ement climatique.
La représentante du petit Etat insulaire Saint-Christophe-et-Niévès a notamment souligné qu’en l’absence d’un apport « crucial » du Giec au GST-2 via l’AR7, les travaux du Giec perdraient leur pertinence politique et elle a insisté sur l’importance primordiale des contributions du Giec pour les petits Etats insulaires. Par ailleurs, elle a rappelé que si le calendrier proposé est plus serré que celui du 6e cycle d’évaluation, celui-ci comportait trois rapports spéciaux (réchauffement à 1,5°C ; changement climatique et terres ; océans et cryosphère), alors que l’AR7 n’en comporte qu’un seul (changement climatique et villes – voir plus haut).
En revanche, une douzaine de pays (Afrique du Sud, Algérie, Burundi, République du Congo, Jordan, Kenya, Libye, Russie et Venezuela, menés par l’Arabie saoudite, la Chine et l’Inde) se sont opposés au calendrier accéléré proposé par les six co-Présidents des trois groupes de travail du Giec. Ils ont souligné l’importance d’accorder davantage de temps à l’analyse des études scientifiques et aux examens (reviews) par les Gouvernements nationaux pour obtenir des résultats scientifiques robustes et rigoureux et pour renforcer l’inclusivité. Pour sa part, l’Inde a indiqué qu’il faut du temps pour produire les meilleures données et informations scientifiques et que la précipitation conduirait à un travail bâclé.
Conclusion
Les délégués du Giec réunis à Sofia ont une nouvelle fois échoué à parvenir à un consensus sur un calendrier de planification stratégique et de publication de son AR7. Le soir du 1er août 2024, le Président du Giec, Jim Skea, a évoqué l’énorme difficulté rencontrée à Sofia pour trouver une solution acceptable pour toutes les délégations et en l’absence d’un consensus, il a proposé, comme il l’avait fait à Istanbul, de reporter la décision sur le sujet à la prochaine session plénière du Giec (IPCC-62, en février 2025). Cette proposition a été approuvée par les délégués réunis à Sofia via la décision IPCC-LXI-9 sur le calendrier de planification stratégique.
Prochaines étapes
Une réunion de cadrage (scoping meeting) sur les contributions respectives des trois groupes de travail du Giec à l’AR7 est prévue en décembre 2024. L’objet de cette réunion d’experts techniques sera d’élaborer les grandes lignes des trois rapports thématiques de l’AR7.
Dans un communiqué publié au terme de sa 61e session, le Giec a indiqué que, sur la base des résultats de cette réunion de cadrage, les propositions de grandes lignes qui devraient en découler seront soumises aux délégués en plénière lors de l’IPCC-62 en février 2025 pour examen et approbation. Ainsi, ils devront approuver le cadrage, les grandes lignes et les programmes de travail pour la réalisation de l’AR7 (dont les calendriers et les budgets). Ensuite, les appels à nomination des auteurs seront lancés
Le 9 août 2024, le Giec a lancé un appel à nomination des auteurs du rapport spécial Changement climatique et villes. L’appel à nomination des auteurs du rapport méthodologique sur les inventaires pour les forceurs climatiques à courte durée de vie devrait être lancé prochainement.
[1] Les forceurs climatiques à courte durée de vie (short-lived climate forcers ou SLCF) sont des substances à courte durée de vie qui ont un impact sur le climat, telles que le carbone suie (black carbon), le CH4, l’ozone troposphérique et certaines espèces de HFC (notamment le HFC-134a, principal HFC émis, et le HFC-1234yf) – lire notre article. Voir aussi le chapitre consacré aux SLCF dans le premier volume du 6e rapport d’évaluation du Giec (publié le 9 août 2021).
En savoir plus
Communiqué du Giec du 24 juillet 2024 (en amont de la 61e session)
Communiqué du Giec du 2 août 2024 (au terme de la 61e session)
Page du site du Giec consacrée à sa 61e session
L’ensemble des décisions adoptées par le Giec lors de sa 61e session
Page du site du Giec consacrée au futur rapport spécial sur le changement climatique et les villes
Page du site du Giec consacrée au futur rapport méthodologique sur les forceurs climatiques à courte durée de vie
Pour l’instant, le Giec n’a pas mis en ligne sur son site une page consacrée à son 7e rapport d’évaluation
Institut International du Développement Durable (IISD) : Summary of the 61st session of the Intergovernmental Panel on Climate Change, 27 July – 2 August 2024, Earth Negotiations Bulletin vol. 12 n° 854, 5 août 2024
Carbon Brief : IPCC meeting in Sofia fails to agree timeline for seventh assessment report
RTE publie la mise à jour de son bilan prévisionnel
Du 21 au 30 juillet 2024, RTE (Réseau de transport d’électricité, gestionnaire du réseau public de transport d’électricité haute tension en France métropolitaine) a actualisé son Bilan prévisionnel présentant ses scénarios prospectifs de production et consommation d’électricité vers la neutralité carbone en 2050, via une série de publications par chapitre thématique :
- Principaux résultats
- Synthèse
- Consommation
- Production et stockage d’électricité
- Scénarios
- Europe
- Equilibre offre et demande et flexibilités
- Emissions de gaz à effet de serre
- Economie du système électrique
- Hydrogène
Ces nouveaux chapitres enrichissent, complètent et réactualisent les scénarios publiés précédemment (voir encadré ci-dessous). Il a fait l’objet d’une vaste concertation et s’inscrit dans le contexte de la préparation par l’État de la Stratégie française pour l’énergie et le climat (SFEC – lire notre article).
Contexte
Le 25 octobre 2021, RTE avait publié les premiers résultats de son étude prospective « Futurs Energétiques 2050 » sur l’évolution du système électrique visant à étudier les chemins possibles pour atteindre la neutralité carbone (lire notre article).
Le 19 septembre 2023, RTE a publié son « Bilan prévisionnel 2023-2035 » mettant à jour de ses scénarios prospectifs d’évolution de la production et consommation d’électricité en France dans le cadre de la transition vers la neutralité carbone en 2050. Ce rapport mettait en avant différents scénarios envisageables, avec des rythmes différents de consommation d’énergie, de recours aux leviers (efficacité énergétique, sobriété, énergies renouvelables et nucléaire), d’électrification des usages et de développement des énergies bas-carbone dont un qui permettrait à la France d’atteindre ses objectifs climat rehaussés et son objectif de réindustrialisation.
▪ Le scénario A permet d’atteindre les objectifs de décarbonation accélérée et de réindustrialisation en 2030 et 2035. Il présente une électrification renforcée ;
▪ Le scénario B permet d’atteindre les objectifs climatiques et de réindustrialisation avec un retard de trois à cinq ans ;
▪ Le scénario C décrit un environnement de « mondialisation contrariée », dans lequel les tensions macroéconomiques et géopolitiques se prolongent durablement.
RTE y soulignait l’importance de l’électrification pour que la France sorte des énergies fossiles ; ainsi que le besoin en investissements massifs.
Parmi les messages clés de cette actualisation, citons :
Production et consommation d’électricité bas-carbone
- Pour atteindre les objectifs de décarbonation accélérée et de souveraineté énergétique, une croissance forte et rapide de la consommation d’électricité est nécessaire ;
- Les nouvelles perspectives de croissance de la consommation électrique marquent une rupture, qui sera progressive, par rapport à la tendance à la baisse depuis 15 ans ;
- La France a les moyens de gérer ces besoins d’électricité en hausse en s’appuyant sur quatre leviers essentiels : sobriété, efficacité énergétique, renouvelables et nucléaire. Renoncer à l’un de ces leviers rend extrêmement difficile l’atteinte des objectifs climatiques et de sécurité d’approvisionnement ;
- La maîtrise de la demande en électricité est indispensable, dans ses deux composantes : efficacité énergétique et sobriété ;
- L’accélération du développement des renouvelables, un levier essentiel pour accroître rapidement le productible décarboné. Un enjeu de massification : d’ici 2035, viser au minimum une production d’électricité renouvelable annuelle de 270 TWh (contre environ 120 TWh aujourd’hui) et si possible de 320 TWh ;
- Maximiser la production annuelle du parc nucléaire existant, un élément incontournable pour réussir la décarbonation au cours de la prochaine décennie. Au cours de la prochaine décennie, l’enjeu est de retrouver des niveaux de disponibilité et de production supérieurs à ceux des dernières années : viser une production de 400 TWh à parc complet, tabler sur 360 TWh.
Emissions de gaz à effet de serre (GES)
- Tous les leviers, décarbonation de l’énergie, efficacité et sobriété, sont nécessaires pour atteindre les prochains objectifs climatiques renforcés. Cela nécessite des inflexions dans tous les secteurs de l’économie ;
- Le rythme de décarbonation doit s’accélérer pour tous les secteurs, en particulier pour les transports, secteur pour lequel le potentiel de baisse des émissions est le plus important et peut être rempli principalement par l’électrification des véhicules associée à une réduction de la part modale de la voiture ;
- L’accélération de la baisse des émissions à l’horizon 2030 dans le secteur des bâtiments est possible en combinant les efforts de décarbonation de l’énergie, dont le déploiement de pompes à chaleur, et de rénovation thermique des bâtiments
- Les mesures de décarbonation de l’énergie et les mesures d’efficacité énergétique constituent les principales mesures pour décarboner le secteur industriel, indépendamment du niveau de demande de consommation du pays
- Les émissions de GES liées à la production d’énergie en France pourraient être divisées par deux avec l’augmentation de la part des énergies bas-carbone dans le mix énergétique français ;
- Dans la famille de scénarios B, le retard dans le déploiement des leviers de décarbonation présente un risque de manquer la cible de l’ordre de 40 MtCO2e en 2030 ;
- Dans les scénarios C de mondialisation contrariée, l’objectif climatique en 2030 peut être atteint du fait d’une baisse d’activité économique importante et ce, malgré un ralentissement du déploiement des leviers de décarbonation ;
- Le système électrique bas-carbone : un levier majeur pour baisser les émissions de GES en France. À l’horizon 2030-2035, le système électrique français restera bas-carbone même en tenant compte des analyses en cycle de vie des infrastructures de production et même dans des configurations dégradées ;
- Le développement de la production d’électricité bas-carbone, renouvelable et nucléaire, est sans regret sur le plan climatique.
Nouveaux usages de l’électricité dans le bâtiment, l’industrie et les transports
- Accélérer la sortie des énergies fossiles grâce au déploiement des pompes à chaleur réduit significativement les émissions de gaz à effet de serre du chauffage. Accélérer le développement des pompes à chaleur ne conduit pas à augmenter sensiblement la consommation d’électricité.
- La France a les moyens de développer une production d’hydrogène bas-carbone locale pour décarboner certains secteurs, mais elle sera en concurrence possible des importations, notamment pour les carburants de synthèse
- La perspective de développement du véhicule électrique se confirme pour les véhicules légers et se renforce pour le transport lourd. Même une électrification poussée du parc de voitures et de poids lourds ne conduit pas à augmenter trop fortement la consommation d’électricité.
Directive NEC-2 : la Commission lance une consultation publique en vue de sa révision
Le 3 septembre 2024, la Commission européenne a lancé une consultation publique ouverte en ligne sur l’évaluation de la directive dite NEC-2 (directive (UE) 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques – voir encadré en fin d’article).
Objet de la consultation publique
La Commission vise à recueillir l’avis des parties prenantes et des citoyens sur la directive, sa mise en œuvre et les progrès réalisés pour atteindre les objectifs et engagements fixés par cet acte législatif. Concrètement, le but de la consultation est :
- d’évaluer si la directive contribue de façon efficace à la réalisation de ses objectifs et engagements,
- d’évaluer la pertinence de cette directive, compte tenu de l’évolution de la situation, notamment des progrès scientifiques et techniques et de la mise en œuvre d’autres politiques de l’UE en matière de climat et d’énergie,
- de clarifier les éventuels obstacles à la mise en œuvre de la directive et d’examiner les possibilités de simplification et de réduction des coûts associés à la mise en œuvre.
La date limite de réponse est le 26 novembre 2024 (voir lien de la consultation publique).
L’évaluation de la directive NEC-2
Sur la base des rapports visés à l’article 11 (voir encadré en fin d’article), la Commission doit procéder à un réexamen (review) de la directive NEC-2 au plus tard le 31 décembre 2025 afin de maintenir les progrès accomplis pour atteindre les objectifs généraux de la directive (article 13), en particulier en tenant compte des progrès scientifiques et techniques, ainsi que de la mise en œuvre des politiques « climat-énergie » de l’UE.
La Commission a lancé début 2024 les travaux d’examen de la directive NEC-2. Elle réalisera son évaluation en suivant les lignes directrices du programme « Mieux légiférer », (qu’elle a publiées le 3 novembre 2021). L’évaluation déterminera dans quelle mesure la directive a atteint son objectif de protection de la santé humaine et de l’environnement en réduisant les émissions nationales des cinq polluants atmosphériques visés par la directive (SO2, NOx, NH3, COVNM et PM2,5).
Elle tiendra également compte des objectifs en matière de qualité de l’air fixés dans le plan d’actions « Zéro pollution », présenté par la Commission le 12 mai 2021 (lire notre article). En outre, l’évaluation déterminera si la directive s’est avérée cohérente avec la politique de l’UE en matière de qualité de l’air, si elle y a contribué et si elle a créé des synergies avec d’autres politiques de l’UE.
L’évaluation comporte également une consultation ciblée des parties prenantes visant à recueillir les avis d’un public d’experts sur des questions spécifiques. Cette consultation a été lancé le 3 septembre 2024. Elle contient des questions plus spécifiques posées à différents groupes de parties prenantes, notamment les États membres et les autorités compétentes, les organisations de la société civile, les parties prenantes internationales, les représentants du secteur industriel, ainsi que la communauté scientifique. La date limite de réponse est le 26 novembre 2024.
Par ailleurs, la Commission organise un atelier d’une journée pour les parties prenantes, prévu le 14 octobre 2024 à Bruxelles. Il permettra aux parties prenantes de donner leur avis sur le fonctionnement et la mise en œuvre de la directive. La date limite pour s’inscrire à l’atelier est le 9 septembre 2024.
Enfin, la Commission a fait appel à un bureau de consultants pour réaliser une étude spécialisée afin d’étayer l’évaluation ainsi que les consultations publiques et ciblées des parties prenantes.
La Commission prévoit d’achever le réexamen de la directive NEC-2 en 2025 en amont des négociations dans le cadre de la CEE-NU visant à réviser le Protocole de Göteborg sur la réduction de l’acidification, l’eutrophisation et la formation de l’ozone troposphérique. Ce Protocole, adopté en 1999, puis révisé une première fois en 2012, constitue la base juridique de la directive NEC-2.
La mise en œuvre de la directive NEC-2
Rapport de la Commission européenne
Conformément à l’article 11 de la directive NEC-2, la Commission européenne a publié le 30 juillet 2024 son 2e rapport de mise en œuvre de la directive NEC-2 (réf. COM(2024) 348 final) qui évalue les progrès réalisés depuis la publication du premier rapport (réf. COM(2020) 266 final du 26 juin 2020). S’appuyant sur les données fournies par les Etats membres au titre de la directive (les inventaires d’émissions communiqués par les Etats membres en 2023, données 2021), le 2e rapport montre que 10 Etats membres (Autriche, Bulgarie, Danemark, Hongrie, Irlande, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Portugal et Suède) ne respectent pas leurs engagements de réduction pour le NH3.
Dans son rapport, la Commission souligne que « le seul polluant qui s’avère particulièrement problématique reste le NH3, pour lequel les perspectives de réalisation des engagements de réduction des émissions prévus dans la directive demeurent sombres » (source : COM(2024) 348 final, p.23).
Selon le rapport, la difficulté principale rencontrée par les États membres est celle de réduire les émissions de polluants provenant des principales sources d’émission : l’agriculture (NH3) ; la combustion provenant du secteur résidentiel-tertiaire, et des transports routiers (PM2,5) ; ainsi que l’utilisation industrielle de solvants (COVNM).
La publication de la quatrième édition du rapport « Perspectives en matière d’air propre » (« Clean Air Outlook ») est prévue pour la fin de l’année 2024 (lire notre article sur la 3e édition, publiée le 8 décembre 2022), complétera le présent rapport en fournissant des informations sur la trajectoire en matière de conformité. Le rapport « Perspectives en matière d’air propre » s’inscrit dans le cadre du programme Air pur pour l’Europe (publié par la Commission le 18 décembre 2013) qui prévoit une mise à jour tous les deux ans des données sur lesquelles a reposé l’étude d’impact de la directive (UE) 2016/2284 pour suivre et évaluer le progrès accompli vers la réalisation de ses objectifs.
Plus spécifiquement, les « Perspectives en matière d’air propre » de 2024 fourniront une évaluation analytique détaillée sur la question de savoir dans quelle mesure les États membres, et l’UE dans son ensemble, sont en voie de respecter les obligations en matière de réduction des émissions établies par la directive et d’améliorer la qualité de l’air, réduisant ainsi les incidences sur la santé humaine et l’environnement.
Analyse de l’Agence européenne pour l’Environnement
De son côté, l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE ou EEA en anglais) a publié, le 25 juin 2024, sa 3e évaluation annuelle des progrès accomplis par les Etats membres pour respecter leurs engagements de réduction des émissions des cinq polluants visés par la directive NEC-2. Cette note d’analyse (Briefing) est basée sur les données d’émission pour l’année 2022, dernière année pour laquelle les Etats membres ont rapporté leurs émissions (en mars 2024).
Selon la note d’analyse de l’AEE, en 2022, 16 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements nationaux respectifs de réduction des émissions pour la période 2020-2029 pour chacun des cinq principaux polluants atmosphériques, tandis que 11 États membres n’ont pas respecté leurs engagements pour au moins l’un des cinq principaux polluants atmosphériques.
Comme l’avait souligné la Commission dans son rapport publié le 30 juillet 2024 (voir plus haut), la réduction des émissions de NH3 reste le plus grand défi : neuf États membres doivent réduire leurs niveaux d’émission en 2022 pour respecter leurs engagements de réduction pour la période 2020-2029. Le secteur agricole est la principale source, responsable de 93% des émissions totales de NH3. Dans de nombreux États membres, les émissions de NH3 n’ont que légèrement diminué depuis 2005 et ont même augmenté dans certains cas.
Réaliser de nouvelles réductions pour 2030 et au-delà constituera un défi de taille pour la quasi-totalité des États membres de l’UE et pour la quasi-totalité des polluants atmosphériques. Le taux de réduction des émissions de certains polluants est en train de se stabiliser. Le SO2 constitue une exception : 22 États membres (dont la France) respectent déjà l’engagement de réduction pour 2030.
Les émissions des principaux polluants atmosphériques ont continué à diminuer, maintenant la tendance observée depuis 2005 et ce, malgré une augmentation du produit intérieur brut au cours de la même période.
La directive NEC-2
La directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (dite NEC 2) (lire notre dossier de fond sur le sujet) est venue réviser la directive 2001/81/CE relative aux plafonds d’émission nationaux, dite directive NEC 1. La directive NEC 2 étend la période de la directive NEC 1 de 2020 initialement à 2030 et au-delà. De plus, elle aligne le droit de l’UE sur les engagements découlant de la révision du Protocole de Göteborg adoptée le 4 mai 2012 (lire notre article sur le sujet). Entrée en vigueur : 31 décembre 2016, Date limite de transposition : 1er juillet 2018 (date à laquelle la directive NEC 1 a été abrogée).*
Les engagements nationaux de réduction
La directive NEC 2 oblige les Etats membres à limiter leurs émissions anthropiques annuelles de cinq polluants : SO2, NOx, NH3, COVNM et PM2,5 conformément aux engagements nationaux de réduction fixés à l’annexe II de la directive (article 4). Ces engagements portent sur deux échéances : 2020 et 2030. Cela signifie que les engagements 2020 doivent être respectés sur l’ensemble de la période 2020-2029 (au moins).
Contrairement à la première directive NEC (directive 2001/81/CE), ces engagements ne sont pas des plafonds (en kt), mais des objectifs relatifs de réduction (en % par rapport à l’année de référence 2005). A noter qu’afin de garantir la continuité dans l’amélioration de la qualité de l’air, les plafonds d’émission nationaux établis par la directive 2001/81/CE ont continué de s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2019.
Les Etats membres doivent également prendre les mesures nécessaires visant à limiter leurs émissions anthropiques des cinq polluants de l’année 2025. Le niveau indicatif de ces émissions est déterminé par une trajectoire de réduction linéaire entre leurs niveaux d’émission définis par les engagements de réduction des émissions pour 2020 et les niveaux d’émission définis par les engagements de réduction des émissions pour 2030. La directive autorise les Etats membres à suivre une trajectoire de réduction non linéaire si celle-ci est plus efficace d’un point de vue économique ou technique, et à condition qu’à partir de 2025, elle converge progressivement vers la trajectoire de réduction linéaire et ne compromette pas les engagements de réduction des émissions pour 2030.
Engagements nationaux de réduction fixés pour la France (année de référence : 2005) (cf. annexe II)
En France, ces engagements ont été repris dans le plan national de réduction des émissions de polluants (PREPA), adopté le 10 mai 2017 (lire notre article sur le sujet).
Les programmes nationaux de lutte contre la pollution de l’air
Les Etats membres sont tenus d’élaborer et de mettre en œuvre un programme national de lutte contre la pollution de l’air, (National Air Pollution Control Programme ou NAPCP), dont le contenu minimal est défini à l’annexe III. Les Etats membres devaient soumettre leur premier programme national avant le 1er avril 2019. Celui-ci est à mettre à jour au minimum tous les quatre ans par la suite (article 6). La France a transmis (avec six mois de retard) son premier NAPCP en octobre 2019.
Conformément à l’article 6 de la directive NEC 2, les Etats membres devaient soumettre leur deuxième NAPCP au plus tard le 1er avril 2023 (voir p.6 de notre dossier de fond sur la directive NEC 2). La France a soumis son 2e NAPCP le 24 mai 2023.
Rapport de la Commission
Au plus tard le 1er avril 2020 et tous les quatre ans par la suite, la Commission doit présenter un rapport au Parlement européen et au Conseil sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de la directive (article 11), et notamment une évaluation de sa contribution à la réalisation des objectifs généraux de la directive (cf. article 1er). Ce rapport évalue en particulier :
▪ les progrès accomplis dans la réalisation des engagements de réduction des émissions et, le cas échéant les raisons de leur non-respect) et en matière des niveaux de qualité de l’air ambiant conformément aux lignes directrices relatives à la qualité de l’air établies par l’Organisation Mondiale de la Santé (lire notre article) ;
▪ l’identification des mesures supplémentaires nécessaires au niveau de l’UE et des Etats membres pour atteindre les objectifs précités ;
▪ les résultats de l’examen par la Commission des programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique (cf. article 6) et de leurs mises à jour conformément à l’article 10.
Réexamen et révision de la directive NEC-2
Sur la base des rapports visés à l’article 11, la Commission doit procéder à un réexamen de la directive NEC-2 au plus tard le 31 décembre 2025 afin de maintenir les progrès accomplis pour atteindre les objectifs généraux de la directive (article 13), en particulier en tenant compte des progrès scientifiques et techniques, ainsi que de la mise en œuvre des politiques « climat-énergie » de l’UE.
Le cas échéant, la Commission présente des propositions législatives concernant les engagements de réduction des émissions de polluants pour la période post-2030.
Spécifiquement concernant le NH3, la directive oblige la Commission, dans le cadre de son réexamen, d’évaluer entre autres :
▪ les données scientifiques les plus récentes,
▪ les mises à jour du document d’orientation de la CEE-NU de 2014 pour la prévention et la réduction des émissions de NH3 provenant des sources agricole (cf. Décision 2012/11, ECE/EB/AIR/113/Add.1.) et le code-cadre de bonnes pratiques agricoles pour réduire les émissions NH3 de la CEE-NU, tel que révisé en dernier lieu en 2014 (cf. Décision ECE/EB.AIR/127, paragraphe 36, point e).
En savoir plus
Communiqué de la Commission sur le lancement de la consultation publique
La page du site de la DG Environnement consacrée à la directive NEC-2
La page du site de la DG Environnement consacrée aux NAPCP
La page du site de la DG Environnement consacrée au réexamen/à l’évaluation de la directive NEC-2
Communiqué de l’AEE (publiée le 25 juin 2024)
Note d’analyse de l’AEE (publiée le 25 juin 2024)
Voir données d’émission par Etat membre 2005-2022 (data viewer, page interactive).
Voir l’outil de suivi des politiques et mesures mises en place pour réduire les émissions de polluants atmosphériques (mise à jour le 22 février 2024)
Dans un contexte d’incertitude sur la SFEC, la France transmet la version revue de son plan national énergie climat à la Commission
Le 10 juillet 2024, le gouvernement a officiellement transmis à la Commission européenne le Plan national énergie-climat (PNEC, en anglais National Climate and Energy Plan ou NECP, outil de planification stratégique, mis à jour tous les 10 ans, permettant aux États membres de décrire comment ils atteindront leurs objectifs climat et contribueront à atteindre l’objectif collectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, voir encadré en fin d’article) de la France, sur la base de la première version transmise le 11 novembre 2023 et des recommandations de la Commission qui avaient suivi.
Cette transmission, dépassant de plus d’une semaine l’échéance fixée au 30 juin 2024, intervient alors que la publication des documents clés de la Stratégies Française Energie Climat (SFEC) est en suspens (voir plus bas). Et, surtout, elle intervient dans un contexte politique très incertain depuis la dissolution de l’Assemblée nationale (9 juin 2024) et les élections législatives anticipées (30 juin et 7 juillet 2024) ayant vu le parti gouvernemental perdre sa majorité, suivi par une période d’attente de nomination d’un nouveau Premier Ministre.
Version provisoire et recommandations de la Commission
Le premier NECP de la France avait été publié le 1e avril 2020 par la Commission, relatif à la période 2021-2030 et à la compatibilité des mesures planifiées par la France avec l’objectif de neutralité climatique de l’UE. La France avait présenté son projet de mise à jour de son NECP le 11 novembre 2023, publié par la Commission le 21 du même mois. La Commission européenne avait ensuite publié, le 18 décembre 2023, l’évaluation des projets de mise à jour des NECP de tous les Etats membres, dont celui de la France.
Parmi les recommandations sur le volet atténuation, plusieurs portaient sur une demande de hausse d’ambition sur le déploiement des énergies renouvelables (EnR), notamment de revoir fortement à la hausse, en la portant à au moins 44%, la part des EnR qu’elle vise à atteindre à titre de contribution à l’objectif contraignant de l’UE en matière d’EnR à l’horizon 2030 fixé par la directive RED III (directive (UE) 2023/2413 sur la promotion de l’énergie produite à partir de sources renouvelables ; mais aussi de fournir un plan à long terme pour le déploiement des énergies renouvelables à horizon 2040, entre autres (lire notre article pour un résumé plus détaillé des recommandations).
Contenu du PNEC
Le reflet d’une politique climat dont l’actualisation est en suspens
Le PNEC se base sur les travaux de concertation et de construction de la prochaine SFEC qui inclut la mise à jour des principaux documents de planification de la politique nationale de transition écologique même si ceux-ci ne sont pas finalisés, voire sont en suspens :
- la loi de programmation énergie-climat (LPEC), qui devait initialement être adoptée avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, conformément à l’article 2 de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat et à l’article L. 100-1 A du Code de l’énergie. Plusieurs fois reportée, un projet de loi a été proposé, puis fortement modifié, avant d’être abandonné, comme l’a confirmé, Roland Lescure l’ancien Ministre de l’Industrie et de l’Energie, dans un entretien au Figaro du 10 avril 2024 ;
- la mise à jour de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC-3), attendue d’ici 2024, devant proposer de nouveaux budgets carbone en cohérence avec l’objectif de l’UE de -55% d’ici 2030 ;
- la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), dont la 3e version est aussi attendue courant 2024 ;
- le plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC), initialement aussi attendu en 2024.
Depuis, la dissolution de l’Assemblée nationale et les résultats des élections législatives anticipées du 7 juillet 2024 ont mis en suspens ces dossiers. Compte tenu de cette situation, le PNEC mis à jour précise qu’il reflète les objectifs fixés à date jusqu’en 2030 (et jusqu’en 2035 pour le volet énergétique) ; et que les trajectoires au-delà de 2030 devront être actualisées (par exemple à l’occasion du rapport biennal d’avancement) après publication de ces documents de programmation.
Réduction des émissions brutes de 50% entre 1990 et 2030
En attendant la future publication de la SNBC-3 qui proposera une mise à jour des prochains budgets carbone, le PNEC indique les valeurs issues du scénario de référence (dit AMS, Avec Mesures Supplémentaires) utilisé pour la conception de la SNBC-3, plus ambitieux que celui de la SNBC-2. Ce scénario permet de fournir des données indicatives de ces prochains budgets.
Figure 1. Emissions de GES brutes (hors puits de carbone du secteur UTCATF), trajectoire indicative pour la future SNBC-3 et budgets préliminaires pour la SNBC-3 en comparaison avec ceux de la SNBC-2. Source : PNEC, Juillet 2024, p. 56
Selon ces valeurs indicatives, la réduction des émissions brutes de GES (c’est-à-dire hors puits de carbone du secteur UTCATF) serait de 50% entre 1990 et 2030 pour atteindre 271 Mt CO2e à cet horizon.
Le tableau ci-dessous présente les valeurs indicatives pour les prochains budgets carbone attendus dans la SNBC-3, déclinées par secteur, et leur comparaison aux valeurs de la SNBC-2 en vigueur.
Figure 2. Valeurs des estimations préliminaires prochaine SNBC-3 indiquées dans le PNEC. Valeurs arrondies au million de tonne près. Source : tableau de la DGEC reproduit dans la PNEC, p.56-57 Juillet 2024. Bâtiments : Une note du PNEC précise que la cible brute en 2030 pourrait atteindre 268 Mt CO2 si un scénario permettait de respecter la cible proposée pour le secteur des bâtiments dans le cadre des travaux de la planification écologique (32 Mt). A noter que dans les annonces faites en mai 2023, la cible pressentie pour les bâtiments était de 30 Mt.
Prudence sur l’évolution du puits de carbone
Dans ses recommandations, la Commission européenne demandait à la France d’établir une trajectoire de hausse du puits de carbone et de définir des mesures supplémentaires pour y parvenir, afin d’atteindre objectif national UTCATF défini par le règlement (UE) 2018/841.
Le PNEC mis à jour reste cependant prudent, tenant compte de « l’évolution défavorable des paramètres essentiels de la forêt française que sont la mortalité et l’accroissement biologique ». En effet, le puits de carbone net du secteur UTCATF a fortement diminué ces dernières années (voir le chapitre UTCATF du rapport Secten). Le PNEC indique la valeur provisoire, obtenue pour 2030 sur la base de projections, d’un niveau équivalent à la valeur de 2022, soit environ -18 Mt CO2e. ; au lieu de -44 Mt CO2e comme prévu initialement par la SNBC-2. L’ambition étant d’atteindre la cible de -31 Mt CO2e à cette échéance, le PNEC note cet écart et souligne de fortes incertitudes sur ces projections.
Figure 3. Bilan net du secteur UTCATF (puits de carbone), projections provisoires, cible 2030 de la SNBC-2 et niveau provisoire indiquée dans le PNEC d’après le scénario AMS. Source : PNEC, Juillet 2024, p. 65
Des objectifs sur les énergies renouvelables replacés dans la cadre plus large des énergies décarbonées, incluant le nucléaire
Alors que la Commission recommandait de revoir à la hausse les objectifs sur le déploiement des énergies renouvelables, le PNEC réaffirme les ambitions déjà indiquées dans la version précédente du PNEC, à savoir celles de la PPE-2 (2e Programmation pluriannuelle de l’énergie) sur la période 2019-2028. Concernant la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie, le PNEC considère que l’objectif de 23% fixé à la France pour l’année 2020 par la directive 2009/28/CE modifiée sur la promotion de l’utilisation des énergies renouvelables (EnR), sera atteinte, quatre ans après, en 2024.
Plutôt que de proposer un nouvel objectif sur la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie, le PNEC met en avant non pas les énergies renouvelables seules mais les énergies décarbonées, incluant donc le nucléaire, comme moyen de contribuer aux objectifs d’atténuation de l’UE. Le PNEC indique ainsi un objectif de 58% d’énergie décarbonée dans la consommation finale d’énergie en 2030, et 71% en 2035. Atteindre cette trajectoire passe par le renforcement de la production nucléaire (lire notre article sur la loi sur l’accélération du nucléaire) et le développement des énergies renouvelables (lire notre article sur la loi accélération des EnR). Enfin, la consommation finale brute d’énergie renouvelable de la France en 2030, d’après le scénario de la SFEC, est estimée à environ 570 TWh.
Les NECP
Les Plans nationaux énergie-climat (dont leur nom officiel est Plans nationaux intégrés énergie-climat, PNIEC, au titre de l’article 3 du règlement (UE) 2018/1999 ; mais le terme Plan national énergie climat, PNEC, est davantage utilisé.) doivent être soumis par les Etats membres conformément à l’obligation établie par le règlement (UE) 2018/1999 du 11 décembre 2018 sur la gouvernance de l’Union de l’énergie (articles 3 et 4) (lire notre article). Ces NECP sont décennaux, à compter de la période 2021-2030. Les Etats membres devaient soumettre à la Commission leur projet de premier NECP avant le 31 décembre 2018, et la version définitive au 31 décembre 2019 (article 9). Ils devront soumettre leur 2e plan d’ici le 1er janvier 2029, et ainsi de suite.
Les NECP sont le principal outil de planification stratégique permettant aux États membres de décrire comment ils atteindront les objectifs généraux et les objectifs spécifiques de l’union de l’énergie et resteront sur la bonne voie pour atteindre l’objectif collectif de neutralité climatique à l’horizon 2050. Ils contribuent à la prévisibilité des investissements à court, moyen et long terme et constituent un outil essentiel pour mobiliser les investissements massifs nécessaires pour atteindre cet objectif collectif.
Les NECP doivent comporter une description :
▪ des objectifs nationaux et des contributions nationales définis au titre de l’Union de l’énergie (réduction des émissions de gaz à effet de serre, énergies renouvelables et efficacité énergétique),
▪ des politiques et mesures prévues ou adoptées pour les mettre en œuvre.
Le règlement 2018/1999 (annexe I) établit un modèle de NECP pour garantir une présentation harmonisée entre les Etats membres en vue de faciliter leur évaluation.
Les versions définitives de ces premières NECP avaient été rendues publiques par la Commission le 1er avril 2020.
Le 17 septembre 2020, la Commission avait publié une évaluation, à l’échelle de l’UE, des premières NECP. L’évaluation de la Commission montrait que l’UE était sur la bonne voie pour dépasser son objectif de réduction des émissions de GES d’au moins 40% d’ici à 2030, en particulier grâce aux progrès en cours dans le déploiement des EnR dans toute l’UE. La Commission concluait que l’UE devrait accroître davantage l’efficacité énergétique et la part des EnR. Voir le détail de cette évaluation globale dans notre article.
Le 14 octobre 2020, la Commission européenne a publié les évaluations individuelles des NECP de chacun des 27 Etats membres. Il s’agissait d’analyser les trajectoires et les ambitions de chaque État membre par rapport aux objectifs actuels en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030 (lire notre article).
Au plus tard le 30 juin 2023, et ensuite au plus tard le 1er janvier 2033, et tous les 10 ans par la suite, chaque État membre est tenu de soumettre à la Commission un projet de mise à jour de son NECP (cf. article 14 du règlement (UE) 2018/1999).
Au plus tard le 30 juin 2024, et ensuite au plus tard le 1er janvier 2034, et tous les 10 ans par la suite, chaque État membre soumet à la Commission la version définitive de la mise à jour de son NECP.
Le 18 décembre 2023, la Commission européenne a publié une évaluation globale, à l’échelle de l’UE, des projets de mise à jour des NECP des 21 Etats membres qui avaient soumis les leurs à l’échéance prévue. Parallèlement à cette évaluation globale, la Commission a publié des évaluations individuelles et des recommandations par pays pour ces 21 États membres (voir JOUE du 7 mars 2024). Ces recommandations portent sur les éléments actuellement manquants qui devraient figurer dans les versions définitives de mise à jour des NEPC afin d’aider les États membres à atteindre les nouveaux objectifs climat-énergie résultant du paquet « Fit for 55 » [Ajustement à l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030 – lire notre article] et du dispositif REPowerEU – lire notre article). Lire notre article pour plus de détails sur ces évaluations et notamment sur l’évaluation de la Commission et ses recommandations à l’attention de la France.
En savoir plus
Plan national intégré en matière d’énergie et de climat (PNEC), juin 2024
Page de la Commission européenne consacrée aux PNEC
Prochain petit-déjeuner du Citepa : 12/09/24 | Comment évaluer l’impact du télétravail sur les émissions des mobilités professionnelles ?
12/09/24 | Comment évaluer l’impact du télétravail sur les émissions des mobilités professionnelles ? – avec Yves Crozet
Depuis la pandémie, le télétravail est devenu une réalité pour plus de 20% des actifs. Au point que la stratégie nationale bas carbone (SNBC) considère le télétravail comme un des leviers permettant de réduire les émissions de la mobilité des personnes. Avec le soutien de l’ADEME, trois équipes de recherche (CITEPA, LAET, THEMA) ont rapproché leurs modèles pour évaluer les effets du télétravail dans 4 agglomérations types, en prenant en compte l’effet rebond d’une relocalisation des ménages.
Pour en comprendre les enjeux, le Citepa vous propose d’échanger autour d’un petit-déjeuner avec Yves Crozet, Economiste, membre du Laboratoire Aménagement Economie Transports (LAET-CNRS) et Professeur émérite à Sciences-Po Lyon.
Emissions de CO2 en Chine : première baisse trimestrielle depuis la pandémie du Covid-19
Le 8 août 2024, le site britannique spécialisé dans les questions climat, Carbon Brief, a publié une analyse des émissions de CO2 de la Chine, premier émetteur mondial de CO2 (35% du total mondial en 2023, source : AIE, 1er mars 2024). Cette nouvelle analyse a été réalisée par Lauri Myllyvirta du Centre de recherche sur l’énergie et l’air propre (Centre for Research on Energy and Clean Air, CREA).
Méthodologie
Il s’agit de données pré-estimées sur la base d’indicateurs mensuels officiels (données de production et de consommation de combustibles/carburants et de ciment publiées par le Bureau national des statistiques, données sur les produits importés et exportés provenant des autorités douanières, etc.).
Principaux résultats
Selon cette nouvelle analyse, les émissions de CO2 de la Chine ont baissé de 1% au 2e trimestre 2024 par rapport au 2e trimestre 2023. Il s’agit de la première baisse trimestrielle depuis la levée des restrictions « zéro-Covid » en décembre 2022.
Figure 1. Evolution des émissions de CO2 en Chine par trimestre 2013-2024 (en Mt CO2). Source : Carbon Brief, 8 août 2024.
Le 28 mai 2024, Carbon Brief avait déjà annoncé, sur la base d’une première analyse de Lauri Myllyvirta, que les émissions de CO2 de la Chine avaient enregistré une baisse de 3% en mars 2024 par rapport à mars 2023 (données pré-estimées aussi) et ce, après une forte hausse de 6,5% au cours de janvier-février 2024 comparativement à la même période en 2023. Cette première baisse mensuelle en mars 2024 a marqué la fin d’une hausse observée chaque mois pendant 13 mois consécutifs (de février 2023 à février 2024) suite au rebond enregistré après la levée des restrictions « zéro-Covid » en décembre 2022.
Selon les estimations rapportées par Carbon Brief, lorsqu’on cumule la hausse de 6,5% en janvier-février, la baisse de 3% en mars et la baisse de 1% sur l’ensemble du premier trimestre, on observe une hausse de 1,3% sur l’ensemble du premier semestre 2024 par rapport au premier semestre 2023.
Moteurs de la baisse du 2e trimestre
Au 2e trimestre 2024, la croissance de la demande nationale en énergie (+ 4,2% par rapport au 2e trimestre 2023) a été plus lente que celle observée en 2023 et au premier trimestre 2024. Néanmoins, cette croissance reste toujours beaucoup plus élevée que la tendance pré-Covid.
Hausse de la capacité de production d’électricité d’origine solaire et éolienne
Une forte hausse de la capacité de production d’électricité bas-carbone (éolien et solaire en l’occurrence) explique en très grande partie la baisse des émissions de CO2 en Chine. Au premier semestre 2024, la Chine a ajouté 102 GW de capacité de production d’énergie solaire (+31% par rapport au premier trimestre 2023) et 26 GW de capacité de production d’énergie éolienne (+12%) (source : Agence Nationale de l’Energie de la Chine).
Figure 2. Capacité de production d’énergie solaire (à gauche) et éolienne (à droite) par an (cumulée par mois, en GW) 2021-2024. Source : Carbon Brief, 8 août 2024.
Cette capacité accrue a donc conduit à une forte hausse de la production d’électricité d’origine solaire et éolienne, couvrant ainsi 52% de la croissance de la demande en électricité au premier semestre 2024 et 71% depuis mars 2024.
Selon l’Agence nationale de l’énergie (National Energy Administration ou NEA) de la Chine, la production d’électricité d’origine solaire et éolienne a progressé de 171 TWh au premier semestre 2024, soit un niveau supérieur à la production totale d’électricité du Royaume-Uni pendant le premier semestre 2023 (160 TWh) (sources : Carbon Brief, 8 août 2024 et Gouvernement britannique, 30 juillet 2024).
Electrification du parc des véhicules et baisse des activités de construction
La demande de produits pétroliers a enregistré une baisse de 3% au 2e trimestre 2024 par rapport au 2e trimestre 2024.
Le passage aux véhicules électriques contribue à cette baisse, la part des véhicules électriques dans les ventes cumulées de véhicules au cours des 10 dernières années atteignant 11,5% en juin 2024, contre 7,7% en juin 2023, avec pour conséquence une baisse d’environ 4% de la demande de carburants pour le secteur des transports.
La poursuite de la baisse des activités de construction, qui se manifeste par la baisse de la production de ciment et d’acier (suite à une baisse de la demande de ces produits dans le secteur de la construction), affecte également la demande de pétrole, car le secteur de la construction est une source importante de demande de produits pétroliers pour le transport de marchandises et les machines.
Un autre facteur clé est la faible demande de pétrole en tant que matière première pour le secteur de la pétrochimie.
Evolution des émissions de CO2 par secteur
Ces évolutions en matière de demande d’énergie expliquent les contributions respectives des différents secteurs émetteurs à la baisse des émissions de CO2 au deuxième semestre 2024. En particulier, les émissions de CO2 du secteur de la production d’électricité ont connu une baisse de 3% au 2e trimestre 2024 par rapport au 2e trimestre 2023.
Figure 3. Evolution des émissions de CO2 par secteur émetteur au 2e trimestre-2024 par rapport au 2e trimestre 2023 (en Mt CO2). Source : Carbon Brief, 8 août 2024.
Où en est la Chine par rapport à ses engagements climat-énergie ?
Au premier semestre 2024, l’intensité énergétique de la Chine a connu une amélioration de 5,5% (par rapport à la même période en 2023) et ce, alors que pour atteindre l’objectif de -18% sur 2021-2025, elle doit baisser de 7% par an sur 2024-2025, selon les estimations de Lauri Myllyvirta (source : Carbon Brief, 22 février 2024. Voir surtout le tableau « China’s 2025 climate commitments and targets in the energy sector »).
Les objectifs climat de la Chine : vers un objectif de réduction des émissions de CO2 en valeur absolue
Au niveau international
En 2009, dans le cadre de l’Accord de Copenhague, la Chine s’était engagée pour la première fois à réduire son intensité carbone (émissions de CO2 rapportées à la croissance économique, c’est-à-dire par unité de PIB), de 40 à 45% avant 2020 par rapport au niveau de 2005.
Le 30 juin 2015, la Chine a soumis sa contribution nationale prévue déterminée au niveau national (Intended Nationally Determined Contribution ou INDC) au titre de laquelle elle a renforcé son objectif de l’Accord de Copenhague. Ainsi, elle s’est engagée à atteindre une réduction de 60 à 65% de son intensité carbone en 2030 et à atteindre un pic de ses émissions de CO2 autour de 2030, en s’efforçant d’atteindre le pic avant cette échéance.
Dans le cadre de sa contribution nationale (NDC) soumise le 28 octobre 2021 à la CCNUCC au titre de l’article 4 de l’Accord de Paris, la Chine s’est engagée à renforcer ses objectifs 2030, notamment en visant désormais :
▪ à atteindre un pic d’émissions de CO2 avant 2030,
▪ à atteindre la neutralité carbone avant 2060,
▪ un objectif de réduction de plus de 65% des émissions de CO2 d’ici 2030 par unité de PIB (par rapport à 2005).
Au niveau national
Depuis le 12e plan quinquennal (five-year plan ou FYP) (2011-2015), la Chine fixe des objectifs en matière d’intensité carbone et non en valeur absolue. Ces objectifs revêtent un caractère indicatif (non-contraignant donc). La Chine fixe également des objectifs d’intensité énergétique (consommation d’énergie rapportée au PIB, par unité de PIB) qui, eux, sont contraignants pour le Gouvernement national et les administrations infranationales.
En 2016, la Chine a fixé un ensemble d’objectifs nationaux visant l’intensité énergétique et la consommation totale d’énergie et ce, dans le cadre d’un double système de réglementation de l’énergie (dual control of energy).
Le 11 février 2021, la Chine a formalisé les grandes lignes de son « 14e plan quinquennal et les objectifs 2035 ». Ce plan a fixé, pour la période 2021-2025, un objectif de réduction de 18% de l’intensité carbone (objectif indicatif) et un objectif de réduction de l’intensité énergétique de 13,5% (objectif contraignant) (source : Carbon Brief, China profile, 30 novembre 2023).
Depuis 2021, le Gouvernement central chinois préconise de remplacer le double système de réglementation de l’énergie par un double système de réglementation du carbone (dual control of carbon). C’était lors de sa conférence de travail sur l’économie centrale (central economic work conference) en 2021 que le Gouvernement central chinois a indiqué pour la première fois que la Chine devrait créer les conditions pour passer du premier au deuxième système. Le double système de réglementation du carbone serait composé d’objectifs tant en valeur relative (intensité carbone) qu’en valeur absolue (émissions totales de CO2). Jusque-là, la Chine n’a fixé d’objectifs qu’en matière d’intensité carbone, et non pas en valeur absolue.
Ce changement de cap a commencé à se concrétiser le 2 août 2024 lorsque le Conseil d’Etat (State Council), instance administrative suprême de la Chine, a publié un plan de travail pour accélérer la conception du nouveau système. Ce plan de travail esquisse les étapes de la transition de l’ancien système vers le nouveau système.
Le plan définit deux étapes pour mettre en œuvre le nouveau système :
▪ au titre du 15e plan quinquennal, qui couvrira la période 2026-2030, l’objectif d’intensité carbone 2030 restera l’objectif principal, mais il deviendra contraignant et il sera assorti d’un objectif de réduction en valeur absolue à caractère non-contraignant (indicatif) pour 2030 (selon Carbon Brief, sous forme de plafond d’émissions de CO2 à ne pas dépasser d’ici une échéance à déterminer, plutôt que sous forme d’une réduction des émissions d’un pourcentage à déterminer d’ici une échéance à déterminer, par rapport à une année de référence à déterminer).
▪ une fois le pic d’émissions de CO2 atteint (avant 2030 conformément à l’objectif fixé par la NDC de la Chine soumise en 2021), dans le cadre du 16e plan quinquennal (2031-2035), le Gouvernement central fixera, pour cette période, un objectif de réduction à caractère contraignant en valeur absolue qui deviendra ainsi l’objectif principal. Quant à l’objectif d’intensité carbone, il deviendra l’objectif secondaire (à caractère indicatif). Ce nouveau double système de réglementation du carbone sera reconduit pour les périodes quinquennales de planification économique suivantes.
Par ailleurs, le plan de travail prévoit la mise en place, d’ici 2025, d’un système complet de production de statistiques et de comptabilisation des émissions de CO2. Parmi les éléments clés de ce système figureront les normes en matière d’empreinte carbone, une base de données nationales de facteurs d’émission, ainsi que d’autres éléments en matière d’estimation et de suivi des émissions.
Le plan de travail du 2 août 2024 constitue le schéma directeur pour permettre à la Chine de passer à un mode de développement économique soumis à des contraintes en matière de limitation des émissions de CO2 et donc de découpler ses émissions de CO2 de sa croissance économique. Avec la mise en place de ce nouveau système, la Chine fixera alors pour la première fois un objectif de réduction en valeur absolue.
(sources : Carbon Brief, China Briefing, 8 août 2024, post de Lauri Myllyvirta sur X (anciennement Twitter), le 3 août 2024 et post sur X de Yan Qin, chargée de recherche à l’Oxford Institute for Energy Studies, le 2 août 2024).
Vers un pic d’émissions de CO2 plus tôt que prévu ?
D’après la nouvelle analyse de Lauri Myllyvirta (publiée par Carbon Brief le 8 août 2024), cette baisse de 1% observée au premier trimestre 2024 montre que la Chine reste sur la bonne voie pour réaliser une baisse des émissions de CO2 pour l’ensemble de l’année 2023. Cette perspective positive est néanmoins tributaire d’une baisse de la croissance de la demande d’électricité au 2e semestre 2024.
Selon l’analyse précédente de Lauri Myllyvirta publiée par Carbon Brief le 28 mai 2024, si le développement des énergies bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaire) continue au niveau record de 2023, il se pourrait que la Chine ait atteint son pic d’émissions de CO2 en 2023. La trajectoire de l’économie chinoise dans les mois à venir déterminera le moment où interviendra ce pic.
Cependant, reste une grande incertitude : la trajectoire des émissions de CO2 une fois passé le pic. En plus de la question clé « Quand la Chine va-t-elle atteindre son pic d’émissions de CO2 », une deuxième question tout aussi importante se pose : « à quel niveau parviendra-t-elle à baisser ses émissions de CO2 ensuite ? » car la Chine va atteindre son pic alors que ses émissions sont déjà à un niveau très élevé. Si ses émissions plafonnent et restent à ce niveau de plafond plutôt que de baisser, cela pourrait compromettre l’atteinte des objectifs climat mondiaux (dont le non-franchissement du seuil +1,5°C).
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Analyse publiée par Carbon Brief
Voir aussi China Briefing du 8 août 2024, section “China moves towards ‘dual-control of carbon’ with new work plan”
Voir aussi analyse des objectifs climat de la Chine par Climate Action Tracker
Citepa recrute un(e) Ingénieur(e) d’études – chargé(e) de projets carbone – utilisation des terres, sols, biomasse, forêt, données géospatiales
Le Citepa cherche à renforcer son équipe Agriculture, Forêt et Usage des Terres et recrute :
– un(e) Ingénieur(e) d’études – chargé(e) de projets carbone – utilisation des terres, sols, biomasse, forêt, données géospatiales
Détails du poste : Un(e) Ingénieur(e) d’études – chargé(e) de projets carbone – utilisation des terres, sols, biomasse, forêt, données géospatiales
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Décarbonation de l’industrie : signature des contrats de transition des 50 sites les plus émetteurs
Le 22 novembre 2023, les contrats de transition écologique (voir encadré ci-dessous) des principales entreprises industrielles françaises les plus émettrices de CO2 ont été signés par le Ministre délégué chargé de l’Industrie et les présidents des entreprises concernées, en présence de la Première ministre. Ces contrats ont ensuite été présentés le 13 décembre 2023, le Ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.
Etapes précédentes
Le 8 novembre 2022, le Président de la République avait réuni à l’Elysée les dirigeants des 50 sites industriels les plus émetteurs de GES en France pour donner une nouvelle impulsion à la décarbonation de ce secteur et leur proposer un contrat : s’ils parviennent à doubler leurs efforts de réduction (soit de parvenir à une réduction de 20 Mt CO2 d’ici 2030), le Gouvernement doublera les moyens consacrés à cet enjeu, passant de 5 à 10 Md€ d’ici 2030 (lire notre article). Ainsi, la rédaction de contrats de transition écologique a été lancée, précisant le calendrier et les modalités de réduction de leurs émissions de GES. Une clause de revoyure était alors initialement prévue à 18 mois (à l’été 2024 donc) pour déterminer comment accroître ces mécanismes d’accompagnement public.
-45% d’émissions entre 2015 et 2030
Les entreprises concernées génèrent actuellement 55% des émissions industrielles en France et environ 12% des émissions nationales (le secteur de l’industrie manufacturière et construction représente 17,4% des émissions totales en France en 2023, source Citepa, rapport Secten éd. 2024, pré-estimation). Avec ces contrats, elles s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 45% d’ici 2030 et de 50% d’ici 2032, par rapport à 2015, à l’aide d’investissements estimés entre 50 et 70 milliards d’euros.
Au total, 32 contrats rassemblant 23 entreprises ont été établis :
Figure 1. Liste des contrats de transition. Source : Direction Générale des Entreprises
Nouvelles feuilles de route de décarbonation de certaines filières
Dans le cadre du plan de relance (lire notre article) et en application de l’article 301 de la loi climat et résilience (loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 – lire notre brève), des feuilles de route de décarbonation, pour chaque secteur fortement émetteur de gaz à effet de serre, devaient être élaborées avant le 1er janvier 2023. De nombreuses feuilles de routes ont donc été publiées courant 2022 et 2023 : voir notre article faisant le point sur les filières concernées. Depuis, de nouvelles feuilles de route ont été publiées ou mises à jour, et annoncées à l’occasion de la signature des contrats de transition des 50 sites les plus émetteurs :
- Feuille de route de décarbonation de la filière Ciment– Mai 2023 – sachant que parmi les 50 sites les plus émetteurs, 20 sont des cimenteries
- Feuille de route de décarbonation de la filière Verre– Juin 2023
- Feuille de route de décarbonation de la filière Chaux calcique– Juin 2023
- Feuille de route de décarbonation de la filière Tuiles et briques– Mai 2023
- Feuille de route relative à la décarbonation des Industries agroalimentaires– Septembre 2023
- Feuille de route de décarbonation de la Chimie– Juin 2023
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Emissions de CH4 : hausse de 7% des volumes de gaz de torchage relâchés par les activités pétrolières en 2023
Le 20 juin 2024, le Partenariat mondial pour la réduction du torchage et du méthane (Global Flaring and Methane Reduction Partnership ou GFMR) a publié son rapport annuel de suivi (Global Gas Flaring Tracker Report) des volumes de gaz de torchage évacués lors de la production de pétrole par des compagnies pétrolières. Le précédent rapport avait été publié le 29 mars 2023.
Méthodologie
La Banque mondiale, en collaboration avec une université technique américaine, la Colorado School of Mines, estime régulièrement les volumes de gaz brûlés dans les installations pétrolières et gazières, ainsi que dans les installations de production du gaz naturel liquéfié (GNL), à travers le monde, en se basant sur les données Nightfire de la suite de détecteurs VIIRS (Visible Infrared Imaging Radiometer Suite of detectors) embarqués sur satellite. Au fil des ans, ces partenaires ont collaboré au développement d’algorithmes avancés permettant de distinguer les torches des autres sources chaudes et d’estimer les volumes de gaz naturel torché, en prenant en compte notamment la couverture nuageuse (pour plus d’informations sur la méthodologie utilisée pour produire ces données, se reporter à l’annexe A du rapport 2024 du GFMR, p.40.).
Evolution 2022/2023
Selon les nouvelles estimations de ce dispositif de suivi, le volume total de gaz naturel torché est passé de 139 milliards (Md) de m3 en 2022 à 148 Md m3 en 2023, soit une hausse de 9 Md m3 (+7%). Ce total de 148 Md m3 estimé en 2023 est le niveau le plus élevé observé depuis 2019 (période pré-Covid-19). Selon le GFMR, ces nouveaux résultats démontrent que les efforts mondiaux consentis pour réduire la pratique de torchage du gaz naturel ne sont pas suffisants et qu’il faut d’urgence agir pour atteindre l’objectif de zéro torchage systématique d’ici 2030 (fixé par l’initiative Zéro torchage systématique d’ici 2030 – voir encadré ci-dessous).
Evolution 2022/2023 par rapport au volume de pétrole produit dans le monde
En même temps, la production mondiale de pétrole n’a connu qu’une légère augmentation (+1%), passant de 80,4 millions de barils de pétrole par jour (Mb/j) en 2022 à 81,6 Mb/j en 2023. Par conséquent, l’intensité du torchage mondial (c’est-à-dire la quantité de gaz naturel brûlé à la torche par baril de pétrole produit) a augmenté entre 2022 et 2023, passant de 4,7 mètres cubes par baril (m3/b) en 2022 à 5,0 m3/b en 2023 (soit +5%).
Volume total de gaz naturel torché (en millions de m3/an) par rapport au volume total de pétrole produit (en millions de barils/jour) (1996-2023)
Source : rapport 2024 GFMR (p.14) d’après Payne Institute/Colorado School of Mines, NOAA, EIA, et Banque mondiale
Volume total de gaz naturel torché (en millions de m3/an) et intensité du torchage mondial (en m3/baril) (1996-2023)
Source : rapport 2024 GFMR (p.15) d’après Payne Institute/Colorado School of Mines, NOAA, EIA, et Banque mondiale.
Evolution 2021/2022
La hausse des volumes de gaz naturel torché observée entre 2022 et 2023 intervient après une baisse de 3% entre 2021 et 2022 (les volumes torchés passant de 144 Md m3 en 2021 à 139 Md m3 en 2022). La production de pétrole avait augmenté de 5% pour atteindre 80,4 Mb/j en 2022), contre 77 Mb/j en 2021. En conséquence, l’intensité moyenne mondiale du torchage est tombée à 4,7 m3/b en 2022, contre 5,1 m3/b en 2021.
Ces évolutions interannuelles sont à relativiser : lorsqu’on observe la série historique, l’intensité moyenne mondiale du torchage a connu une baisse dans les années 1990-2000, puis s’est plutôt stabilisée depuis les années 2010. La hausse observée en 2023 intervient après une baisse de même ampleur en 2022, et le niveau atteint en 2023 retrouve le niveau moyen observé depuis les années 2010.
Valeur marchande du gaz torché en 2023
Sur la base du cours actuel du gaz, la valeur marchande potentielle du volume total de gaz naturel torché en 2023 s’élèverait, selon les estimations du GFMR, à un niveau compris entre 9 et 48 milliards de $.
Quelle quantité d’émissions de GES représenterait le volume total mondial de gaz naturel torché en 2023 ?
Selon les calculs du GFMR, le volume total de gaz naturel torché en 2023 (148 Md m3) représenterait au moins 381 Mt CO2e, soit, un peu plus que les émissions totales de GES en France en 2023 (373 Mt CO2e [France métropolitaine et territoires d’Outre-mer inclus dans l’UE, hors UTCATF, pré-estimation. Source : Citepa, Rapport d’inventaire Secten éd. 2024, 19 juin 2024]).
Par ailleurs, la hausse de 9 Md m3 (+7%) du volume total de gaz naturel torché entre 2022 et 2023 représenterait 23 Mt CO2e d’émissions supplémentaires de GES en 2023 par rapport à 2022, soit un peu moins du total des émissions de GES de la Croatie en 2021 (45,5 Mt CO2e, source : CCNUCC, Time series annex I countries).
Les neuf premiers pays concernés par le torchage
La Russie, l’Iran, l’Irak, les États-Unis, le Venezuela, l’Algérie, la Libye, le Nigeria et le Mexique restent les neuf premiers pays de torchage en 2023 et ce, depuis plus de 10 ans. Cumulés, ces neuf pays sont responsables de 75% des volumes de gaz naturel torché dans le monde en 2023, mais seulement 46% de la production mondiale de pétrole. Plus de 60 pays représentent les 25% restants du volume total mondial en 2023.
Volumes de gaz naturel torchés dans les 30 premiers pays concernés, en mettant en évidence les neuf premiers pays concernés (2019-2023) (en milliards de m3)
Source : rapport 2024 GFMR (p.11) d’après Payne Institute/Colorado School of Mines, NOAA, EIA, et Banque mondiale.
Le torchage de gaz, le Partenariat mondial pour la réduction du torchage et du méthane et l’initiative Zéro torchage systématique d’ici 2030
Le torchage de gaz
Lors de la production de pétrole, le gaz naturel constitue un sous-produit. Ainsi, le gaz naturel associé à la production de pétrole est souvent brûlé à la torche (pratique appelée « torchage » ou « flaring » en anglais) ou même parfois évacué lorsque des obstacles économiques, réglementaires ou techniques au développement des marchés du gaz et des infrastructures gazières empêchent son utilisation ou lorsque la réinjection du gaz associé dans le gisement n’est pas possible (source : GFMR).
Le Partenariat mondial pour la réduction du torchage et du méthane
Le Partenariat mondial pour la réduction du torchage et du méthane (Global Flaring and Methane Reduction Partnership ou GFMR) de la Banque mondiale, anciennement Partenariat mondial pour la réduction du torchage de gaz (Global Gas Flaring Reduction Partnership ou GGFR), est un fonds fiduciaire multi-donateurs composé de Gouvernements nationaux, de compagnies pétrolières et d’organisations multilatérales qui se sont engagés à mettre fin au torchage systématique sur les sites de production pétrolière dans le monde entier et à réduire les émissions de méthane du secteur pétrolier et gazier à un niveau proche de zéro d’ici à 2030.
Parmi les partenaires figurant l’Allemagne, la Norvège, les Etats-Unis, les Emirats arabes unis, ainsi que les compagnies BP, ENI, Equinor, Occidental, Shell et TotalEnergies (NB. le site du GFMR ne fournit pas de liste complète des membres du Partenariat).
Le GFMR se concentre sur l’octroi de subventions, l’assistance technique, les services de conseil en matière de réforme politique et réglementaire, le renforcement des capacités institutionnelles et la mobilisation de financements pour soutenir l’action des Gouvernements nationaux et des exploitants, et ainsi accélérer le déploiement de solutions de réduction des émissions de méthane.
Le GGFR a été lancé en août 2002 lors du Sommet mondial sur le développement durable (dit Rio+10) à Johannesburg (Afrique du Sud).
L’initiative Zéro torchage systématique d’ici 2030
L’initiative Zéro torchage systématique d’ici 2030 (Zero Routine Flaring by 2030 Initiative ou ZRF) a été lancée en 2015 par la Banque mondiale. Les Gouvernements et les compagnies pétrolières qui y ont souscrit s’engagent à mettre fin au torchage systématique du gaz naturel d’ici 2030 au plus tard et à rendre compte (déclarer) chaque année de leurs activités de torchage et des progrès accomplis dans le cadre de l’initiative.
L’initiative est conçue pour faciliter la coopération entre toutes les parties prenantes afin que des solutions pour mettre fin au torchage systématique du gaz naturel puissent être identifiées et mises en œuvre.
Bien que l’initiative soit volontaire, les engagements sont suivis et évalués par divers moyens, notamment les rapports établis par les Gouvernements et les compagnies pétrolières, ainsi que par des observations par satellite.
Les signataires de l’initiative ZRF représentent aujourd’hui environ 60% du volume total du gaz naturel brûlé à la torche dans le monde.
Conclusions
Le GFMR souligne que la hausse du volume mondial de gaz naturel torché en 2023 met en évidence la nécessité pour les producteurs de pétrole d’accélérer leurs efforts afin de mettre fin au torchage systématique, en découplant la production pétrolière et le torchage du gaz naturel, et de minimiser les émissions de CH4 provenant des activités pétrolières et gazières.
Le rapport souligne également l’importance de la transparence et du rapportage rigoureux du torchage et des émissions de CH4, de la mise en œuvre de technologies à faibles émissions dans les systèmes de torchage, et d’un changement d’attitude et des politiques pour considérer le gaz associé à la production pétrolière comme une ressource plutôt que comme un sous-produit.
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Communiqué de la Banque mondiale
Banque mondiale / Global Flaring and Methane Reduction Partnership (GFMR) : Global gas flaring tracker report – June 2024, 24 juin 2024
Banque de données du GFMR (Global gas flaring data) présentant les volumes de gaz naturel torché par pays (en millions de m3)
Répartition de l’empreinte carbone des français – nouvelle étude du Citepa et de l’ABC
Le Citepa et l’ABC (Association pour la transition Bas Carbone) ont réalisé avec l’appui financier et la collaboration de l’ADEME, une étude sur la répartition de l’empreinte carbone des Français. Cette étude, qui mobilise l’outil Nos Gestes Climat (NGC) ainsi que des études statistiques, se fonde en grande partie sur une enquête menée entre le 21 avril et le 10 mai 2023 auprès d’un échantillon de 4 096 personnes, représentatif de la population française adulte.
Objectifs de l’étude : évaluer les typologies d’empreinte des Français
L’empreinte carbone mesure les émissions de gaz à effet de serre associées à la production des biens et services qui sont utilisés en France, qu’ils soient fabriqués sur le territoire ou importés. Cette empreinte est estimée ici avec une nouvelle méthode à partir de l’outil NGC proposant un questionnaire sur la consommation et les pratiques des individus. Cette étude comporte plusieurs volets :
- Une évaluation de l’empreinte carbone selon différents critères : profils socio-démographiques, rapport à l’environnement, territoires d’habitation, domaine de pratiques, région, etc.),
- La mesure de l’effet de l’outil de sensibilisation Nos Gestes Climat sur la compréhension des enjeux, la prise de conscience de son empreinte individuelle et l’engagement à changer certaines pratiques,
- L’identification des disparités entre populations pour orienter et suivre les politiques de décarbonation.
Premiers résultats
Ils indiquent que l’empreinte varie peu entre régions administratives mais sensiblement en fonction du revenu, tout en indiquant les principaux secteurs d’émissions carbone :
- Homogénéité régionale : l’empreinte carbone semble assez uniforme au sein des différentes régions administratives de France, avec quelques variations expliquées principalement par les conditions de logement. A l’intérieur d’une région en revanche, l’empreinte carbone peut varier plus nettement selon les conditions de vie et les lieux.
- Influence majeure du revenu : les personnes à revenu plus élevé ont une empreinte carbone supérieure, surtout dans les derniers déciles de revenu. Ainsi, pour les revenus mensuels inférieurs à 750 €, l’empreinte individuelle adulte serait de 7 tonnes par an et pour les revenus supérieurs à 6 500 €, elle serait de 12 tonnes.
- Leviers de décarbonation : les principaux postes de consommation contribuant à l’empreinte carbone sont les transports (25%), l’alimentation (23%), le logement (18%) et les services sociétaux (18%). C’est notamment presque exclusivement sur le transport que les revenus les plus élevés creusent l’écart en matière d’empreinte carbone, ce domaine représentant jusqu’à 39% du total des émissions des personnes dont le revenu du foyer est supérieur ou égal à 6 500€. Pour autant, les transports est le domaine d’action pour lequel les répondants ont le sentiment d’agir le plus aujourd’hui.
Perception de l’empreinte
40% des participants pensaient que leur empreinte était plus basse ; 80 % des sondés disent vouloir faire davantage pour réduire leur empreinte après le test NGC et deux tiers disent vouloir parler de leur résultat et des moyens de réduire l’empreinte avec leurs proches.
Apports de cette étude
La valeur ajoutée de cette étude consiste à montrer quelles sont les variables influant sur le niveau d’empreinte afin de suivre et d’orienter les politiques de décarbonation. Les résultats éclairent les experts et les pouvoirs publics sur les leviers et actions de décarbonation en fonction des différentes typologies de Français.
Limites de cette étude et perspectives
La méthodologie basée sur un questionnaire autoadministré et adressé aux seuls adultes, comporte des biais spécifiques aux déclarations. Des redressements statistiques ont été effectués pour améliorer la précision des données et les compléter avec les personnes de moins de 18 ans. L’estimation du niveau moyen de l’empreinte individuelle annuelle des Français serait d’environ 8 tonnes CO2eq pour l’année 2022[1]. Il est probable que ce résultat minore un peu la réalité compte tenu de la difficulté de prise en compte de certains investissements dans la consommation des ménages. Ainsi, l’empreinte moyenne par personne est évaluée à environ 9 tonnes par le SDES, qui applique les méthodes standard à partir des statistiques publiques officielles[2]. Alors que cette étude se fonde principalement sur une enquête déclarative couplée à des facteurs d’émissions d’analyse de cycle de vie, la statistique publique adopte une approche macro-économique qui permet de répartir la totalité des émissions mondiales et annuelles de GES en fonction du lieu où sont consommés les biens et services. Les résultats sur l’empreinte et sa répartition présentent aussi des écarts significatifs avec d’autres études[3]. Il reste dans tous les cas un long chemin à parcourir pour s’approcher de la neutralité carbone en 2050.
Une seconde vague d’enquête en 2024 pourrait permettre de stabiliser la méthode pour ensuite, par vagues successives, suivre l’évolution des comportements et les impacts des politiques et mesures sur les différentes catégories de Français. A ce stade, les résultats d’empreinte issus des deux approches ne sont pas directement comparables. D’autres réflexions et investigations seront nécessaires pour cerner les complémentarités entre approches, les domaines d’utilisation de ces différentes méthodes et leurs rapprochements possibles.
Conclusion
L’étude met en évidence l’importance de mener des politiques de décarbonation ciblées, compte tenu de la variation des niveaux d’empreinte selon les revenus et les catégories socio-professionnelles, et de l’impact des leviers à la disposition des publics mis en évidence notamment dans l’application Nos Gestes Climat.
Ce travail ouvre également la voie à des études supplémentaires pour affiner ces résultats initiaux, les mettre en regard avec d’autres formes de calculs d’empreinte carbone et contribuer à améliorer les politiques de décarbonation vers toujours plus efficacité et d’équité.
Réaction d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition énergétique
« Je remercie le Citepa et l(ABC pour cette étude qui montre que les citoyens souhaitent faire davantage pour réduire leur empreinte carbone lorsqu’ils sont sensibilisés. Je retiens aussi une dichotomie : alors que l’écart d’empreinte carbone entre les plus riches et les plus modestes provient majoritairement de l’usage des transports, c’est sur les transports justement que les répondants ont le sentiment d’agir le plus aujourd’hui. Et toutes les régions sont concernées. Ceci conforte la vision et la stratégie que je porte : d’une part, apporter des solutions concrètes et accessibles aux classes moyennes et modestes, en renforçant l’aide à l’achat des voitures électriques ou en renforçant les transports en commun par exemple ; d’autre part, faire en sorte que les acteurs les plus émetteurs payent progressivement le juste prix du carbone. C’est une question de justice sociale. »
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Accéder aux données détaillées
Notes
[1] Les consommations sont déclarées pour l’année 2022 mis à part quelques cas spécifiques comme pour l’avion dont les usages ont été moyennés sur trois ans compte tenu des impacts de la période Covid.
[2] https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/lempreinte-carbone-de-la-france-de-1995-2021
[3] Notamment SDES, Eurostat/Figaro, OCDE/Icio.
Émissions de gaz à effet de serre en France: nouvelle estimation l’année 2023 avec les données Secten du Citepa.
Le Citepa a mis à jour son estimation des émissions de gaz à effet de serre. Ces nouveaux résultats, que Gabriel Attal a annoncé hier, permettent d’éclairer la trajectoire récente de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France. Le Citepa publiera l’édition 2024 de son rapport Secten le 19 juin, avec les données complètes. Ce rapport présentera l’ensemble de ces résultats en détail.
En bref
D’après le Citepa, qui a mis à jour sa pré-estimation relative à 2023, les émissions de gaz à effet de serre en France ont diminué de 5,8% (-22,8 Mt CO2e) entre 2022 et 2023, hors puits de carbone. Cette baisse est plus forte que dans ses estimations précédentes publiées en mars 2024, du fait notamment de la mise à jour de certains indicateurs. Le budget carbone hors UTCATF est respecté sur la période 2019-2023. Tous les grands secteurs émetteurs participent à cette réduction : – 7,7 Mt pour l’industrie de l’énergie, -6,1 Mt pour l’industrie manufacturière, -4,4 Mt pour les transports, -3,4 Mt pour les bâtiments et -1,2 Mt pour l’agriculture. En revanche, en comptant l’UTCATF, le budget carbone 2019-2023 n’est pas respecté (moyenne observée de 380 Mt contre un objectif de 379 Mt, soit un dépassement de 1,4 Mt).
Emissions de GES hors puits de carbone et budget carbone
Les estimations présentées ici remplacent celles précédemment publiées. En particulier, en mars 2024, le Citepa avait publié une baisse des émissions de GES hors puits de carbone de 4,8% entre 2023 et 2022. Cette réduction est désormais estimée à 5,8%. L’amélioration, la mise à jour et affinements de plusieurs indicateurs, en particulier pour le transport aérien, l’industrie chimique, l’agriculture et la production d’électricité, pour la publication du rapport Secten explique ce résultat différent, plus précis, mais qui restera à consolider en 2025 pour l’année 2023.
Gaz à effet de serre
5,8% de baisse d’émissions en 2023
D’après les données du Citepa, en France (France métropolitaine et territoires d’Outre-mer inclus dans l’UE) les émissions territoriales de gaz à effet de serre (GES) hors puits de carbone ont baissé de -5,8% (-22,8 Mt CO2e) entre 2022 et 2023, hors UTCATF. Elles sont passées de 396 Mt CO2e en 2022 à 373 Mt CO2e en 2023 (pré-estimation de l’inventaire proxy), soit en dessous du niveau minimum record de 2020 (389 Mt CO2e). Ramenées au nombre d’habitants, elles passent de 5,5 tCO2e/habitant à 5,2 t. Tous les grands secteurs participent à la baisse de 22,8 Mt CO2e : – 7,7 Mt pour l’industrie de l’énergie, -6,1 Mt pour l’industrie manufacturière, -4,4 Mt pour les transports, -3,4 Mt pour les bâtiments et -1,2 Mt pour l’agriculture. L’évolution 2022-2023 du secteur des déchets (4% des émissions totales) et celle de l’UTCATF (Utilisation des Terres, Changements d’Affectation des Terres et Forêt) ne sont pas encore pré-estimées spécifiquement faute d’indicateurs fiable. Si l’on distingue gaz par gaz, les émissions de CO2 hors UTCATF ont baissé, entre 2022 et 2023, de 6,9% ; celles de méthane (CH4) de 1,3% et celles de protoxyde d’azote (N2O) de 1,9%.
Après un plateau relatif dans les années 1990 jusqu’en 2005, une diminution irrégulière de 2006 à 2014, puis une période de lente ré-augmentation des émissions entre 2014 et 2017, les émissions de GES connaissent une dynamique de réduction plus marquée depuis 2017, sans compter l’effet temporaire du Covid (baisse de 9,2% en 2020 et rebond de 5,7% en 2021).
Evolutions des émissions de GES entre 2018 et 2023 (Mt CO2e)
Electricité : plus de production décarbonée, moins de consommation
En 2023, deux facteurs expliquent la baisse des émissions du secteur de l’industrie de l’énergie : la hausse de la production d’électricité bas-carbone et la poursuite de la baisse de la consommation d’électricité. L’année 2022 avait été marquée par un manque de disponibilité de plusieurs centrales nucléaires. En 2023, ces centrales ont progressivement repris leur activité. La production d’électricité nucléaire a ainsi connu une forte hausse (+41,5 TWh). La production renouvelable a aussi augmenté (+9 TWh pour l’hydraulique, +12 TWh pour l’éolien, +3 TWh pour le solaire). La production par les centrales thermiques a donc été réduite (-14 TWh pour les centrales à gaz : les centrales à charbon n’ont représenté que 0,8 TWh). Après une année 2022 déjà marquée par un faible niveau de consommation d’électricité, dans un contexte de crise énergétique et d’appels à la sobriété, celle-ci s’est de nouveau réduite en 2023 (-3%).
Pour le secteur de l’industrie de l’énergie, le niveau d’émissions atteint en 2023, de 35 Mt CO2e, constitue le niveau le plus bas depuis 1990, en baisse de -17,9% par rapport à 2022. Le budget carbone de la SNBC-2 (ajusté en 2023) pour ce secteur, de 48 Mt CO2e par an en moyenne sur 2019-2023 est donc respecté avec une moyenne des émissions de 41,5 Mt CO2e sur cette période. La SNBC-2 prévoit d’atteindre environ 30 Mt CO2e à horizon 2030 ; et l’objectif provisoire présenté en amont de la prochaine SNBC-3 est de 27 Mt CO2e à cet horizon.
Bâtiments : baisse des émissions du chauffage
Les émissions de gaz à effet de serre du secteur des bâtiments sont principalement liées à l’usage de combustibles fossiles pour le chauffage résidentiel et tertiaire. Au global sur l’année 2023, le secteur résidentiel-tertiaire atteint, avec 58,4 Mt CO2e, le niveau d’émissions de GES le plus bas depuis 1990, et dans la continuité de la diminution des émissions observées depuis 2017, malgré une hausse temporaire observée en 2021. Ainsi, le budget carbone fixé pour ce secteur dans la SNBC-2 (ajustée en 2023) pour la période 2019-2023, de 78 Mt CO2e/an en moyenne, est respecté avec 68,6 Mt CO2e entre 2019 et 2023.
Plusieurs facteurs jouent sur cette baisse :
- poursuite des comportements de sobriété des ménages et entreprises : la demande de sobriété par le Gouvernement en 2022 a été suivie en 2022 et se poursuit certainement en 2023 dans le contexte d’inflation qui perdure en 2023.
- continuation des rénovations thermiques des bâtiments, en lien avec les mesures MaPrim’Renov, et installations de pompes à chaleur air-air et eau-eau en hausse en 2023) ;
- météo: Les données mensuelles du baromètre du Citepa montrent que sur les mois de chauffage, seuls les mois de janvier et décembre 2023 ont été plus doux que ceux de 2022. Les émissions liées au chauffage ont baissé jusqu’en avril puis en décembre.
- prix de l’énergie et inflation: les prix à la consommation ont augmenté de 3,7% en 2023 d’après l’Insee, et les prix de l’énergie ont aussi connu des hausses (+5,7 % en 2023).
Transport routier : la lente réduction du premier secteur émetteur
Le transport routier est le premier émetteur de GES en France, avec 119 Mt CO2e en 2023, soit près d’un tiers des émissions totales. La baisse estimée entre 2022 et 2023, de 3,4%, s’inscrit dans une tendance à la baisse depuis 2015 (‑0,8 %/an en moyenne entre 2015 et 2019). En 2020, en raison de la limitation des déplacements lors de la pandémie de Covid-19, les émissions de ce secteur avaient baissé de près de 15 %, suivi d’un rebond en 2021 et 2022.
L’année 2023 s’annonce plus faible de 3,4 % que l’année 2022. Plusieurs effets expliquent en grande partie cette tendance à la baisse des dernières années. Il y a des effets de court terme tel que les augmentations des prix des carburants à la pompe qui limitent les déplacements non contraints au moment des hausses. Il y a aussi des effets de moyen et long terme comme le renouvellement du parc par des véhicules moins énergivores (véhicules électriques par exemples) ou comme le report modal (covoiturage, modes doux).
Aérien : réduction sur les vols domestiques
Les émissions du transport aérien domestique ont connu plusieurs phases : une augmentation de 1990 à 2000 (4,7 %/an), une diminution de 2002 à 2015 (-1,6%/an), une augmentation de 2015 à 2019 (+3,5 %/an) jusqu’à la crise Covid de 2020 où le trafic a été très fortement impacté (-39 % entre 2019 et 2020). 2021 et 2022 sont des années de reprise de trafic aérien domestique suite à la crise (23 %/an en moyenne sur ces 2 années). Par contre les émissions du trafic aérien domestique pour l’année 2023 sont en baisse de 3,4 % par rapport à l’année 2022. Ceci est lié à la suppression des vols de courte durée (inférieure à 2h30) si une alternative ferroviaire directe existe (Décret n° 2023-385 du 22 mai 2023).
Les émissions du trafic aérien international (comptabilisées en dehors du total national) n’ont cessé d’augmenter de 1990 à 2019 (+2,6 %/an). En 2020, avec la crise du Covid-19, la réduction massive des vols a entrainé une baisse de 57% des émissions par rapport à 2019. Depuis, le trafic croit de nouveau : En 2023, les émissions ont augmenté de 16 % par rapport à 2022 mais restent 15 % plus faible que celles de 2019.
Industrie
La tendance des émissions de GES à la baisse observée en 2022 (-8,1% par rapport à 2021) se poursuit en 2023. Les émissions totales du secteur diminuent de 8,7% entre 2022 et 2023, ce qui s’explique principalement par des baisses des émissions des trois secteurs les plus émetteurs : les minéraux non-métalliques, la chimie et la métallurgie des métaux ferreux, qui représentaient à eux trois 69% des émissions totales de GES du secteur en 2022. D’après les estimations du Citepa pour 2023, les réductions d’émission de GES observées pour ces secteurs sont de 6,9%, 6,4% et 13,9%, respectivement, comparativement à leurs niveaux de 2022. Cela s’explique notamment par la baisse des productions en 2023 des activités les plus émettrices, à savoir le ciment (-7.3%), l’acier (-6.4% pour l’acier de hauts-fourneaux) et la chimie organique et inorganique (-9%). Pour tous les autres secteurs de l’industrie, des baisses d’émissions de GES variant entre 3% et 14% sont également observées. En conséquence, la consommation de gaz naturel a chuté de 19% dans la grande industrie en 2023 (et d’environ 10% au total), comparativement à 2022, mais cette baisse est aussi liée à d’autres phénomènes structurels comme les contraintes d’approvisionnement. Les consommations des autres combustibles fossiles ont également été réduites, dans des proportions un peu moins significatives cependant.
Ainsi, le budget carbone fixé pour ce secteur dans la SNBC-2 pour la période 2019-2023, de 75 Mt CO2e/an, est respecté avec 72,5 Mt CO2e/an en moyenne. A horizon 2030, ce secteur doit atteindre 55 Mt CO2e d’après la SNBC-2 et 45 Mt CO2e d’après les objectifs provisoires annoncés en 2023 en amont de la prochaine SNBC-3 ; soit une réduction attendue par an de 2% selon la SNBC-2 et 5% selon la SNBC-3. En décembre 2023, les 50 sites industriels les plus émetteurs ont publié un objectif non contraignant de réduction de 45% de leurs émissions d’ici 2030.
Agriculture
Les émissions de GES agricoles, au total, sont en recul de 1,6 % entre 2022 et 2023 en lien avec le recul des émissions de CH4 et N2O. Les émissions agricoles de N2O sont en repli de 1,6 % entre 2022 et 2023 avec un recul des apports d’engrais minéraux au sol et d’apports organiques. Les émissions de CH4 s’inscrivent en baisse de 1,6 % notamment en lien avec le recul du cheptel bovin et dans une moindre mesure au recul du cheptel porcin. Les émissions de CO2 du secteur sont en baisse de -1,5%, malgré une hausse des émissions de CO2 liées aux apports en urée. En 2023, le cheptel bovin poursuit son recul, quoique de manière plus ralentie que les années précédentes, que ce soit pour le cheptel de vaches allaitantes (- 1,3 %), ou pour le cheptel de vaches laitières (- 2,1 %), Les livraisons d’engrais s’inscrivent également en net repli en 2023 par rapport à 2023, avec une hausse de la part d’urée. Enfin le nombre de méthaniseurs agricoles a connu en 2023 une très légère augmentation.
Ainsi, le budget carbone fixé pour ce secteur dans la SNBC-2 pour la période 2019-2023, de 77,6 Mt CO2e/an, est respecté avec 76,1 Mt CO2e/an en moyenne. A horizon 2030, ce secteur doit atteindre 69 Mt CO2e d’après la SNBC-2 et 68 Mt CO2e d’après les objectifs provisoires annoncés en 2023 en amont de la prochaine SNBC-3 ; soit une réduction attendue de 1% par an.
Le puits de carbone forestier est fragile
En parallèle des émissions des autres secteurs, le secteur de l’utilisation des terres et de la forêt représente un puits net de carbone qui permet de séquestrer du CO2 dans la biomasse et les sols. Estimé à environ -45 Mt CO2 en moyenne dans les années 2000, ce puits s’est considérablement réduit pour atteindre environ -20 Mt CO2 dans les années récentes, notamment en raison de l’effet couplé de sécheresses à répétition depuis 2015, de maladies affectant le taux de mortalité des arbres, et d’une hausse des récoltes de bois. Cette diminution du puits implique un effort encore plus conséquent sur les autres secteurs afin de parvenir à la neutralité carbone.
Initialement, l’objectif de la SNBC-2 prévoyait d’atteindre un puits de carbone entre -40 et -45 Mt à horizon 2030. Les objectifs provisoires annoncés en 2023 en amont de la prochaine SNBC-3 n’intégraient pas encore de cible pour ce secteur.
Les objectifs sont-ils respectés ?
Le budget carbone 2019-2023 de la SNBC-2 est respecté si l’on prend le total hors puits de carbone (400 Mt émis en moyenne contre un budget de 420 Mt), et n’est pas respecté si l’on prend le total avec puits de carbone (380 Mt émis contre un budget de 379 Mt). Dans le détail, le budget est atteint pour tous les secteurs à l’exception des déchets (dépassement provisoirement estimé de 1,7 Mt) et surtout de l’UTCATF (21 Mt d’absorption en moins par rapport à l’objectif). En moyenne sur 2019-2023, le total des émissions, incluant le secteur UTCATF, dépasse de 1,4 Mt (0,4%) le budget carbone.
Si l’on regarde dans le détail année après année, on voit que hors puits de carbone, budgets moyens mais aussi objectifs annuels sont respectés sauf en 2017. En revanche, objectif sur le puits de carbone n’est pas respecté depuis 2015. Cela est lié à fragilisation du puits de carbone forestier : le niveau n’a pu se maintenir comme envisagé.
Cette réduction est-elle un record ?
Ce n’est pas la première fois qu’on observe une forte baisse des émissions en France, cela s’était aussi produit en 2020 (-9,0%, crise Covid), 2014 (-6,6%, hiver très doux par rapport à 2013). 2023 (avec -5.8%) apparait donc comme la 3e année avec la baisse relative la plus forte après 2020 et 2014. En valeur absolue, 2023 avec -22,8 Mt CO2e, apparait comme la 4e année avec la baisse la plus forte, derrière toujours 2020 (-38,7 Mt CO2e), 2014 (-31,9 Mt), 2011 (-25,1 Mt, année particulièrement douce).
Néanmoins, les records de baisse précédents étaient liés, au moins en partie, à des effets conjoncturels importants. Par ailleurs, lors de ces précédentes années record, à part en 2020, tous les secteurs ne participaient pas à ces réductions d’émissions. En 2023, hors puits de carbone, on observe donc une situation inédite où tous les grands secteurs émetteurs participent à une baisse des émissions, dans un contexte particulier (inflation, reprise de production nucléaire…) mais sans crise économique majeure.
Quel est le rythme de réduction nécessaire pour les années à venir ?
Sans tenir compte des années 2020-2021 avec la crise covid et son rebond, le rythme de réduction observé entre 2018 et2023 est de -5,8% par an hors puits de carbone. La Stratégie nationale Bas-Carbone actuelle (SNBC-2) prévoit un rythme de réduction entre 3% et 4% par an, à horizon 2030. Cependant, les valeurs provisoires présentées en mai 2023 pour esquisser la mise à jour de cette stratégie, envisagent une réduction entre -4% et -5% par an à cet horizon. Il faut cependant tenir compte de la fragilité du puits de carbone qui nécessite un effort de réduction des émissions renforcé pour atteindre à terme la neutralité carbone. Ainsi, le rythme actuel de réduction des émissions doit se maintenir dans les prochaines années pour atteindre les objectifs à horizon 2030, puis s’amplifier pour se placer sur une trajectoire compatible avec l’objectif de neutralité carbone en 2050.
Comment ces estimations sont mises à jour ? Pourquoi ces chiffres sont différents des annonces précédentes ?
Les estimations présentées ici remplacent celles précédemment publiées. En particulier, en mars 2024, le Citepa avait publié une baisse des émissions de GES hors puits de carbone de 4,8% entre 2023 et 2022. Cette réduction est désormais estimée à 5,8%. L’amélioration, la mise à jour et affinements de plusieurs indicateurs, en particulier pour le transport aérien, l’industrie chimique, l’agriculture et la production d’électricité, pour la publication du rapport Secten explique ce résultat différent, plus précis, mais qui restera à consolider en 2025 pour l’année 2023.
Conformément à l’article D. 222-1-B II du Code de l’environnement, un ajustement technique provisoire des budgets carbone a été réalisé en 2023 pour conserver la même ambition de réduction mais prendre en compte les éventuels changements méthodologiques de l’inventaire (par exemple, l’utilisation de valeurs de pouvoir de réchauffement global issus de rapports plus récents du Giec). Ainsi, ce sont ces budgets carbone ajustés provisoirement qui sont utilisés ici.
Le Citepa publiera l’édition 2024 de son rapport Secten le 19 juin, avec les données complètes. Ce rapport présentera l’ensemble de ces résultats en détail.
Journée d’études 2024 – Comptabilité carbone : dispositifs et méthodes au service de la transition écologique.
La journée d’études 2024 du Citepa aura lieu le mercredi 25 Septembre de 8h30 à 14h30.
Différents outils et méthodes de comptabilité carbone existent. Dans quel but, pour quels usages ? Quelles sont leurs différences, leurs limites et leur complémentarité ? L’accord de Paris, la CSRD et le MACF sont trois dispositifs qui incitent les entreprises et les régions à plus de fiabilité et de transparence dans le rapportage de leurs émissions de gaz à effet de serre. La conférence permettra de clarifier les objectifs et périmètres de ces dispositifs, de montrer l’évolution des engagements et des exigences envers les entreprises ainsi que certaines perspectives qui permettraient d’envisager une comptabilité carbone cohérente entre les entreprises, les régions et les pays.
Avec la participation de la DGEC, la CGDD, le SDES, la BPCE, Pacte PME, RARE & les experts du Citepa.
Cette conférence est organisée avec le soutien d’AREP.
Cet évènement est gratuit et exclusivement réservé aux adhérents du Citepa.
Si vous souhaitez adhérer, vous trouverez les informations à cette page : Adhérer au Citepa – Citepa
Pour plus d’informations contactez-nous.
Formation du Citepa dans le cadre du Summer Academy sur les systèmes MRV
Les 23 et 24 juillet, dans le cadre de la « Summer Academy : renforcement des capacités et soutien technique pour les systèmes MRV régionaux », le CITEPA a dispensé une formation sur i) les lignes directrices ICTU (préparées par Gauss International Consulting) et les améliorations des CDN, ii) les rapports et indicateurs du CEE, et iii) l’adaptation des politiques et mesures pertinentes.
La Summer Academy fait partie du projet Initiative pour la Transparence de l’Action Climatique (ICAT), auquel le CITEPA participe pendant la période 2022-2024, géré par le Greenhouse Gas Management Institute et le Regional Climate Action Transparency Hub for Central Asia (ReCATH).
Emissions de gaz à effet de serre et de polluants en France : Aperçu du premier trimestre de l’année 2024 avec le baromètre du Citepa
Résumé : les récentes données du Citepa concernant l’année civile 2023, montraient une baisse des émissions de GES de -5,8% par rapport à 2022, avec une réduction de tous les grands secteurs émetteurs. En complément de ces estimations annuelles, le Citepa met à jour, tous les trois mois, son baromètre des émissions mensuelles et propose une lecture de la tendance annuelle sur les douze derniers mois. Cette pré-estimation des émissions sur les trois premiers mois de l’année 2024 (janvier, février, mars) permet un premier aperçu de la situation de l’année civile en cours et actualise les tendances de fond sur les douze derniers mois (année mobile).
La France poursuit son objectif d’environ -5% en ce début 2024
Au total des secteurs, d’après le baromètre du Citepa, les émissions de gaz à effet de serre ont continué de baisser début 2024, de -5,3% par rapport au premier trimestre 2023 (hors puits de carbone) et de -5,5% sur douze mois glissants (année mobile). Tous les grands secteurs émetteurs continuent de participer à cette baisse et, comparativement au premier trimestre 2023, les réductions sectorielles du 1er trimestre 2024 sont : la production d’énergie (-2 Mt CO2e, soit -16,8%), les bâtiments (-1,6 Mt CO2e, soit -7,1%), l’industrie (-1,1 Mt CO2e, soit -5,6%), et les transports (- 0,9 Mt CO2e, soit -3%).
La production d’énergie : accélération de la production d’électricité décarbonée
Alors que la réduction observée au premier trimestre entre 2023 et 2022 était portée par le secteur de l’industrie (-2,5 Mt CO2e, soit -11,5%) c’est au niveau du secteur de l’énergie que la baisse est la plus importante pour ce début d’année 2024.
Selon les données provisoires de RTE, la production totale d’électricité pour ce premier trimestre est en hausse (+15,32 TWh par rapport au premier trimestre de 2023). Cette évolution n’a cependant pas eu d’impact sur le niveau d’émissions associé au secteur. En effet, une forte baisse des émissions liées à la production d’électricité est observée et est expliquée par le recours réduit à la production d’électricité via les centrales thermiques à base de combustibles fossiles (-4,27 TWh, soit -31% par rapport au début d’année 2023) en faveur du nucléaire (+11,36 TWh, soit +13%) ainsi que de l’hydraulique (+7,06 TWh, soit +48%).
La dynamique de sortie des énergies fossiles se poursuit, alors qu’elles représentaient la seconde source de production au premier trimestre 2022 (11% de la production totale), elle est passée quatrième en 2024 en ne représentant plus que 6% du mix énergétique pour ce début d’année.
Continuité de la baisse des émissions du secteur résidentiel-tertiaire
Avec notamment un épisode de douceur très marqué en février, les émissions liées à l’usage des bâtiments continuent de diminuer (-1,2 Mt CO2e, soit –15,6% observée pour ce même mois de février entre 2024 et 2023). Ce trimestre au global plus doux que l’an passé explique la forte baisse notamment estimée par le SDES pour les mois de février et mars de la consommation de fioul domestique ainsi que du gaz naturel. A noter qu’un des autres facteurs peut être la poursuite des comportements de sobriété en lien avec l’augmentation des prix de l’électricité à partir de février dans le cadre de la fin progressive du bouclier tarifaire, mis en place par le Gouvernement depuis 2021.
Baisse des émissions associées au transport en ce début d’année
Le secteur du transport voit ses émissions à la baisse pour ce premier trimestre avec à la fois une diminution pour :
- Le transport routier (-0,9 Mt CO2e, soit -3,1%) portée par la baisse observée des émissions associées aux véhicules diesel.
- Le transport aérien français (-0,03 Mt CO2e, soit -2,8%).
Alors qu’en moyenne le prix de gasoil[1] a diminué de 4% entre ce premier trimestre 2024 et celui de 2023, sa consommation a diminué de presque 6% (selon les données conjoncturelles du SDES).
Les émissions du transport aérien international (non pris en compte dans le total national), sont quant à elles à la hausse atteignant un niveau de 3,7 Mt CO2e (+0,3 Mt CO2e, soit +8,4%), niveau encore inférieur à celui observé avant la crise sanitaire (4,2 Mt CO2e au T1 2019).
Qu’est-ce que le baromètre des émissions mensuelles du Citepa ?
En complément de l’inventaire national d’émissions de gaz à effet de serre et polluants atmosphériques, qui fournit chaque année N le bilan des émissions de l’année N-2, et en complément des émissions annuelles pré-estimées pour l’année N-1, le Citepa propose des estimations mensuelles des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans l’année en cours. En cohérence avec les émissions annuelles, le baromètre permet de suivre l’évolution des émissions au fil des mois de l’année en cours, et de comparer les émissions mois à mois avec l’année précédente. Les chiffres de GES présentés dans ce communiqué sont relatifs à la France périmètre UE (Métropole et territoires d’Outre-mer inclus dans l’UE).
Il s’agit d’une estimation provisoire des émissions. L’évolution de certains sous-secteurs n’est pas pré-estimée (une partie des émissions de l’agriculture, des déchets ainsi que le puits de carbone). Les prochains résultats de l’inventaire annuel du Citepa permettront d’affiner ces résultats.
Pour en savoir plus : https://www.citepa.org/fr/barometre/
[1] Cf. données INSEE : https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/000442588
Emissions de gaz à effet de serre en France : Aperçu du premier trimestre de l’année 2024 avec le baromètre du Citepa
Résumé : les récentes données du Citepa concernant l’année civile 2023, montraient une baisse des émissions de GES de -5,8% par rapport à 2022, avec une réduction de tous les grands secteurs émetteurs. En complément de ces estimations annuelles, le Citepa met à jour, tous les trois mois, son baromètre des émissions mensuelles et propose une lecture de la tendance annuelle sur les douze derniers mois. Cette pré-estimation des émissions sur les trois premiers mois de l’année 2024 (janvier, février, mars) permet un premier aperçu de la situation de l’année civile en cours et actualise les tendances de fond sur les douze derniers mois (année mobile).
La France poursuit son objectif d’environ -5% en ce début 2024
Au total des secteurs, d’après le baromètre du Citepa, les émissions de gaz à effet de serre ont continué de baisser début 2024, de -5,3% par rapport au premier trimestre 2023 (hors puits de carbone) et de -5,5% sur douze mois glissants (année mobile). Tous les grands secteurs émetteurs continuent de participer à cette baisse et, comparativement au premier trimestre 2023, les réductions sectorielles du 1er trimestre 2024 sont : la production d’énergie (-2 Mt CO2e, soit -16,8%), les bâtiments (-1,6 Mt CO2e, soit -7,1%), l’industrie (-1,1 Mt CO2e, soit -5,6%), et les transports (- 0,9 Mt CO2e, soit -3%).
La production d’énergie : accélération de la production d’électricité décarbonée
Alors que la réduction observée au premier trimestre entre 2023 et 2022 était portée par le secteur de l’industrie (-2,5 Mt CO2e, soit -11,5%) c’est au niveau du secteur de l’énergie que la baisse est la plus importante pour ce début d’année 2024.
Selon les données provisoires de RTE, la production totale d’électricité pour ce premier trimestre est en hausse (+15,32 TWh par rapport au premier trimestre de 2023). Cette évolution n’a cependant pas eu d’impact sur le niveau d’émissions associé au secteur. En effet, une forte baisse des émissions liées à la production d’électricité est observée et est expliquée par le recours réduit à la production d’électricité via les centrales thermiques à base de combustibles fossiles (-4,27 TWh, soit -31% par rapport au début d’année 2023) en faveur du nucléaire (+11,36 TWh, soit +13%) ainsi que de l’hydraulique (+7,06 TWh, soit +48%).
La dynamique de sortie des énergies fossiles se poursuit, alors qu’elles représentaient la seconde source de production au premier trimestre 2022 (11% de la production totale), elle est passée quatrième en 2024 en ne représentant plus que 6% du mix énergétique pour ce début d’année.
Continuité de la baisse des émissions du secteur résidentiel-tertiaire
Avec notamment un épisode de douceur très marqué en février, les émissions liées à l’usage des bâtiments continuent de diminuer (-1,2 Mt CO2e, soit –15,6% observée pour ce même mois de février entre 2024 et 2023). Ce trimestre au global plus doux que l’an passé explique la forte baisse notamment estimée par le SDES pour les mois de février et mars de la consommation de fioul domestique ainsi que du gaz naturel. A noter qu’un des autres facteurs peut être la poursuite des comportements de sobriété en lien avec l’augmentation des prix de l’électricité à partir de février dans le cadre de la fin progressive du bouclier tarifaire, mis en place par le Gouvernement depuis 2021.
Baisse des émissions associées au transport en ce début d’année
Le secteur du transport voit ses émissions à la baisse pour ce premier trimestre avec à la fois une diminution pour :
- Le transport routier (-0,9 Mt CO2e, soit -3,1%) portée par la baisse observée des émissions associées aux véhicules diesel.
- Le transport aérien français (-0,03 Mt CO2e, soit -2,8%).
Alors qu’en moyenne le prix de gasoil[1] a diminué de 4% entre ce premier trimestre 2024 et celui de 2023, sa consommation a diminué de presque 6% (selon les données conjoncturelles du SDES).
Les émissions du transport aérien international (non pris en compte dans le total national), sont quant à elles à la hausse atteignant un niveau de 3,7 Mt CO2e (+0,3 Mt CO2e, soit +8,4%), niveau encore inférieur à celui observé avant la crise sanitaire (4,2 Mt CO2e au T1 2019).
Qu’est-ce que le baromètre des émissions mensuelles du Citepa ?
En complément de l’inventaire national d’émissions de gaz à effet de serre et polluants atmosphériques, qui fournit chaque année N le bilan des émissions de l’année N-2, et en complément des émissions annuelles pré-estimées pour l’année N-1, le Citepa propose des estimations mensuelles des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques dans l’année en cours. En cohérence avec les émissions annuelles, le baromètre permet de suivre l’évolution des émissions au fil des mois de l’année en cours, et de comparer les émissions mois à mois avec l’année précédente. Les chiffres de GES présentés dans ce communiqué sont relatifs à la France périmètre UE (Métropole et territoires d’Outre-mer inclus dans l’UE).
Il s’agit d’une estimation provisoire des émissions. L’évolution de certains sous-secteurs n’est pas pré-estimée (une partie des émissions de l’agriculture, des déchets ainsi que le puits de carbone). Les prochains résultats de l’inventaire annuel du Citepa permettront d’affiner ces résultats.
Pour en savoir plus : https://www.citepa.org/fr/barometre/
[1] Cf. données INSEE : https://www.insee.fr/fr/statistiques/serie/000442588
Reprise des négociations climat : absence quasi-totale de progrès sur les sujets clés sur fond de profondes divergences entre pays du Nord et pays du Sud
Après deux semaines de négociations intenses (3-13 juin 2024), les 60èmes sessions des deux organes subsidiaires de la CCNUCC (SBI-60 [mise en œuvre] et SBSTA-60 [conseil scientifique et technologique]), connues sous le nom SB-60, se sont terminées à 1h06 samedi 14 juin 2024. Ces sessions intermédiaires ont marqué la reprise des négociations climat formelles dans le cadre de la CCNUCC pour la première fois depuis la Conférence de Dubaï sur le Climat, qui incluait la COP-28 (du 30 nov. au 12 déc. 2023). Elles sont généralement l’occasion d’avancer sur les points techniques des négociations entre deux COP et permettent de faciliter l’avancée des négociations politiques lors des COP.
Lire notre article sur les résultats de la Conférence de Dubaï « COP-28 : malgré un premier pas vers la sortie des combustibles fossiles et l’adoption des règles sur le fonds pertes et préjudices, le bilan global est mitigé », publié le 14 février 2024.
Rappel de l’articulation des différents organes de la CCNUCC
Les organes subsidiaires SBSTA et SBI sont des organes techniques mis à disposition de la COP, de la CMP et de la CMA.
Au total, les sessions SB-60 ont réuni en présentiel 8 606 participants, dont 3 444 délégués gouvernementaux (équipes de négociation nationales) des 197 Parties à la Convention Climat (CCNUCC), 2 467 représentants d’ONG ayant le statut « d’observateur », ainsi que 225 journalistes (source : IISD, 17 juin 2024).
Outre les sessions plénières et les réunions des deux organes subsidiaires SBI et SBSTA dans le cadre des négociations formelles, 30 réunions et ateliers dits mandatés (car mandatés par des décisions de la COP-28, celles de la CMP-18 ou celles de la CMA-5, adoptées lors de la Conférence de Dubaï sur le Climat), ont également eu lieu pendant ces deux semaines, voire pendant la période dite de « pré-session » (du 27 mai au 2 juin 2024).
Que retenir de ces sessions SB-60 ?
Le Citepa vous propose un tour d’horizon des principaux résultats par sujet de négociation clé :
- financement climat,
- bilan mondial (Global Stocktake),
- pertes et préjudices,
- adaptation,
- atténuation,
- mécanismes de marché,
- transition juste.
Financement climat
Le sujet très controversé du financement des actions climat des pays en développement par les pays industrialisés constitue le « nerf de la guerre » des négociations au sein de la CCNUCC et surtout une source fréquente de vives tensions diplomatiques et de blocage lors de celles-ci depuis de nombreuses années. Alors que l’objectif des 100 Md$ par an à fournir aux pays en développement par les pays industrialisés avait pour échéance initiale 2020, il n’a été atteint qu’en 2022, soit avec deux ans de retard. Cela a eu pour conséquence d’entamer la confiance des pays en développement vis-à-vis des pays industrialisés et de freiner les progrès dans les autres axes de négociation (notamment l’atténuation). Le financement climat joue également un rôle crucial dans le renforcement de l’ambition des pays en développement.
A Bonn lors des sessions SB-60, il a été, comme à l’accoutumé, le sujet dominant des négociations formelles en anticipation de la COP-29. En effet, celle-ci a d’ores-et-déjà été qualifiée de « COP du financement climat » car c’est à la COP-29 que les Parties doivent se mettre d’accord sur un nouvel objectif collectif quantifié pour le financement climat post-2025.
Evènements mandatés
- SBI 3 juin 2024: 10e dialogue technique entre les experts (Technical Expert Dialogue ou TED 10) sur le nouvel objectif collectif quantifié en matière de financement climat (New Collective Quantified Goal ou NCQG) ( décision 9/CMA.3 § 5).
Voir programme.
- SBI 5, 8 et 10 juin 2024 : 2e réunion dans le cadre du programme ad hoc sur le nouvel objectif quantifié collectif en matière de financement climat.
Voir programme du 5 juin, du 8 juin et du 10 juin.
- SBI/SBSTA 12-13 juin 2024: 3e atelier dans le cadre du dialogue de Charm el-Cheikh entre les Parties pour échanger les points de vue et mieux comprendre le champ d’application de l’article 2.1(c) de l’Accord de Paris (voir 3e encadré de cette section, ci-dessous).
Voir programme et message des co-Présidents de ce dialogue (du 9 mai 2024).
Résultats
Nouvel objectif collectif chiffré post-2025 (New collective quantified goal [NCQG]
A Bonn, les discussions sur ce volet des négociations ont été axées sur la 2e réunion du programme de travail ad hoc (voir encadré ci-dessus). Ces travaux sont destinés à produire un texte constituant la base de négociation lors de la CMA-6 à Bakou (Azerbaïdjan). En amont de Bonn, trois groupes de Parties avaient soumis leurs contributions écrites présentant leurs positions – souvent très divergentes – sur ce sujet (pays arabes, alliance des petits Etats insulaires, pays les moins avancés). S’appuyant sur ces contributions et les discussions menées lors de la première réunion du groupe de travail ad hoc (23-26 avril, Cartagena, Colombie), ses deux co-Présidents (Zaheer Fakir, Emirats arabes unis, et Fiona Gilbert, Australie) ont élaboré un document de synthèse pour alimenter les discussions de cette 2e réunion (synthèse des contributions ou input paper du 24 mai 2024 (63 p.). Ce document visait à représenter toute la diversité des points de vue des Parties. Au cours de la première semaine, les Parties ont demandé aux deux co-Présidents de resserrer et rationaliser le texte, ce qui a donné lieu, le 7 juin 2024, à une première mise à jour de ce document (45 p.). Suite à de nouvelles contributions, une 2e mise à jour a été diffusée le 9 juin 2024 (35 p.). Malgré la réduction de son volume, cette 2e mise à jour restait une synthèse de l’ensemble des propositions soumises, parmi lesquelles plusieurs qui étaient en flagrante contradiction les unes avec les autres. Lors de la dernière session de négociations sur ce sujet, ce document a été qualifié de « déséquilibré » par certains négociateurs (source : Climate Home News, 11 juin 2024).
Les discussions ont fait ressortir de profondes divergences d’opinion entre les Parties, et surtout entre pays en développement et pays développés, sur plusieurs questions clés. Ces divergences d’opinion entre ces deux catégories de pays, où chacune campait fermement sur ses positions, ont entravé toute possibilité de progrès.
Les principales pierres d’achoppement entre les Parties
Le montant de l’objectif de soutien financier à fournir aux pays en développement par les pays développés
Plusieurs évaluations des besoins réels en termes de financement climat pour les pays en développement (voir encadré ci-dessous) chiffrent le montant nécessaire à 1 000 Md$ par an d’ici 2030. Les contributions soumises en amont de Bonn proposaient les montants suivants :
- l’Inde : 1 000 Md$/an essentiellement sous forme de subventions et de financement à des taux préférentiels (cf. contribution de l’Inde soumise à la CCNUCC le 13 février 2024 , en amont de la 1ère réunion du programme de travail ad hoc),
- le groupe de négociation des pays arabes (« groupe arabe ») : 441 Md$/an en subventions publiques dans le cadre d’un montant global de 1 100 Md$/an à fournir sur 2025-2029 par les pays industrialisés, le solde devant provenir d’autres sources (prêts à des taux préférentiels,…) (cf. contribution du groupe arabe soumise à la CCNUCC le 6 mai 2024),
- le groupe de négociation des pays en développement ayant une vision similaire (Like-Minded Developing Countries ou LMDC) : 1 000 Md$/an (contribution du groupe LMDC soumise à la CCNUCC en amont de la 2e réunion du programme de travail ad hoc).
Pour une explication des différents groupes de négociation, se reporter à l’annexe 3 de notre dossier de fond sur la COP-27 (p.65).
Certaines de ces Parties appellent les pays développés à honorer le montant non fourni en 2020 (soit 16,7 Md$) et en 2021 (soit 10,4 Md$) par rapport à l’objectif des 100 Md$/an (à savoir les années où celui-ci n’a pas été respecté. Total fourni en 2020 : 83,3 Md$ ; total fourni en 2021 : 89,6 Md$ – lire notre article) .
A l’autre extrême, les pays développés ont refusé jusque-là de parler « chiffres », c’est-à-dire de quantifier le futur objectif sous forme de proposition chiffrée (appelée en anglais le « quantum » ou montant), soulignant le fait qu’il soit trop tôt encore, alors qu’en réalité, il leur reste désormais à peine cinq mois pour fixer le montant. Ils insistent sur l’importance de se mettre d’accord sur les éléments structurels qui sous-tendent l’objectif avant de fixer le montant lui-même. p
Qui va contribuer au financement à fournir aux pays en développement par les pays développés ?
Sur cette question, les discussions ont fait ressortir de profondes divergences entre pays en développement et pays développés. Les pays développés souhaitent également élargir la base des pays donateurs pour inclure les pays à revenu élevé (Chine, Corée du Sud, pays du Golfe,…), ce que refusent catégoriquement le groupe G77+Chine. Ces Parties campent fermement sur leur position : les pays développés se sont engagés au titre de l’Accord de Paris (article 9.1) à fournir un financement climat aux pays en développement. Elles insistent également sur l’importance d’intégrer dans le nouvel objectif le principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives (voir encadré ci-après), ce que refusent les pays développés.
Quelles sources de financement ?
Alors que les pays en développement insistent sur l’importance d’axer les négociations uniquement sur le financement public, les pays développés souhaitent élargir le flux de financement pour inclure le financement du secteur public et celui issu de la réforme des banques multilatérales de développement, en s’appuyant sur une « mosaïque » de solutions en termes de sources de financement, pour reprendre le terme utilisé par l’ancien vice-Président de la Commission européenne, Frans Timmermans lors de la COP-27.
Quel volet d’action climat financer ?
L’objectif doit-il viser l’adaptation et l’atténuation uniquement (conformément à l’article 9.1 de l’Accord de Paris) ou faut-il définir un sous-objectif pour les pertes et préjudices ? Les discussions à Bonn ont, là encore, fait ressortir de profondes divergences de position entre les pays en développement et les pays industrialisés.
D’un côté, les pays en développement ont insisté sur le fait que l’objectif devrait prévoir une « fenêtre » séparée du montant, spécifiquement consacrée au financement climat pour les pertes et préjudices et ce, en plus des deux « fenêtres » pour l’atténuation et l’adaptation. Puisque le financement fourni par les pays industrialisés au titre du fonds pertes et préjudices (à ce jour : 661,9 M$ issus de 18 pays et de l’UE dans son ensemble, source : NRDC, juin 2024) est bien en deçà des besoins réels, les pays en développement exigent un sous-objectif formel pour le financement climat consacré aux pertes et préjudices.
De l’autre côté, les pays industrialisés soulignent que le financement des pertes et préjudices ne relève pas du mandat du nouvel objectif collectif chiffré post-2025.
Autres questions qui ont donné lieu à des divergences de position
- quelles catégories de pays seront bénéficiaires du financement climat au titre du nouvel objectif ? (Les pays en développement dans leur ensemble ? Quels critères d’éligibilité?
- quelle échéance fixer pour atteindre l’objectif (2030 ?), c’est-à-dire sur quelle période le nouvel objectif s’appliquera-t-il ? 5 ans ? 10 ans ?
- qualité du financement: le soutien financier serait-il apporté sous forme de dons (subventions) plutôt que des prêts ? Quelle sera la part de ces deux types de financement ? Les pays en développement et les ONG insistent sur l’importance de privilégier la première option pour ne pas alourdir davantage le fardeau de la dette des pays bénéficiaires. Ainsi, les pays les moins avancés (PMA) et l’alliance des petits Etats insulaires (AOSIS) insistent sur le fait que les ressources financières fournies et mobilisées pour l’adaptation et les pertes et préjudices doivent être essentiellement publiques et basées sur des subventions. Cette exigence figure dans une contribution conjointe soumise par les PMA et l’AOSIS le 11 juin 2024 au Secrétariat de la CCNUCC ;
- comment définir le financement climat : aucune définition précise officielle et formellement reconnue de ce concept n’existe. Aujourd’hui, les pays développés utilisent des métriques différentes pour mesurer le montant de financement qu’ils fournissent, ce qui a suscité une grande méfiance de la part des pays en développement, et notamment l’Inde qui a critiqué à plusieurs reprises la méthodologie appliquée par l’OCDE pour établir son bilan annuel.
Malgré toutes ces profondes divergences, les opinions des Parties ont pu se rapprocher sur certaines questions, comme par exemple, le besoin d’améliorer l’accès des pays en développement au financement et de mettre à jour le cadre de transparence renforcée pour réaliser le rapportage sur le financement climat fourni et reçu (modalités de suivi de ce financement).
Prochaines étapes
Les deux co-Présidents du programme de travail ont invité les Parties à soumettre leurs points de vue consolidés et actualisés sur le nouvel objectif. Ils ont également convenu de :
- produire un compte rendu de la 2e réunion du programme de travail ad hoc, avec des informations sur les progrès réalisés ;
- lancer les préparatifs en vue de sa 3e réunion (octobre 2024) ;
- publier des questions d’orientation pour la remise des contributions des Parties en amont de cette 3e réunion ; et
- préparer une nouvelle synthèse des contributions (input paper) pour la 3e réunion sur la base des nouvelles contributions qui seront soumises suite à la demande des deux co-Présidents (voir plus haut).
Une réunion des chefs de délégation est prévue en juillet 2024. La 11e réunion du dialogue technique entre les experts (TED11) se tiendra en octobre 2024 avant la 3e réunion du programme de travail ad hoc. Un dialogue ministériel de haut niveau sur le nouvel objectif se tiendra également en octobre 2024 afin d’ouvrir la voie à un résultat concret et concluant lors de la CMA-6 à Bakou.
En parallèle, les chefs de délégation doivent maintenant redoubler d’efforts pour finaliser des options claires, précises et viables, ainsi qu’un cadre concret d’un projet de décision avant la CMA-6 et la COP-29 pour examen et adoption à Bakou.
Article 2.1(c)
Les délégués ont abordé le sujet de l’article 2.1(c) à Bonn au cours d’un dialogue spécifique.
Le 3e atelier dans le cadre du dialogue sur l’article 2.1(c) a eu lieu les 12-13 juin 2024. Il a été axé sur les investissements pour l’adaptation et la compatibilité des flux financiers avec une trajectoire de développement résiliente au climat. Les discussions ont fait ressortir les aspects suivants :
- les approches intégrant les risques climatiques ne devraient pas accroître le coût du capital pour les pays jugés à haut risque ;
- les banques centrales ont un rôle à jouer dans la promotion de l’intégration des aspects environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la prise de décision financière ;
- le recours à des incitations directes dans le cadre de la participation ESG des acteurs corporatifs, par exemple pour soutenir l’agroforesterie et les cultures intercalaires ;
- la non-mise en œuvre de cadres politiques tels que la Déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres, adoptée le 2 novembre 2021 lors de la COP-26 à Glasgow (lire notre dossier de fond sur la COP-26, p.17). ;
- le réinvestissement des recettes de la fiscalité carbone en soutien à la transition de l’industrie et pour minimiser les remises en cause de la politique climat ;
- le recours au financement mixte, notamment pour mobiliser des financements privés.
Puisque les pays développés n’ont pas encore proposé de chiffres concrets pour le nouvel objectif financement climat post-2025 et, plus précisément, en l’absence de propositions chiffrées en matière de financement public, les pays en développement sont réticents à s’engager sur d’autres aspects de l’objectif, en particulier sur l’alignement des flux financiers au titre de l’article 2.1(c).
Bilan mondial (Global Stocktake ou GST)
Pour des éléments de contexte détaillés sur le sujet Bilan mondial (GST), lire notre article « Guide du Citepa des enjeux de la COP-28 : l’essentiel pour comprendre le contexte des négociations », publié le 28 nov. 2023 et notre article sur les résultats de la COP-28 publié le 14 février 2024
- SBI/SBSTA 6-7 juin 2024 : premier dialogue annuel sur le GST.
Voir programme et note de cadrage (concept note, mai 2024).
Résultats
Les négociations sur les suites à donner au bilan mondial ont été menées dans le cadre de consultations informelles sur deux aspects : (1) les éléments procéduraux et logistiques du processus du GST et (2) les modalités du dialogue annuel sur le GST.
Eléments procéduraux et logistiques du processus GST
L’objectif de Bonn était de débattre de la question de savoir comment affiner les éléments procéduraux et logistiques du processus du GST sur la base de l’expérience acquise dans le cadre du premier GST, en vue d’adopter une décision à Bakou. Les consultations informelles ont été co-animées par Patrick Spicer (Canada) et Thureya Al Ali (Emirats arabes unis). Les principaux points de discussion ont porté sur les points suivants :
- la question de savoir s’il faut aligner la publication du 7e cycle d’évaluation du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) sur le deuxième GST (2028) afin d’inclure les meilleures connaissances scientifiques disponibles ;
- l’amélioration de la transition entre les phases d’évaluation technique et l’examen des résultats du GST (phase politique) ; et
- la composition du Comité de haut niveau des GST à venir (le 2e GEST est prévu en 2028).
Etant donné les objections du groupe de négociation LMDC et du groupe arabe, les Parties n’ont pas pu se mettre d’accord pour inviter formellement le Giec à réfléchir à la meilleure façon d’aligner ses travaux sur le cycle du GST, et surtout sur le 2e GST.
Les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur l’ensemble du sujet « éléments procéduraux et logistiques du processus GST ».
Dans leurs conclusions conjointes, le SBSTA et le SBI « prennent note » de la note informelle rédigée par les deux co-facilitateurs, indiquant qu’elle ne fait pas l’objet d’un consensus entre les Parties. Celles-ci reprendront le sujet à Bakou en novembre 2024 lors des sessions SB-61 en vue d’aboutir à un projet de décision pour adoption par la CMA-6 à Bakou.
Voir les conclusions conjointes SBSTA/SBI et la note informelle.
Modalités du dialogue annuel sur le GST
L’objectif de Bonn était de mener des discussions sur les modalités (éléments pratiques) du premier dialogue annuel sur le GST (cf. décision 1/CMA.5, paragraphes 97 et 98) pour le rendre opérationnel lors de la CMA-6 à Bakou et ce, en vue de mettre en œuvre concrètement les résultats du premier GST. Ce sous-volet des négociations est très important car les résultats de la phase politique du 1er GST doivent éclairer les travaux d’élaboration de la prochaine série des NDC (qui devront couvrir la période jusqu’en 2035), à soumettre par les Parties en 2025.
Les consultations informelles ont été co-animées par Ricardo Marshall (Barbade) et Patrick Spicer (Canada).
Sur ce volet, une des pommes de discorde majeures entre les Parties était de savoir comment donner suite à la décision 1/CMA.5 et aux engagements des Parties qu’elle énonce, surtout au paragraphe 28. Les discussions ont fait ressortir des désaccords entre les Parties, et surtout entre pays développés et pays en développement. Les premiers (UE, Norvège, Etats-Unis, Japon en tête), ainsi que le groupe des petits Etat insulaires (AOSIS), soutenaient que ces discussions devraient être centrées sur tous les aspects des résultats du bilan mondial, dont les efforts à consentir pour réduire les émissions de GES. En revanche, le groupe de négociation LMDC, les pays d’Amérique latine (groupe AILAC), et les pays les moins avancés (surtout les pays africains) souhaitaient qu’elles soient axées sur le financement climat, affirmant qu’il leur serait impossible de réduire leurs émissions sans soutien financier de la part des pays développés pour les aider à assurer leur transition énergétique. Ces pays font remarquer que le paragraphe 97 de la décision 1/CMA.5 qui établit le dialogue sur la mise en oeuvre des résultats du GST (voir encadré plus haut) est placé dans la section C.1 consacrée au financement.
Les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur ce sujet. Dans leurs conclusions conjointes, le SBSTA et le SBI « prennent note » de la note informelle rédigée par les deux co-facilitateurs, indiquant qu’elle ne fait pas l’objet d’un consensus entre les Parties. Celles-ci reprendront le sujet à Bakou en novembre 2024 lors des sessions SB-61 en vue d’aboutir à un projet de décision pour adoption par la CMA-6 à Bakou.
Voir les conclusions conjointes SBSTA/SBI et la note informelle.
Pertes et préjudices
- SBI 6-7 juin 2024: 3e et dernière réunion du dialogue de Glasgow sur les pertes et préjudices (réunion dite GD3). Mis en place par la décision 1/CMA-3 (adoptée à Glasgow), ce dialogue est mené entre les Parties pour discuter des modalités de financement des activités pour éviter, minimiser et traiter les pertes et préjudices liés au changement climatique. Le dialogue de Glasgow n’est pas investi de pouvoirs de prise de décision. Sa première réunion s’était tenue à Bonn, les 7, 8 et 11 juin 2022 dans le cadre du SBI-56, sa 2e réunion avait eu lieu du 8 au 10 juin 2023 lors de la session SBI-58. Il doit terminer ses travaux lors de sa 3e réunion dans le cadre de la session SBI-60.
Voir programme.
Pour en savoir plus sur le sujet pertes et préjudices, lire notre article « Guide du Citepa des enjeux de la COP-28 : l’essentiel pour comprendre le contexte des négociations », publié le 28 nov. 2023 et notre article sur les résultats de la COP-28 publié le 14 février 2024
Résultats
Les modalités de fonctionnement du fonds pertes et préjudices (dont le principe avait été acté lors de la CMA-4 à Charm el-Cheikh, novembre 2022) ayant été établies via les décisions 1/CP.28 et 5/CMA.5 adoptées respectivement lors de la COP-28 et de la CMA-5 à Dubaï (décembre 2023), les discussions à Bonn ont été moins axées sur le sujet pertes et préjudices. Une plus grande attention a été accordée au sujet brûlant du nouvel objectif collectif chiffré post-2025 pour le financement climat.
Le troisième dialogue de Glasgow sur les pertes et préjudices, qui s’est tenu les 6-7 juin 2024, a permis d’aborder les modalités de coordination du fonds pertes et préjudices, d’évaluer les progrès accomplis et de formuler de nouvelles recommandations.
A noter que pendant les sessions SB-60 à Bonn, le Conseil des directeurs généraux (Board of Executive Directors) de la Banque mondiale a annoncé le 10 juin 2024 qu’il a approuvé le rôle de celle-ci qui lui avait été confié par la CMA-5 à Dubaï le 30 novembre 2023 (cf. décision 5/CMA.5, paragraphes 20 et 21). Ce rôle consiste à héberger le fonds pertes et préjudices et à être son administrateur et ce, pendant une période provisoire de quatre ans.
Le Conseil du fonds pertes et préjudices et la Banque mondiale
Le Conseil d’administration (Board) du fonds pertes et préjudices est indépendant de la Banque mondiale et dispose de sa propre structure de gouvernance. Il déterminera les principales priorités, notamment les décisions de financement, les critères d’éligibilité et les politiques de gestion des risques. Le fonds devrait être opérationnel au cours des prochains mois. En tant qu’administrateur, la Banque mondiale ne jouera aucun rôle dans la collecte de fonds, les décisions d’allocation de fonds ou l’identification, la préparation, l’évaluation, la mise en œuvre ou le suivi des projets financés par le fonds. Les entités chargées de la mise en œuvre et les bénéficiaires directs resteront seuls responsables de l’utilisation finale des fonds, notamment en ce qui concerne les aspects fiduciaires, environnementaux et sociaux, vis-à-vis du conseil d’administration du fonds (source : Banque mondiale, 10 juin 2024).
Adaptation
Résultats
Financement de l’adaptation
A Bonn, dans le cadre des négociations sur le sujet adaptation, la question du financement de celle-ci était omniprésente et a engendré de vives tensions entre pays en développement et pays industrialisés. Comme à Dubaï, le groupe des 77+Chine (134 pays en développement et pays émergents) a insisté à Bonn sur la nécessité d’intégrer un volet financement de l’adaptation dans l’objectif mondial en matière d’adaptation (Global Goal on Adaptation ou GGA)
Un des axes majeurs des négociations sur l’adaptation à Bonn portait sur le programme de travail EAU-Belém sur les indicateurs (2024-2026) (voir encadré ci-dessus), et plus spécifiquement sur ses modalités de mise en œuvre (plan global, calendrier, participants,…). Ces éléments de base doivent être approuvés par la CMA avant que les Parties ne puissent entamer les travaux techniques dans le cadre de ce programme.
Les questions qui ont donné lieu à des divergences de position
- le financement de l’adaptation: les pays en développement exigent qu’il constitue un des indicateurs clés. Le Président du groupe 77+Chine, Adonia Ayebare (Ouganda) était formel : « sans financement, rien ne peut se passer du point de vue d’un pays en développement. C’est dans l’Accord de Paris. Nous nous sommes mis d’accord sur cela. Nous devrions le faire » (source : Carbon Brief, 14 juin 2024). Les pays en développement insistent sur le fait que traiter l’adaptation est indissociable du besoin urgent d’investissements pour renforcer l’adaptation. Selon le dernier rapport du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) qui évalue l’écart entre les efforts consentis par les Etats pour s’adapter au dérèglement climatique (dont les flux de financement fournis par les pays industrialisés aux pays en développement) et les besoins réels nécessaires de ces derniers pour y faire face, les besoins de financement pour l’adaptation des pays en développement sont 10 à 18 fois plus importants que les flux de financement public international en ce sens en 2021 (source : PNUE, Adaptation Gap Report, 2 novembre 2023).
- quel organisme doit être chargé de recenser et décrire les indicateurs existants ? Les pays industrialisés ont indiqué leur préférence pour le Comité d’adaptation au sein de la CCNUCC mais les pays du groupe G77+Chine souhaitaient voir la mise en place d’un nouveau groupe d’experts mandaté pour le faire. Dans le projet de conclusions issu de Bonn, les Parties sont parvenus à un compromis : la note en bas de page n°4 indique que les négociateurs examineront les deux options lors de la prochaine session.
In fine, les Parties ont pu se mettre d’accord pour :
- lancer des travaux de fond visant à définir des indicateurs efficaces, transparents et fondés sur les connaissances scientifiques pour chacun des sept objectifs qualitatifs thématiques fixés par la décision 2/CMA.5 (paragraphe 9) au titre du cadre des Emirats arabes unis pour la résilience climatique mondiale ;
- définir les prochaines étapes nécessaires dans ce cadre pour les Parties et les experts, y compris la manière dont ces indicateurs seront décidés, ainsi que sur les futurs travaux techniques à effectuer.
Voir projet de conclusions conjointes SBSTA/SBI sur le GGA adopté à Bonn (en date du 13 juin 2024).
Les plans nationaux d’adaptation
Le 2e axe des discussions à Bonn sur le volet adaptation a porté sur les plans nationaux d’adaptation. Dans le cadre de l’objectif mondial en matière d’adaptation, une couverture plus exhaustive de ces plans est visée d’ici 2030. La question de financement est cruciale pour les pays en développement : ceux-ci soulignent qu’ils ont besoin d’un soutien financier non seulement pour mettre en œuvre leur NAP, mais aussi, et surtout, pour les élaborer.
Les plans nationaux d’adaptation
Le processus pour élaborer les plans nationaux d’adaptation (National Adaptation Plans ou NAP) a été établi en vertu du cadre de Cancún pour l’adaptation (Cancún Adaptation Framework ou CAF) qui fait partie des Accords de Cancún adoptés lors de la COP-16 (2010). Il permet aux Parties de formuler et de mettre en œuvre des NAP comme moyen d’identifier les besoins d’adaptation à moyen et long terme et de développer et mettre en œuvre des stratégies et des programmes pour répondre à ces besoins. Il s’agit d’un processus continu, progressif et itératif qui suit une approche axée sur les pays, sensible au genre, participative et totalement transparente. Afin d’améliorer la disponibilité du soutien à l’adaptation, la COP de 2015 a demandé au Fonds vert pour le climat d’accélérer le soutien à la formulation et à la mise en œuvre des plans nationaux d’adaptation.
Au 27 juin 2024, 57 Parties (sur les 198 Parties à la CCNUCC, soit 29%) avaient soumis leur NAP (voir liste des NAP soumis).
Une évaluation du processus d’élaboration et de mise en œuvre des NAP est envisagée mais les discussions sur les modalités de cette évaluation avancent lentement.
Les discussions ont fait ressortir des divergences d’opinion sur le rôle du financement du secteur privé dans l’adaptation et les retards importants accusés par les pays en développement pour recevoir un soutien financier pour élaborer leur NAP. Les co-facilitateurs des négociations ont rédigé une note informelle en guise d’avant-projet de décision de la CMA-6. A noter qu’en termes de statut, une note informelle des SB a moins de poids que des projets de conclusions des SB en tant qu’étape clé vers l’élaboration d’un projet de décision.
Le sujet sera repris lors de la session SBI-61 à Bakou (parallèlement à la COP-29, 11-22 nov. 2024).
Voir note informelle du SBI sur les NAP adoptée à Bonn (en date du 12 juin 2024 @17h30).
Atténuation
- SBI/SBSTA 27-29 mai 2024: 3e dialogue global dans le cadre du programme de travail sur l’ambition et la mise en œuvre en matière d’atténuation de Charm el Cheikh (Sharm el-Sheikh Mitigation Ambition and Implementation Programme).
Voir programme et note d’information du 21 mai 2024.
Résultats
A Bonn, les Parties ont repris les négociations sur ce programme (voir encadré ci-dessous) dans le cadre de consultations informelles co-animées par Kay Harrison (Nouvelle-Zélande) et Carlos Fuller (Belize).
Malgré les négociations intenses, les Parties ne sont pas parvenues à un consensus sur un projet de conclusions en raison des divergences sur la question de savoir s’il fallait viser un résultat procédural (sur la forme) ou un résultat sur le fond. Comme lors de la CMA-5, à Dubaï en décembre 2023, les divergences entre Parties portaient en grande partie sur le mandat du programme de travail, et notamment à l’égard des résultats du bilan mondial (Global stocktake ou GST) obtenus au terme de sa phase politique qui s’est déroulée à Dubaï.
D’un côté, plusieurs groupes de négociation (AOSIS, pays de l’Amérique latine [AILAC], UE,) ou Parties individuelles (Japon,…) se sont prononcés pour un projet de décision qui refléterait et s’appuierait sur les résultats du GST. En effet, aux termes du paragraphe 186 de la décision 1/CMA.5 sur le GST, « la CMA invite les responsables des programmes de travail et des organes constitués relevant de l’Accord de Paris à prendre en considération les résultats pertinents du GST dans la planification de leurs futurs travaux, dans le respect de leurs mandats ».
Pour une explication des différents groupes de négociation, se reporter à l’annexe 3 de notre dossier de fond sur la COP-27 (p.65).
De l’autre côté, le groupe de négociation des pays en développement ayant une vision similaire (Like-Minded Developing Countries ou LMDC), Chine en tête, et le groupe de négociation des pays arabes (le groupe arabe), Arabie saoudite en tête, ont refusé de participer constructivement aux discussions sur le volet MWP. Ainsi, ils ont soutenu que le paragraphe 186 de la décision 1/CMA.5 ne s’applique pas au MWP et se sont opposés à ce que les résultats du GST (et notamment toute mention de la nécessité de s’éloigner des combustibles fossiles [« transitioning away from fossil fuels »[1]], cf. décision 1/CMA.5, paragraphe 28d) soient repris dans le projet de décision à élaborer pour examen lors de la CMA-6 à Bakou.
Ce sujet à l’ordre du jour (agenda item) des travaux des SB et de la CMA est le seul qui soit explicitement axé sur l’atténuation, d’où l’importance de débloquer et d’accélérer les négociations, étant donné le besoin urgent de réduire les émissions mondiales de GES. Selon Fernanda Carvalho, chargée de politique climat et énergie mondiale auprès du WWF International, « il faut accélérer radicalement les travaux sur le MWP et sur les discussions sur les contributions nationales (NDC)… Les discussions sur l’atténuation à Bonn – ou manque de discussions – sont complétement déconnectées d’une réalité triste : la fenêtre de tir pour respecter l’objectif +1,5°C se ferme rapidement… » (propos rapportés par Carbon Brief, 13 juin 2024).
Le groupe de négociation LMDC, le groupe africain et le groupe arabe ont souligné que le MWP ne devrait pas imposer d’objectifs aux pays, soutenant au contraire que l’objectif du programme était de faciliter les dialogues. De nouveaux objectifs via l’intégration de messages clés iraient au-delà du mandat du MWP et imposeraient des charges supplémentaires aux pays en développement.
Ces divergences de position – entre les Parties en faveur d’un projet de texte portant sur le fond du sujet, assortis d’objectifs concrets, et celles préférant un projet de texte de nature strictement procédurale – ont continué pendant toute la durée des négociations sur ce volet.
Le dernier jour des négociations sur ce volet, le 12 juin 2024, les co-facilitateurs ont présenté un texte sous forme de projet de conclusions, ainsi qu’une note informelle (les deux documents datent du 11 juin 2024). Le groupe LMDC et le groupe arabe ont refusé de les examiner, soutenant que les co-facilitateurs n’avaient pas reçu de mandat pour les rédiger.
En raison de ces profondes divergences, les Parties n’ont pas pu se mettre d’accord sur un projet de conclusions. Les négociations reprendront donc lors des sessions SB-61 à Bakou. A noter que si ces documents avaient été adoptés par les Parties à Bonn, cela aurait constitué un point de départ concret pour de plus amples discussions à Bakou.
Article 6
- SBSTA 4 et 6 juin 2024 : atelier sur l’article 6.8 qui se tient parallèlement à la réunion du Comité de Glasgow sur les approches non fondées sur le marché.
Voir programme et note de cadrage (concept note, (non datée).
Outre cet évènement mandaté, les Parties ont repris les négociations sur la finalisation des détails techniques des règles de mise en œuvre de l’article 6.2 et de l’article 6.4, restés en suspens à Dubaï en décembre 2023 faute de consensus entre elles sur plusieurs points cruciaux pour leur bon fonctionnement :
- article 6.2 : intégrité environnementale, protection des droits humains, transparence, etc. ;
- article 6.4 : élaboration et évaluation de méthodologies, activités liées à l’absorption du CO2.
Résultats
Lors des consultations informelles, les co-facilitateurs Maria Al-Jishi (Arabie Saoudite) et Peer Stiansen (Norvège) ont présenté une note informelle rédigée par le Président du SBSTA, Harry Vreuls, en amont de sessions SB-60 (en date du 29 mai 2024). Cette note reflète les différents points de vue exprimés par les Parties dans les négociations du SBSTA-59 à Dubaï sur les sous-volets article 6.2 et article 6.4. Ils ont expliqué que le mandat du groupe était d’élaborer un projet de texte de décision pour chacun de ces deux sous-volets, à soumettre à la CMA-6 à Bakou, et de se concentrer sur les « questions cruciales », y compris les autorisations, les registres et le format électronique.
La Présidence azerbaïdjanaise a indiqué très clairement qu’une des priorités de la COP-29 (et de la CMA-6) serait de régler une fois pour toutes les questions techniques des articles 6.2 et 6.4. Dans son discours sur la vision et la stratégie de la Présidence azerbaïdjanaise de la COP-29 pour Bakou, le négociateur en chef de la COP-29, Yalchin-Rafiyev, s’est fixé comme objectif de la Présidence de rendre l’article 6 pleinement opérationnel à Bakou.
Malgré cette ambition forte, les négociations techniques ont progressé lentement et ont globalement débouché sur peu de résultats concrets. Des avancées significatives ont néanmoins été enregistrées sur deux questions spécifiques :
- les activités qui évitent des émissions: la question est de savoir si de telles activités peuvent compter pour générer des crédits d’émission pour échange au titre de l’article 6.2 et de l’article 6.4 (par exemple, si une entité n’entreprend pas une activité émettrice de GES (telle que l’extraction de combustibles fossiles), elle pourrait se voir octroyer des crédits d’émission. Malgré l’opposition des Philippines, dans leur ensemble, les Parties s’accordent à reconnaître que cette option ne devrait pas être retenue. A Bonn, après des discussions intenses, les Parties se sont mises d’accord sur le fait que ces activités ne doivent pas générer des crédits au titre des articles 6.2 et 6.4. Le SBSTA a décidé de poursuivre l’examen de cette question à sa 68e session (2028). Le SBSTA a noté qu’en l’absence de nouvelles recommandations de la part de la CMA, les recommandations actuelles s’appliquent, sachant que l’option de compter les émissions évitées n’est pas incluse dans les recommandations actuelles (cf. paragraphe 6 du projet de conclusions adopté à Bonn sur ce sous-volet, en date du 13 juin 2024). Par conséquent, cette question a été supprimée de l’ordre du jour en amont de Bakou, renvoyant ainsi un signal clair aux marchés ;
- la question de la confidentialité des informations rapportées par les Parties après les échanges d’ITMO sans qu’il n’y ait besoin pour celles-ci de justifier leur décision. Les négociations à Bonn ont pu avancer sur cette question. Ainsi, le SBSTA a demandé au Secrétariat de la CCNUCC d’élaborer, de publier et de mettre en œuvre les procédures administratives nécessaires, y compris un code de conduite spécifique pour les équipes d’experts techniques de l’article 6, pour le traitement et l’examen des informations identifiées comme confidentielles par les Parties participantes. A noter toutefois que ce code de conduite devra être approuvé par l’ensemble des Parties, ce qui est loin d’être acquis à ce stade.
Prochaines étapes
Si ces avancées ne permettent pas une rapide opérationnalisation de l’article 6, elles contribueront néanmoins à garantir son intégrité environnementale. Elles pourront peut-être aider les Parties à se concentrer sur les questions cruciales, telles que les modalités d’autorisation du transfert des réductions d’émission en vertu de l’article 6.2 ou la question de savoir si les pays qui ne disposent pas de registres nationaux pourront utiliser le registre international pour enregistrer et transférer leurs réductions d’émission.
Les Parties ont également convenu d’organiser un atelier pour faire avancer les travaux techniques sur les Articles 6.2 et 6.4 avant le mois de novembre 2024. Elles devraient ainsi être mieux placées à Bakou pour faire aboutir les négociations à un résultat concret et concluant.
En amont de la CMA-6, des travaux supplémentaires sur l’Article 6.4 seront réalisés. L’organe de supervision de l’article 6.4 (Article 6.4 Supervisory Body), chargé de rendre opérationnel un nouveau marché mondial du carbone dans le cadre de l’Accord de Paris, se réunira deux fois avant les négociations à Bakou, pour finaliser les recommandations sur les méthodologies et les absorptions d’émissions. Les commentaires recueillis auprès des Parties et des parties prenantes lors d’un événement qui s’est tenu le 3 juin 2024 à Bonn seront intégrés à ces recommandations.
Enfin, l’organe de supervision de l’article 6.4 vise également à finaliser un outil de développement durable (Sustainable Development Tool) en amont de la CMA-6, afin d’établir des garanties environnementales et sociales dans le cadre des échanges qui seront effectués sur le marché mondial du carbone.
Voir le projet de conclusions du Président du SBSTA sur l’article 6.2 (en date du 13 juin 2024).
Voir le projet de conclusions du Président du SBSTA sur l’article 6.4 (en date du 13 juin 2024).
Transition juste
- SBI/SBSTA 2-3 juin 2024: 1er dialogue dans le cadre du programme de travail des Emirats arabes unis sur la transition juste (UAE Just Transition Work Programme ou JTWP) (voir encadré ci-dessous).
Voir programme.
Résultats
A Bonn, l’objet de ce 1er dialogue dans le cadre du programme de travail sur la transition juste était de mener des discussions sur la manière d’intégrer les transitions justes dans les NDC, les plans nationaux d’adaptation et les stratégies bas-carbone 2050.
Un groupe de travail restreint (contact group), co-présidé par Marianne Karlsen (Norvège) et Kishan Kumarsingh (Trinité et Tobago), s’est réuni à plusieurs reprises au cours des deux semaines des sessions SB-60.
Les divergences de position sur le focus du JTWP observées lors des sessions SB-58 (juin 2023 à Bonn) et SB-59 (déc. 2023, Dubaï) sont revenues dans les négociations à Bonn lors des sessions SB-60, et notamment la reproche du groupe de négociation G77+Chine, selon laquelle elles sont trop axées sur l’atténuation. Ainsi, lors de l’ouverture du premier dialogue, le Président du SBI, Nabeer Munir (Pakistan), a recadré la vision : « la transition juste ne concerne pas uniquement la réduction des émissions de GES, elle concerne la construction d’un avenir où la justice sociale et la durabilité environnementale vont de pair… » (propos rapportés par Third World Network (TWN), TWN Bonn Climate News Update No. 3, 5 juin 2024).
Un projet de texte a été présenté aux Parties le 5 juin 2024 par la co-Présidente du groupe de travail restreint qui a invité les Parties à exprimer leurs points de vue sur ce document qu’elle a rédigé. Les discussions ont rapidement donné lieu à des divergences d’opinion : d’un côté le groupe G77+Chine, soutenu par le groupe des pays africains et le groupe LMDC, a proposé qu’en plus d’un projet de décision, un plan de travail pour le JTWP soit élaboré ; de l’autre côté, l’UE, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon se sont opposés à cette proposition, soutenant qu’il était trop tôt, sachant que le réexamen du JTWP interviendra en 2026.
Par ailleurs, les Parties ne sont parvenues à se mettre d’accord sur les modalités (plan global, calendrier, participants) du JTWP. Ces modalités doivent être concrétisées avant que les travaux techniques du JTWP ne puissent démarrer.
A plusieurs reprises à Bonn, les Parties ont rouvert des discussions sur des éléments qui avaient fait l’objet d’un consensus à Dubaï.
Le dernier jour des négociations, les Parties sont parvenues à un consensus sur un projet de conclusions et une note informelle. Celle-ci, rédigée sous la seule responsabilité des deux co-Présidents du groupe de travail restreint, comporte des éléments non consensuels et non exhaustifs qui visent à aider les Parties à faire avancer les discussions sur ce volet. Si le projet de conclusions ne fait aucune mention d’un plan de travail, la note informelle, elle, comporte un espace réservé (« placeholder ») pour le plan de travail.
Voir le projet de conclusions et la note informelle (les deux documents en date du 13 juin 2024).
Autres sujets de discussion
Des discussions ont également été menées sur :
Les océans
- SBSTA 11-12 juin 2024 : dialogue sur les océans et le changement climatique 2024 (évènement mandaté).
Voir programme et note d’information (du 24 mai 2024). Pour le programme, voir pp.13-14 du document.
Voir notre article sur le programme des SB-60, publié le 31 mai 2024.
Pour l’instant, aucune synthèse des discussions n’est disponible.
La transparence/MRV
Plusieurs évènements mandatés ont eu lieu à Bonn sur le sujet de la transparence/MRV.
Voir notre article sur le programme des SB-60, publié le 31 mai 2024.
Par ailleurs, des consultations informelles, coanimées par Daniela Romano (Italie) et Thiago Mendes (Brésil), ont été menées sur les outils de rapportage au titre du cadre de transparence renforcée (Enhanced Transparency Framework ou ETF). Les discussions se sont focalisées sur le document technique du Secrétariat du 6 mai 2024 retraçant l’expérience des Parties avec la version test des outils de rapportage du ETF (FCCC/TP/ 2024/2).
Voir projet de conclusions proposé par le Président du SBSTA (en date du 12 juin 2024).
Bilan
Malgré les négociations intenses, vives et tendues, force est de constater que Bonn 2024 a abouti à peu de progrès concrets sur des sujets clés. Le clivage Nord Sud a été évident, surtout sur le financement climat, la responsabilité historique des émissions de GES, l’atténuation et l’adaptation.
Cette année a vu un nombre record d’évènements mandatés (30 au lieu d’une vingtaine lors des sessions inter-COP de juin 2023), ce qui ajoute des contraintes en termes de temps à consacrer aux différents sujets de négociation. Ainsi, la capacité des Parties à suivre plusieurs axes de négociation simultanées et à répondre à la demande sans cesse croissante de soumissions et de participation aux ateliers inter-COP a été mise à rude épreuve. Cela est tout particulièrement le cas des petites délégations, telles que celles des pays les moins avancés (PMA).
Bonn a pu déboucher sur quelques avancées sur trois sujets clés : transition juste, indicateurs pour l’objectif mondial en matière d’adaptation, et article 6.2 et 6.4. En revanche, les discussions pour concrétiser le nouvel objectif collectif chiffré post-2025 en matière de financement climat ont débouché sur de maigres résultats, ce qui laisse beaucoup de chemin à parcourir d’ici Bakou (éléments structurels, modalités [dont les pays bénéficiaires, les pays donateurs, le calendrier et la période cible], montant) pour aboutir à un résultat concluant et à la hauteur des enjeux.
De même, sur les sujets du bilan mondial (Global Stocktake) et des plans nationaux d’adaptation, les négociations ont engendré des blocages et les Parties n’ont pas pu parvenir à un consensus sur des points clés. Par ailleurs, il faut constater l’absence de discussions sur la question primordiale de la transition vers la sortie des combustibles fossiles, telle qu’établie au paragraphe 28d de la décision 1.CMA.5 sur le premier GST, et surtout sur la mise en œuvre concrète de cet engagement des Parties pris à Dubaï.
Quant au sujet de l’atténuation (programme de travail MWP), les Parties n’ont même pas pu se mettre d’accord sur un projet de conclusions. Les discussions ont plutôt été caractérisées par une méfiance entre, d’une part, les pays développés et, d’autre part, les groupes de négociation LMDC et pays arabes. En particulier, alors que les sujets du bilan mondial et de l’atténuation constituent les deux principaux volets de négociation où les Parties pourraient décider des actions de réduction des émissions nécessaires pour concrétiser leurs engagements pris au titre de la décision 1.CMA.5 sur le premier GST (et surtout la transition vers la sortie des combustibles fossiles), ces Parties se sont embourbées dans des disputes sur les mandats respectifs de ces deux volets de négociation. Ce sont justement ces deux volets de négociation qui devront éclairer les travaux d’élaboration de la prochaine série des NDC à ambition renforcée, sachant que les Parties devront soumettre leur prochaine NDC au moins neuf à 12 mois en amont de la CMA-7 (le 10 novembre 2025), soit entre le 10 novembre 2024 et le 10 février 2025 (cf. paragraphe 166 de la décision 1/CMA.5 et paragraphe 25 de la décision 1/CP.21). De ce fait, le programme de travail MWP devrait jouer un rôle central dans la réalisation de l’objectif +1,5°C.
Les sessions des SB-60 ont, une fois de plus, fait ressortir les profondes divergences de positions entre, d’une part, les pays industrialisés et, d’autre part, les pays en développement et notamment les grands pays émergents. C’est d’abord et avant tout la question épineuse du financement climat où le clivage entre ces deux catégories est le plus fort. Plusieurs délégués sont partis de Bonn déçus, frustrés, voire en colère, étant donné les maigres résultats obtenus, notamment sur le volet de l’atténuation (programme de travail MWP), fustigeant la tendance observée ces dernières années à repousser les problèmes à régler d’année en année et ce, malgré l’urgence de la crise climatique. Comme l’a souligné le Secrétaire exécutif de la CCNUCC, Simon Stiell, les progrès à Bonn ont été « modestes » et « trop de questions sont restées en suspens. Trop de points sont encore sur la table [de négociation] » (source : discours de clôture de Simon Stiell, 13 juin 2024).
Enfin, la nouvelle gouvernance des deux prochaines COP (COP-29 à Bakou et COP-30 à Belém, Brésil), pour la première fois sous forme de troïka (Présidences de la COP-28 [Emirats arabes unis], de la COP-29 [Azerbaïdjan] et de la COP-30 [Brésil]) s’est montrée très discrète jusque-là. Cependant, à l’approche de Bakou, elle devra donner une nouvelle impulsion aux négociations, en travaillant plus étroitement avec les chefs de délégation pour permettre de faire aboutir la COP-29 à un résultat tangible.
La COP-29 a d’ores et déjà été baptisée la « COP du financement climat » mais à en juger par les maigres résultats obtenus à Bonn 2024 sur le volet nouvel objectif collectif chiffré post-2025 en la matière, on peut légitimement se poser la question de savoir si les pays développés et les pays en développement (les grands pays émergents en tête) vont parvenir à se mettre d’accord à Bakou sur un montant (quantum) du futur objectif et ce, conformément au mandat de la décision 1.CP.21 (paragraphe 53).
Enfin, en amont de Bakou, les enjeux clés de la COP-29 sont nombreux, dont les plus importants :
- définir, pour examen et adoption lors de la CMA-6 à Bakou, une proposition de montant (quantum) de l’objectif collectif chiffré post-2025 pour le financement climat ;
- régler les questions en suspens concernant les modalités de mise en œuvre de cet objectif (qui contribuera ? qui bénéficiera ? quel volet de l’action climat financer ? quelle période cible ? quelle nature du soutien (dons, prêts,..) ?
- concrétiser les suites à donner aux résultats de la phase politique du bilan mondial (Global Stocktake) et la mise en œuvre des nombreux engagements pris au titre de la décision 1/CMA.5 (au premier rang desquels « la transition vers la sortie des combustibles fossiles) ;
- faire déboucher le programme MWP (relatif à l’ambition de l’atténuation et aux mesures de mise en œuvre) sur des résultats concrets de réduction des émissions ;
- renforcer l’ambition, surtout en matière d’atténuation, dans la prochaine série des NDC alignées, dans leur ensemble, sur une trajectoire d’émissions de GES compatible avec l’objectif +1,5°C et s’appuyant sur les enseignements tirés du premier bilan mondial ;
- créer une dynamique politique et diplomatique forte pour inciter les pays développés à accroître le financement climat pour les pays en développement vulnérables ;
- concrétiser les modalités de mise en œuvre du programme de travail EAU-Belém sur les indicateurs dans le cadre de l’objectif mondial en matière d’adaptation (2024-2026).
En savoir plus
Page du site de la CCNUCC consacrée aux sessions SB-60
Communiqué de clôture de la CCNUCC en anglais et en français
Discours du Secrétaire exécutif de la CCNUCC à la clôture des sessions SB-60 en anglais et en français
Communiqué du négociateur en chef de l’Azerbaïdjan sur la vision et la stratégie de la Présidence de la COP-29 pour la Conférence des Nations Unies sur le Climat à Bakou (en date du 10 juin 2024)
Programme global des sessions SB-60 (overview schedule)
Programme complet des réunions lors des SB-60
Programme du jour en détail (le programme de la journée indiquée est mis en ligne la veille au soir, à partir du 3 juin 2024)
Ateliers et réunions parallèles (side events)
Page du site de la CCNUCC consacrée à la session SBSTA-60
Page du site de la CCNUCC consacrée à la session SBI-60
Couverture et analyse des résultats de Bonn par d’autres organismes de référence (centres de réflexion, instituts de recherche, etc.)
– page du site de l’Institut International du Développement Durable (IISD) consacrée aux sessions SB-60 en anglais et en français. Dans un bulletin quotidien, l’IISD revient en détail chaque jour sur les avancées de la veille
– Institut International du Développement Durable (IISD) : Earth Negotiations Bulletin Vol.12 n°853, 17 juin 2024 – Compte rendu détaillé des sessions SB-60 : en anglais et en français
– Carbon Brief (2024). « Bonn climate talks: key outcomes from the June 2024 UN climate conference”, 14 juin 2024. Consulter
[1] En français : « Opérer une transition juste, ordonnée et équitable vers une sortie des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques. » (source : CCNUCC).
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