Journal de la COP-28 | Jour 5 : 4 décembre
Pour le déroulement global et les enjeux de la Conférence de Dubaï sur le Climat, lire notre article.
Pour une vue d’ensemble détaillée des cinq sujets clés des négociations (bilan mondial ; pertes et préjudices ; adaptation ; atténuation ; financement climat), consultez notre guide des enjeux de la COP-28 : l’essentiel pour comprendre le contexte des négociations
Programme de la cinquième journée
Journées thématiques de la Présidence émiratie
En dehors des négociations officielles dans le cadre de la COP, de la CMA, de la CMP, du SBI et du SBSTA, la Présidence émiratie a organisé sept journées thématiques au cours de la Conférence de Dubaï, du 3 au 10 décembre 2023 :
- 4 décembre 2023 : finance, échanges commerciaux, égalité des genres, redevabilité (accountability).
Voir le programme thématique de la Présidence émiratie
Poursuite des négociations
Les cinq organes de la CCNUCC (COP, CMA, CMP, SBSTA et SBI) vont poursuivre les négociations formelles sur la base de leurs programmes de travail respectifs adoptés le 30 novembre 2023 (lire notre article). Les consultations informelles sur les sujets clés vont également se poursuivre en vue de dégager un consensus sur les projets de décision en discussion.
MRV (suivi, rapportage et vérification) / transparence : dispositif dans le cadre du régime pré-Paris (au sein du SBI)
Sessions MRV/transparence dans le cadre du régime pré-Accord de Paris, en vigueur jusqu’au 31 décembre 2022 pour les pays industrialisés et jusqu’au 31 décembre 2024 pour les pays en développement (conformément à la décision 1/CP.24, chapitre VI) :
- 3-4 déc. 2023: 15e atelier sur « l’échange non coercitif des points de vue » (facilitative sharing of views ou FSV – – voir ci-après) dans le cadre de la démarche MRV des pays en développement. Ainsi, les rapports biennaux actualisés (Biennal Update Reports ou BUR) de 15 pays en développement seront soumis à cet exercice : Albanie, Burundi, Colombie, Érythrée, Gabon, Honduras, Liban, Malawi, Papouasie-Nouvelle Guinée, Vanuatu (le 3 novembre), puis Israël, Pakistan, Suriname, Trinité et Tobago, Uruguay (le 4 décembre).
Pour des éléments de contexte sur le FSV, voir notre Journal de la COP-28 | Jour 4.
Retour sur la cinquième journée
En bref
Des négociations sur nombreux sujets ont eu lieu dans le cadre de consultations informelles, notamment en matière d’atténuation et d’adaptation. Le Bilan mondial (Global Stocktake) a été abordé en réunions « informelles informelles » réservées aux Parties. Plusieurs sujets délicats, principalement dans le cadre de la COP et/ou de la CMA, manquent d’éléments consensuels entre les Parties et plusieurs nouveaux textes étaient de longues compilations de points de vue, plutôt brutes et non resserrés. Or, il reste seulement deux jours avant la clôture officielle des 59èmes sessions du SBI et du SBSTA (prévue à 18h le mercredi 6 décembre 2023) alors qu’il leur reste beaucoup de travail à réaliser avant cette clôture.
Consultations informelles
Des consultations informelles ont été menées sur plusieurs sujets :
Bilan mondial (Global Stocktake ou GST)
Discussions sur le projet de texte de négociation
Les consultations informelles, menées par les co-facilitateurs Alison Campbell (Royaume-Uni) et Joseph Teo (Singapour), se sont poursuivies sur le projet de texte visant à formuler les recommandations politiques clés pour rectifier le tir afin de rendre la trajectoire d’émissions de GES en 2030 compatible avec l’objectif de +1,5°C. Ce texte devrait constituer le principal résultat de la COP-28. Le négociateur en chef de l’équipe de l’UE, Jacob Werksman, l’a même qualifié de « la mère de toutes les décisions chapeaux [des COP] » (rapporté par Climate Home News dans son Bulletin de la COP-28 du 5 déc. 2023). Il a fallu trois jours aux négociateurs réunis à Dubaï pour relire en entier le document qui comporte de très nombreuses options sur chaque volet contentieux. Malgré l’ambiance « positive », selon des observateurs, des divergences d’opinion demeurent sur des questions cruciales : le « paquet énergie » (énergies renouvelables, efficacité énergétique, énergies fossiles,…), le financement climat, les recommandations à adopter pour la prochaine série des NDC (qui seront à soumettre en 2025), etc..
L’objectif est de soumettre aux Ministres, qui débarqueront à Dubaï pour la deuxième semaine des négociations (qui commence jeudi 7 déc. 2023) un texte resserré, plus concis, avec moins d’options. Une nouvelle version du projet de décision était attendue mardi matin (le 5 déc. 2023).
Programme de travail de Charm el-Cheikh pour renforcer le niveau d’ambition en matière d’atténuation et la mise en oeuvre des mesures correspondantes (Mitigation Work Programme ou MWP)
Pour des éléments de contexte, voir notre guide sur les enjeux, section atténuation
Lors des consultations informelles, les co-facilitateurs Kay Harrison (Nouvelle-Zélande) et Carlos Fuller (Belize) ont présenté une note informelle élaborée après consultation des Présidents du SBI et du SBSTA. Ils ont expliqué que la note est centrée sur les aspects où il y a convergence des points de vue et ne rend pas nécessairement compte de tous les points de vue exprimés jusqu’à présent en consultations informelles. Plusieurs Parties ont exprimé leur volonté d’utiliser la note comme base de discussions ultérieures, tout en soulignant ses lacunes. D’autres ont déploré que la note réitère principalement des aspects déjà consensuels lors des sessions précédentes de la CMA et représente un pas en arrière dans les consultations en cours. Un autre groupe de pays de négociation s’est opposé à l’utilisation du texte comme base de négociations, au motif qu’il contient des éléments qui dépassent le mandat du groupe.
Bien que les Parties n’aient pas pu se mettre d’accord pour s’appuyer sur la note informelle, elles se sont livrées à l’examen des éléments à inclure dans le texte du projet de décision, tels que : des messages de haut niveau, ou un espace réservé pour ces messages en attendant le résultat du bilan mondial (Global Stocktake) ; des dialogues régionaux et virtuels ouverts et inclusifs ; et un libellé spécifique sur une ambition accrue en matière d’atténuation.
Concernant les prochaines étapes, alors que certaines Parties appelaient à établir une nouvelle version de la note informelle sur la base des contributions supplémentaires qui ont été fournies, d’autres ont insisté sur la nécessité de s’attaquer au texte d’un projet de décision. Les co-facilitateurs consulteront les Présidents du SBI et du SBSTA.
Transition juste
Le 4 décembre 2023, des consultations informelles coanimées par Selam Abeb (Éthiopie) et Luisa Roelke (Allemagne) ont repris après la diffusion d’une compilation des propositions faisant office de deuxième version d’un projet de décision de la CMA. Beaucoup ont estimé que le texte était trop long mais qu’il reflétait davantage la diversité des points de vue. Les Parties sont convenues qu’une rationalisation plus poussée du texte était nécessaire.
Article 6 : mécanismes de marché
Pour des éléments de contexte sur l’article 6, voir notre Journal de la COP-28 | Jour 3.
Article 6.2 : les approches coopératives (transferts de réduction entre pays ou ITMO, crédits carbone)
Lors des consultations informelles co-animées par Maria AlJishi (Arabie saoudite) et Peer Stiansen (Norvège), les Parties ont poursuivi leur examen du texte du projet de décision et se sont focalisées sur la section relative aux autorisations. Les Parties ont exprimé leurs points de vue concernant l’utilisation de modèles d’autorisation, certaines soutenant leur utilisation sur une base volontaire. Plusieurs Parties ont réclamé un espace de stockage et de publication des autorisations dans la Plateforme centralisée de comptabilisation et de reporting (CARP). La nécessité de résoudre la question de la définition des approches coopératives (appelées parfois aussi les démarches concertées) a été évoquée.
Concernant la révocation des autorisations, les Parties ont exprimé des points de vue divergents.
Consultations informelles conjointes sur l’article 6.2 et l’article 6.4
Lors de la reprise des consultations informelles conjointes co-animées par Kate Hancock (Australie) et Sonam Tashi (Bhoutan), les Parties se sont également penchées sur les autorisations. Elles ont discuté du calendrier et du contenu des autorisations, l’une des Parties déclarant que les autorisations doivent être fournies avant le premier transfert. Une Partie a déclaré que l’autorisation concerne uniquement les approches coopératives de l’article 6.2 et non le mécanisme de développement durable (MDD) de l’article 6.4. Certaines Parties ont soutenu l’option d’exiger un « minimum cohérent » dans les autorisations.
Adaptation
Programme de travail Glasgow-Charm el-Cheikh (Glasgow-Charm el-Cheikh Work Programme on the Global Goal on Adaptation) sur deux ans (2022-2023) (cf. paragraphes 11 et 12 de la décision 1/CMA.3)
Pour des éléments de contexte, voir notre guide sur les enjeux, section adaptation
Lors des consultations informelles, les co-facilitateurs Mattias Frumerie (Suède) et Janine Felson (Belize) ont déclaré avoir travaillé toute la nuit pour élaborer le projet de texte, sur la base de 16 contributions écrites et totalisant 90 pages, pour aider les Parties à trouver un terrain d’entente.
De nombreux groupes et Parties ont exprimé de sérieuses inquiétudes concernant le projet. Ils ont noté que plusieurs propositions n’étaient pas prises en compte, ont considéré le texte déséquilibré, inacceptable et irréalisable, et ont demandé aux co-facilitateurs de « reprendre tout à zéro ». Des préoccupations ont été réitérées concernant du texte manquant ou entre crochets sur : le principe des responsabilités communes mais différenciées et des capacités respectives ; les moyens de mise en œuvre, notamment financiers ; des objectifs financiers quantifiables et des mécanismes pour rendre des comptes (accountability) ; et l’urgence d’une action et d’un soutien renforcés en matière d’adaptation, ainsi que l’urgence de combler le déficit d’adaptation.
Tout en exprimant aussi des inquiétudes concernant ce texte, certaines Parties se sont inquiétées du temps restant et ont exhorté les Parties à discuter de manière informelle pour trouver un accord. Les co-facilitateurs vont élaborer un nouveau texte. Les consultations informelles vont se poursuivre.
Questions relatives au Fonds d’adaptation
Les discussions se sont ouvertes au sein d’un groupe de contact (groupe de travail restreint) de la CMP co-facilité par Diann Black-Layne (Antigua-et-Barbuda). Le Secrétariat du fonds d’adaptation a notamment indiqué que la stratégie de mobilisation des ressources du fonds repose principalement sur des contributions volontaires. Les discussions se sont ensuite poursuivies au sein d’un groupe de contact de la CMA co-facilité par Louise Rousseau (France). Le Secrétariat du fonds d’adaptation a présenté les grandes lignes des mesures qui devront être prises lors de la transition éventuelle du fonds pour servir exclusivement l’Accord de Paris, et notamment : la révision des politiques opérationnelles, des lignes directrices et des priorités stratégiques, et la mise en place de modalités institutionnelles avec le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) pour les tâches de secrétariat et avec la Banque mondiale pour les tâches de gestion.
Les co-facilitatrices élaboreront un projet de texte et les discussions se poursuivront dans le cadre de consultations informelles.
Financement climat
Financement à long terme
Lors des consultations informelles, le co-facilitateur Carlos Fuller (Belize) a invité les Parties qui avaient demandé la parole lors de la session précédente à faire part de leurs observations. Des pays en développement ont demandé la suppression des références aux cadres propices (enabling environments), ce à quoi se sont opposés les pays industrialisés. Les pays développés se sont opposés au caractère normatif des mentions relatives à des technologies spécifiques et à une référence au partage des charges. Les co-facilitateurs procéderont à la révision du texte du projet de décision.
Transparence – La mise à disposition d’un soutien financier et technique pour l’article 13 de l’Accord de Paris
Lors des consultations informelles, les co-facilitatrices Sandra Motshwanedi (Afrique du Sud) et Julia Gardiner (Australie) ont sollicité les points de vue des Parties sur le projet de texte de décision. Un groupe de pays en développement a proposé le « Plan de travail de Dubaï sur les capacités de transparence 2024-2028 », qui présente les grandes lignes des activités conçues pour améliorer la mise à disposition d’un soutien financier, technique et en matière de renforcement des capacités. Plusieurs pays en développement et développés ont soutenu la proposition, mais certains pays industrialisés s’y sont opposés, en affirmant que la proposition peut encore être améliorée.
Certains pays industrialisés ont contesté la demande d’augmentation du financement du FEM pour l’élaboration des rapports biennaux de transparence (BTR), et quelques pays en développement ont suggéré que de plus amples consultations avec le FEM soient nécessaires avant toute reprise des discussions en la matière. Il a également été suggéré de créer un portail de partage d’informations sur les meilleures pratiques pour guider et soutenir la présentation des BTR des pays en développement. Les co-facilitatrices ont proposé de mener une autre consultation informelle afin de laisser le temps aux Parties pour se mettre d’accord sur le projet de texte.
Vient de paraître
Carbon Brief, site britannique spécialisé en matière de climat, a publié le 1er décembre 2023 un outil de suivi interactif des avancées ou absence d’avancées des différents volets de négociations. Il montre le sujet, la nature du texte, la date et l’heure de sa publication, le nombre de pages, le nombre d’options et de crochets (ceux-ci indiquant des éléments de texte non encore tranchés et que donc il n’y a pas encore consensus sur le choix des options ou la formulation de texte), s’il y a consensus ou accord intégral (en vert) ou absence de consensus (en rouge).
Dans les coulisses : lieu de la COP-29
Les consultations sont toujours en cours concernant l’hôte de la COP-29 (2024) qui doit avoir lieu, selon la rotation des cinq groupes régionaux de l’ONU en Europe centrale et orientale (UE-11 + Europe orientale). Malgré les intenses discussions menées à Bonn en juin 2023 lors des sessions SB-58 (lire notre article), les 23 pays du groupe régional Europe de l’Est n’étaient pas parvenus à un consensus sur le choix d’un pays. Ils avaient donc reporté leur choix à Dubaï. Le choix du pays hôte candidat de la COP-29 doit se faire par consensus d’abord au sein du groupe régional Europe de l’Est, et ensuite être soumis pour approbation formelle par l’ensemble des Parties à la COP-28. Quoi qu’il en soit, les Parties devront décider du pays hôte de la COP-29 à Dubaï car elle va avoir lieu l’année prochaine (novembre 2024).
Selon Carbon Brief, étant donné les divers conflits entre plusieurs de ces 23 pays (veto de la Russie vis-à-vis de tout pays candidat de l’UE-11 à cause du soutien de l’UE à l’Ukraine, veto de l’Arménie vis-à-vis de l’Azerbaïdjan et vice-versa,…). Par ailleurs, il est peu probable que la Russie, l’Ukraine ou le Bélarus proposent d’accueillir la COP-29. Reste donc l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Géorgie, le Monténégro, la Macédoine du Nord, la Moldavie et la Serbie (source : tweet de Carbon Brief du 4 déc. 2023 – voir ci-dessous). En cas de non-accord entre les pays du groupe de l’Europe de l’Est, c’est la CCNUCC qui accueillera la COP-29 à son siège à Bonn, les Emirats arabes unis gardant la Présidence pour une année supplémentaire (source : Climate Home News du 29 nov. 2023).
En savoir plus
CCNUCC
Page du site de la CCNUCC consacrée à la COP-28
Programme global de la Conférence (overview schedule) (état au 23 nov. 2023)
Programme détaillé pour la cinquième journée (4 déc.)
Programme jour par jour en détail (le programme de la journée indiquée est mis en ligne la veille au soir)
Programme des évènements et ateliers parallèles (side events)
Communiqué de la CCNUCC pour l’ouverture en français et en anglais
Présidence émiratie
Site officiel de la Présidence émiratie de la COP-28
Programme thématique de la Présidence égyptienne