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Emissions de GES et de polluants : publication des données Secten éd. 2023

  • Réf. : 2023_05_a08
  • Publié le: 8 juin 2023
  • Date de mise à jour: 12 septembre 2024
  • France

En bref

Le Citepa vient de publier les données d’émissions de gaz à effet de serre [GES] et de polluants atmosphériques en France au format Secten, édition juin 2023. Il s’agit des derniers résultats de l’inventaire national d’émissions consolidés jusque pour l’année 2021 et des chiffres pré-estimés ou « proxy » 2022. Ces données seront complétées, fin juin 2023, par la mise à jour du rapport Secten qui présentera les explications et analyses détaillées, secteur par secteur.

Ces données permettent de comparer les émissions effectives aux différents objectifs, notamment les budgets carbone définis dans la stratégie nationale bas-carbone (SNBC). Cela étant les chiffres relatifs à l’année 2022 restent une pré-estimation, à consolider en 2024.

Pour les gaz à effet de serre (hors UTCATF), après une baisse massive en 2020 versus 2019 (-9,0 %) et un rebond partiel en 2021 versus 2020 (+5,7 %), les émissions de CO2e sont reparties à la baisse en 2022 versus 2021 (-2,7 %). Cette dernière baisse est surtout imputable au secteur des bâtiments (-14,7%) avec une baisse de consommation d’énergies fossiles pour le chauffage ; mais aussi au secteur de l’industrie manufacturière (-6,4%). Les émissions du secteur de la production d’énergie ont en revanche augmenté en 2022 (+4,9%) dans un contexte d’indisponibilité de centrales nucléaires et de crise énergétique ; de même que les émissions du transport (+2,3%) qui poursuivent leur rebond.

Pour les polluants, on observe pour la plupart des polluants un retour à la tendance de réduction des émissions en 2022 versus 2021, après des rebonds temporaires de certaines émissions de polluants en 2021 versus 2020., Bien que la tendance des émissions nationales soit à la baisse, et que le nombre de points de mesure de qualité de l’air en dépassement des valeurs limites de qualité de l’air et que l’amplitude des dépassements soient également en baisse, des dépassements sont toujours constatés dans certaines agglomérations.

 

Emissions de gaz à effet de serre

Résultats provisoires pour l’année 2022 : des émissions de nouveau en baisse après le rebond de 2021

En 2020, la combinaison de la crise du Covid-19 et d’un hiver peu rigoureux avaient contribué à une très forte réduction des émissions de GES, -9,0% par rapport à 2019 au total tous secteurs confondus, et -15,5% pour les transports, ce secteur contribuant ainsi à plus de la moitié de la baisse totale. Les secteurs de la production d’énergie et des bâtiments, favorisés par les températures clémentes, avaient vu leurs émissions baisser de respectivement 10,8% et 6,2%. Ainsi, au total, en 2020, le niveau d’émissions en France avait atteint 392,3 Mt CO2e, hors puits de carbone.

En 2021, un rebond des émissions de GES a été observé (+5,7%) car la forte baisse des émissions en 2020 était principalement liée à des causes conjoncturelles temporaires. Le niveau estimé pour 2021 est de 414,8 Mt CO2e, ce qui reste inférieur au niveau d’avant crise sanitaire (431,1 Mt CO2e en 2019). Ce rebond avait été particulièrement marqué pour les transports (+12,4%) et pour l’industrie (+8,2%).

En 2022, d’après ces pré-estimations, les émissions de GES ont repris leur trajectoire à la baisse (-2,7%) après le rebond observé en 2021. Néanmoins, cette tendance globale résulte d’évolutions variables selon les secteurs. Le niveau pré-estimé sur l’année 2022, hors puits de carbone, s’élève à 403,8 Mt CO2e. Cette baisse est surtout imputable au secteur des bâtiments (-14,7%) avec une baisse de consommation de fossiles pour le chauffage ; mais aussi au secteur de l’industrie manufacturière (-6,4%). Les émissions de l’industrie de l’énergie ont en revanche augmenté en 2022 (+4,9%) dans un contexte d’indisponibilité de centrales nucléaires et de crise énergétique ; de même que les émissions du transport (+2,3%) qui poursuivent leur rebond.

Evolutions des émissions de GES entre 2018 et 2022 (Mt CO2e)

Avertissement : les évolutions nulles ou très faibles des secteurs agriculture et déchets ne sont pas de réelles stagnation des émissions mais simplement liées au fait que l’évolution 2021-2022 n’est estimée que partiellement dans le proxy 2022. Une valeur consolidée des émissions de ces deux secteurs en 2022 sera fournie dans le prochain inventaire Secten édition 2024.

 

Analyse par secteur

La production d’énergie a connu une forte hausse des émissions de GES entre 2020 et 2021 (+1,2 Mt CO2e soit +3,0%) et entre 2021 et 2022 (+2,1 Mt CO2e soit +4,9%). L’indisponibilité de tranches nucléaires a eu un impact important sur les émissions de ce secteur. Les arrêts de nombreuses centrales ont généré un recours plus important aux centrales à gaz et un recours temporaire au charbon avec la réouverture, le 28 novembre 2022, de la centrale de Saint-Avold, dans un contexte de hausse des prix du gaz suite à l’invasion russe de l’Ukraine. La consommation d’électricité a néanmoins été amoindrie par les appels à la sobriété énergétique.

Le secteur de l’industrie manufacturière participe à la baisse globale des émissions pré-estimée entre 2021 et 2022, à un niveau moindre que le secteur résidentiel-tertiaire, avec une diminution de 6,4% (-5,0 Mt CO2e). Une réduction de la consommation de gaz naturel dans les petites industries, de charbon dans les sites de sidérurgie et de métaux ferreux, et une diminution de la production de certaines branches (chimie inorganique, ciment) expliquent cette baisse. Seul le sous-secteur de la construction est en hausse en 2022 (+2,4%), retrouvant son niveau de 2019.

Les émissions du secteur des bâtiments résidentiels et tertiaires de 2022 sont en forte baisse par rapport à celles de 2021 (-14,7 %, soit -11,1 Mt CO2e). Le baromètre avait permis de montrer que cette baisse a été particulièrement forte en avril-mai et en octobre-novembre. Cela s’explique notamment par une forte réduction de la consommation d’énergie fossile dans contexte de crise énergétique avec une hausse des prix du gaz et d’autres produits pétroliers, des appels à la sobriété énergétique auprès des ménages et des entreprises et un hiver doux (indice de rigueur de 0,935 en 2022 contre 0,984 en 2021). Ce secteur contribue le plus fortement à la baisse globale des émissions entre 2021 et 2022. Ce secteur atteint ainsi en 2022, avec 64,0 Mt CO2e, son niveau d’émissions de GES le plus bas depuis la période observée (1990), et dans la continuité de la diminution des émissions observées depuis 2017, malgré la hausse temporaire observée en 2021.

Les émissions de GES du secteur des transports sont en hausse de 2,3% (+2,9 Mt CO2e) entre 2021 et 2022. Le transport routier explique la plus grande partie de cette hausse (+1,9 Mt CO2e), suivi par les autres secteurs des transports, principalement l’aérien (vols domestiques y compris vers l’Outre-mer). Cependant, cette hausse reflète la poursuite du rebond post-crise Covid, où ce secteur avait connu une baisse très forte en 2020 (-20,8 Mt CO2e entre 2019 et 2020, soit -15,5%). Malgré le rebond en 2021 (+14 Mt CO2e) et en 2022 (+2,9 Mt CO2), le niveau en 2022 reste inférieur à celui de 2019 (134,4 Mt CO2e).

Les évolutions des émissions du secteur de l’agriculture en 2022 ne sont pas encore spécifiquement estimées. Néanmoins, plusieurs éléments nous permettent d’entrevoir une potentielle baisse attendue des émissions agricoles en 2022 qui seront visibles par la suite dans l’inventaire annuel national GES consolidé.

Pour ce qui est des déchets, les indicateurs mobilisés pour préestimer l’année 2022 ne permettent pas non plus de proposer des évolutions spécifiques des émissions des déchets pour le moment pour 2022. Ce secteur ne représente que 3,8% des émissions totales en 2021. A noter que les émissions de GES des déchets n’ont pas connu pas de baisse significative sur la période 1990-2021.

Enfin pour ce qui est du puits de carbone, l’évolution interannuelle du secteur UTCATF s’explique principalement par l’évolution du puits de carbone en forêt, estimé via les données de l’IGN sur la biomasse. Ces données sont relatives à des campagnes quinquennales, ce qui rend difficile l’estimation interannuelle des années récentes, et ne permet pas la pré-estimation de l’année venant de s’écouler.

 

Qu’en est-il des engagements de réduction de la France ? Le budget carbone de la SNBC-2 est-il respecté ?

La Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) de la France fixe les objectifs climat de la France. Pour différentes périodes, les émissions de GES, en moyenne sur la période, ne doivent pas dépasser un budget carbone donné. Le 1er budget carbone (442 Mt CO2e/an en moyenne sur 2015-2018), défini dans la première édition de la SNBC (SNBC-1), n’avait pas été respecté, avec des émissions réelles de 453 Mt CO2e/an en moyenne sur la période.

Le deuxième budget carbone fixé par la SNBC révisée (SNBC-2) s’élève à 422 MtCO2e/an en moyenne sur la période 2019-2023 (contre 399 Mt CO2e/an dans la SNBC-1). Pour l’instant, sur la période 2019-2022, la moyenne des émissions est estimée à 410 Mt CO2, soit en dessous de ce seuil. La tendance indique donc un probable respect de ce budget carbone révisé, sous-réserve de la valeur de 2023. Par ailleurs, l’objectif indicatif annuelle de la SNBC-2 pour l’année 2022, fixé à 410 Mt CO2e, serait aussi respecté d’après la pré-estimation de l’année 2022 (403,8 Mt CO2e).

Si l’on met de côté les années 2020-2021 marquées par la crise sanitaire (baisse exceptionnelle puis rebond) et que l’on observe la tendance linéaire entre 2019 et 2022, on constate une baisse moyenne de 2,1%/an (soit -9,1 Mt CO2e/an) entre 2019 et 2022. Cette baisse est à la fois le résultat d’effets conjoncturels (impact de la rigueur hivernale, crise sanitaire et énergétique, disponibilité des centrales nucléaires…), structurels (évolutions du secteur industriel, baisse du cheptel bovin, inertie du parc automobile…) et de la mise en œuvre de politiques (rénovation des bâtiments, mobilité, décarbonation de l’industrie…). La SNBC-2 dessine une trajectoire de réduction moyenne de -2,7%/an sur la période 2019-2023, de -3,3%/an sur la période 2024-2028, et de -4,0%/an sur la période 2029-2033.

 

 

Ces objectifs sont en cours de mise à jour. Premièrement, ceux-ci avaient été déterminés sur la base d’émissions historiques (sur la base des pouvoirs de réchauffement globaux (PRG) issus du 4e rapport d’évaluation du Giec, alors que les émissions sont désormais calculées sur la base des PRG du 5e rapport. Deuxièmement, la SNBC-2 avait été conçue en cohérence avec les objectifs de l’UE de l’époque, à savoir une réduction de 40% entre 1990 et 2030. Depuis cet objectif de l’UE a été réhaussé à 55%. La SNBC-3 proposera donc des budgets carbone mis à jour pour refléter ces différents points. Dans ce contexte, lors de la dernière réunion du Conseil National de la Transition Energétique le 22 mai 2023, le gouvernement a dévoilé la nouvelle trajectoire de réduction pour atteindre 270 Mt CO2e en 2030. Cette trajectoire entraine une réduction nécessaire de 4,1%/an (soit -16,7 Mt CO2e/an) entre 2022 et 2030, soit le double de la réduction observée sur la période 2019-2022.

 

Emissions de polluants atmosphériques

La plupart des émissions de polluants sont en forte baisse depuis 1990

En France, les émissions de tous les polluants atmosphériques sont en baisse depuis 1990 (métaux lourds, polluants acidifiants, polluants eutrophisants, précurseurs d’ozone troposphérique, particules, polluants organiques persistants). Les émissions de certains polluants ont été très fortement réduites, voire quasiment éliminées depuis 1990, c’est par exemple le cas du plomb (arrêt de distribution de carburants plombés en 2000), ou encore de l’hexachlorobenzène (HCB), des dioxines et furanes (PCDD/F) et du chrome, du fait des mesures réglementaires mises en place et des moyens de réduction adoptés dans les secteurs de l’industrie et des déchets.

 

Les objectifs de réduction des émissions de polluants sont-ils respectés ?

Jusqu’à présent, la France a respecté ses objectifs de réduction d’émissions de polluants atmosphériques fixés dans le cadre de différents Protocoles de la Convention sur la Pollution Atmosphérique Transfrontière à Longue Distance (CLRTAP), pour les SOx, les COVNM, le NH3, les HAP, les dioxines et furanes, le HCB, les métaux lourds (le cadmium (Cd), le mercure (Hg) et le plomb (Pb)), dans les délais fixés par ces Protocoles. Seuls les objectifs visant les NOX pour 2010 n’ont été atteints qu’avec quelques années de retard. Pour l’année 2021 et 2022, les objectifs de réduction des émissions fixés à la fois par l’UE (directive dite NEC 2 (directive (UE) 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques) et la CLRTAP pour les SOx, les NOx, le NH3 et les particules fines (PM2,5) ont été respectés. Pour les COVNM, l’objectif est respecté lorsqu’on compare les émissions au même périmètre que celui pris en compte dans l’objectif (total national sans les émissions biogéniques de l’agriculture).

 

 

Evolution récente des émissions de particules

En 2021, un rebond des émissions nationales de PM2,5 est observé (+10% comparativement à 2020), notamment à la suite de la reprise de l’activité dans certains secteurs comme le transport (+6% d’émissions) et l’industrie manufacturière (+10%), mais aussi lié à un hiver plus rigoureux qui a entraîné une augmentation des consommations de biomasse du secteur résidentiel (+14% de consommations de bois-énergie pour le résidentiel entre 2020 et 2021), et donc des émissions de PM2,5 notamment pour le chauffage résidentiel (+11%). Toutefois, le niveau d’émission de 2021 est inférieur de 3% à celui de 2019, avant la crise sanitaire.

D’après les pré-estimations réalisées pour l’année 2022, les émissions de PM2,5 devraient poursuivre la baisse tendancielle observée et une réduction d’émissions d’environ 11% est attendue comparativement à 2021. La raison principale de cette baisse serait la douceur de l’hiver (coefficient de rigueur climatique presque aussi faible qu’en 2014 et 2020), et donc la réduction d’émissions aurait lieu majoritairement dans le secteur du chauffage résidentiel.

 

Des émissions nationales en baisse mais des concentrations qui peuvent rester localement élevées

Les émissions de polluants estimées par le Citepa sont relatives aux quantités totales émises par an, sur toute la France métropolitaine. Les concentrations dans l’air ambiant, surveillées par les Associations Agrées pour la Surveillance de la Qualité de l’Air (AASQA) sont mesurées quotidiennement et localement. Ainsi, bien que la tendance des émissions nationales soit à la baisse, et que le nombre de points de mesure de qualité de l’air en dépassement des valeurs limites de qualité de l’air et que l’amplitude des dépassements soient également en baisse, des dépassements sont toujours constatés dans certaines agglomérations. Des pics de pollution sont également relevés localement par les AASQA. Aussi, des épisodes de pollution ont régulièrement lieu en hiver et au printemps en termes de particules et au printemps et en été pour l’ozone. Les valeurs limites de concentration pour NO2 ne sont toujours pas respectées sur l’ensemble du territoire. En raison notamment du non-respect de ces valeurs limites de concentration, la Commission européenne avait lancé des procédures d’infraction à l’encontre de la France et la Cour de Justice de l’UE l’a condamné deux fois, d’abord en 2019 pour non-respect des valeurs limites de concentration du NO2, puis en 2022 pour non-respect de celles des PM10. Voir aussi la décision du Conseil d’Etat du 17 octobre 2022 concernant le dépassement des valeurs limites de concentration du NO2.

 

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