Reporting extra-financier des entreprises : adoption des règles renforcées de la directive CSRD
Le 28 novembre 2022, le Conseil de l’UE a donné son approbation finale à la directive sur la publication d’informations en matière de durabilité par les entreprises (Corporate Sustainability Reporting Directive ou CSRD), sur la base de la position du Parlement européen du 16 novembre 2022. La directive est donc adoptée en tant que Directive (UE) n°2022/2464 du 14 décembre 2022 et a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 16 décembre 2022 (JOUE L 322), son entrée en vigueur ayant eu lieu 20 jours plus tard, soit le 3 janvier 2023.
En application de cette directive, les grandes entreprises et les petites et moyennes entreprises devront inclure, dans le rapport de gestion, les informations qui permettent de comprendre les incidences de l’entreprise sur les questions de durabilité, la manière dont ces questions de durabilité influent sur l’évolution des affaires, les résultats et la situation de l’entreprise.
Contexte
Le reporting climat des entreprises était jusqu’ici régi, au niveau européen, par la directive 2014/95/UE (modifiant la directive 2013/34/UE, dite directive « comptable »), obligeant les entreprises de plus de 500 salariés à inclure, dans leur rapport de gestion, une déclaration non financière comportant entre autres un volet climat. La directive 2014/95/UE est appelée la « Non Financial Reporting Directive » ou NFRD– lire notre brève).
Dans le cadre de sa communication sur le Pacte vert pour l’Europe (European Green Deal), publiée le 11 décembre 2019, la Commission souhaitait renforcer ces dispositifs relatifs aux investisseurs et aux entreprises ; et avait annoncé une révision à venir de la directive NFRD. Cette révision a été engagée, avec une consultation publique, lancée en janvier 2020.
La Commission avait ensuite présenté, le 21 avril 2021, une proposition de directive dite CSRD venant modifier les exigences actuelles de reporting climat définies dans la directive 2014/95/UE. Le but de cette nouvelle proposition de directive était de renforcer la transparence, la fiabilité et la cohérence des informations fournies ; mais aussi d’étendre ces obligations à davantage d’entreprises (passant de près de 11 000 à environ 50 000) ; et enfin de simplifier ce processus de reporting.
Le 24 février 2022, les États membres de l’UE ont approuvé à l’unanimité la position du Conseil sur la proposition relative à la CSRD. Le 21 juin 2022, le Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord provisoire sur la directive, qui a été approuvé par les représentants des États membres de l’UE le 30 juin 2022.
Renforcement des règles de reporting environnemental
La CSRD renforce donc les règles existantes en matière de publication d’informations non financières introduites dans la directive comptable par la directive NFRD de 2014. La CSRD introduit des exigences plus détaillées en matière de rapports et veille à ce que les grandes entreprises et les PME cotées soient tenues de publier des informations concernant des questions de durabilité, comme les droits environnementaux, les droits sociaux, les droits de l’homme et les facteurs de gouvernance.
Le groupe consultatif pour l’information financière en Europe (EFRAG) sera chargé d’élaborer des projets de normes européennes. Il s’agit de compléter cette directive via la définition de « normes de rapportage sur la durabilité » (sustainability reporting standards, art. 29b). La directive indique néanmoins d’ores-et-déjà des critères pour ces normes, notamment la présence d’information sur les émissions de gaz à effet de serre de l’entreprise, incluant les scopes 1, 2, et « si pertinent » le scope 3 ; sur l’adaptation ; l’impact sur l’eau et les ressources marines ; l’usage des ressources et l’économie circulaire ; la pollution [sans préciser le compartiment environnemental : air, eau ou sol]; l’impact sur la biodiversité et les écosystèmes. La Commission européenne adoptera la version finale des normes sous la forme d’un acte délégué, à la suite de consultations avec les États membres de l’UE et un certain nombre d’organes européens.
Adaptation des règles aux tailles des entreprises
Dans le même temps, les nouvelles exigences étendues sont adaptées aux différentes tailles d’entreprises et une période de transition suffisante est ménagée pour que les entreprises puissent se préparer.
Ces nouvelles règles sur la publication d’informations en matière de durabilité s’appliqueront à toutes les grandes entreprises et toutes les entreprises cotées sur des marchés réglementés, à l’exception des microentreprises. Ces entreprises sont également responsables de l’évaluation des informations applicables à leurs filiales.
Les règles s’appliquent également aux PME cotées, en tenant compte de leurs spécificités. Pendant une période transitoire, une dérogation sera possible pour les PME cotées, les exemptant de l’application de la directive jusqu’en 2028.
En ce qui concerne les entreprises non européennes, l’obligation de fournir un rapport sur la durabilité s’applique à toutes les entreprises qui génèrent plus de 150 millions d’euros de chiffre d’affaires net dans l’UE et qui ont au moins une filiale ou succursale dans l’UE dépassant certains seuils. Ces entreprises doivent fournir un rapport sur leurs impacts en matière environnementale, sociale et de gouvernance (ESG), selon la définition donnée dans la directive.
Calendrier d’application
L’application du règlement aura lieu en quatre temps :
- déclarations en 2025 sur l’exercice 2024 pour les entreprises déjà soumises à la directive sur la publication d’informations non financières ;
- déclarations en 2026 sur l’exercice 2025 pour les grandes entreprises qui ne sont pas actuellement soumises à la directive sur la publication d’informations non financières ;
- déclarations en 2027 sur l’exercice 2026 pour les PME cotées (à l’exception des microentreprises), des petits établissements de crédit non complexes et des entreprises captives d’assurance ;
- déclarations en 2029 sur l’exercice 2028 pour les entreprises de pays tiers générant un chiffre d’affaires net de plus de 150 millions d’euros dans l’UE si elles ont au moins une filiale ou succursale dans l’UE qui dépasse certains seuils.
Les nouvelles règles devront avoir été transposées en droit national par les États membres 18 mois après entrée en vigueur du texte, soit d’ici juillet 2024.
En savoir plus
Lettre de la DAJ (Direction des Affaires Juridiques du Ministère de l’Economie français)