Directive NEC 2 : 13 Etats membres ont intégralement respecté leurs engagements de réduction 2020-2029 mais tous les Etats membres doivent faire plus d’efforts pour le post-2030
L’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE) a publié, le 11 juillet 2022, la première évaluation des progrès des Etats membres pour respecter leurs engagements de réduction des émissions des cinq polluants atmosphériques (SO2, NOx, COVNM, NH3, PM2,5) sur la période 2020-2029 et ceux, plus stricts, pour la période à partir de 2030, fixés par la directive dite NEC 2 (directive (UE) 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques) (voir encadré en fin d’article). Ainsi, la note d’analyse (briefing) de l’AEE est basée sur les données d’émission pour l’année 2020, dernière année pour laquelle les Etats membres ont rapporté leurs émissions (en mars 2022).
Lire aussi notre dossier de fond sur la directive NEC-2 « Réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques Directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil ».
Concrètement, la note d’analyse évalue les réductions d’émissions que doivent réaliser les États membres pour respecter leurs engagements pour 2020-2029 et estime l’effort de réduction encore nécessaire, pour ceux ne les respectent pas, en pourcentage de leurs niveaux d’émissions de 2020. Enfin, il évalue les progrès réalisés en vue de respecter les engagements nationaux de réduction des émissions plus stricts fixés pour 2030 et au-delà (engagements dits post-2030).
Etat des lieux des progrès réalisés par les Etats membres pour respecter leurs engagements de réduction des émissions sur la période 2020-2029
En 2020, 13 Etats membres (dont la France) ont respecté leurs engagements de réduction fixés pour la période 2020-2029 pour l’ensemble des cinq polluants visés
État d’avancement, en 2020, de la réalisation des engagements de réduction des émissions pour 2020-2029 par polluant :
- NH3: 16 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements en 2020, tandis que 11 États membres doivent encore réduire leurs émissions,
- COVNM: 24 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements en 2020,
- NOx: 25 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements en 2020,
- PM2,5: 25 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements en 2020,
- SO2: 26 États membres (dont la France) ont respecté leurs engagements en 2020. Un seul Etat membre (Chypre) doit réaliser davantage d’efforts de réduction.
L’AEE souligne que pour le NH3, 40% des Etats membres ont dépassé leurs engagements de réduction en 2020. C’est le polluant pour lequel le plus faible nombre d’Etats membres ont respecté leurs engagements.
Les efforts à consentir pour respecter les engagements de réduction nationaux pour la période 2020-2029
L’AEE note que, malgré une tendance globale à la baisse des émissions des Etats membres, davantage d’efforts doivent être consentis par les Etats membres pour respecter leurs engagements de réduction nationaux fixés pour la période 2020-2029 par la directive NEC 2.
Focus par polluant
NH3
Onze États membres devront réduire davantage leurs émissions de NH3 pour respecter leurs engagements nationaux de réduction des émissions pour la période 2020-2029. La Lituanie doit réduire ses émissions de 12% par rapport aux niveaux de 2020, tandis que 10 États membres doivent réduire leurs émissions de NH3 de 10% au maximum. La principale source d’émissions de NH3 dans l’UE-27 est l’agriculture, un secteur qui a été moins touché par les restrictions de mobilité et d’activités pendant les confinements mis en place pour limiter la propagation du Covid-19, ce qui implique que les émissions de 2020 sont restées relativement stables. L’AEE rappelle enfin que dans plusieurs États membres, les émissions de NH3 n’ont que légèrement diminué, ou, dans certains cas, ont augmenté, depuis 2005.
COVNM
Trois États membres (Irlande, Lettonie et Pologne) doivent réaliser des réductions d’émissions de COVNM comprises entre 10 et 30% par rapport aux niveaux de 2020 pour respecter leurs engagements 2020-2029.
NOx
Deux États membres (Lituanie et Roumanie) doivent consentir davantage d’efforts de réduction pour respecter leurs engagements 2020-2029 : pour la Lituanie, les réductions d’émission nécessaires sont de 33% par rapport au niveau de 2020 alors que pour la Roumanie, elles sont de 4%. Toutefois, souligne l’AEE, le secteur du transport routier est la principale source des émissions de NOx. En 2020, les mesures de confinement mises en place pour endiguer le Covid-19 ont entraîné une baisse significative des niveaux d’émission du trafic routier, ce qui a pu aider les États membres à respecter leurs engagements en matière de réduction d’émissions de NOx pour 2020. Il s’agit probablement d’un effet à court terme uniquement : les émissions de NOx sont reparties à la hausse une fois que les confinements ont pris fin et que les niveaux de trafic ont augmenté de nouveau. Ces tendances à la hausse seront très probablement reflétées dans le bilan 2022 de l’AEE.
PM2,5
Deux États membres (Roumanie et Hongrie) doivent consentir davantage d’efforts de réduction pour respecter leurs engagements 2020-2029 : pour la Roumanie, les réductions d’émission nécessaires sont de 22% par rapport au niveau de 2020 alors que pour la Hongrie, elles sont de 5%.
L’AEE souligne que la principale source d’émissions de PM2,5 est la consommation de combustibles solides dans le secteur résidentiel-tertiaire. Des émissions importantes proviennent également de l’industrie manufacturière et extractive et du transport routier, notamment des moteurs à combustion interne et de l’abrasion des pneus et des freins des véhicules thermiques et électriques. Compte tenu de ces différentes sources, l’impact des mesures de confinement suite au Covid-19 sur les émissions de PM2,5 a été plus complexe que pour les NOx. Alors que les émissions dues au trafic ont diminué, l’AEE a constaté dans certaines régions une augmentation des émissions de PM2,5 dues à la combustion de charbon ou de bois pour le chauffage résidentiel individuel, les citoyens ayant passé plus de temps chez eux.
SO2
Tous les États membres sauf un (Chypre) ont respecté leurs engagements 2020-2029. Pour se conformer à son engagement, Chypre doit réduire ses émissions de SO2 de 45% par rapport à son niveau de 2020.
Les efforts à consentir pour respecter les engagements de réduction nationaux pour la période post-2030
Tous les Etats membres (hormis la Belgique et l’Estonie) devront réduire leurs émissions d’au moins un des cinq polluants visés pour respecter leurs engagements post-2030. Les polluants les plus problématiques sont le NH3, les NOx et les PM2,5.
Focus par polluant
NH3
En 2020, cinq États membres ont déjà respecté leurs engagements de réduction des émissions post-2030. Pour 11 États membres (dont la France), les réductions nécessaires sont inférieures à 10%, et 11 autres doivent réduire leurs émissions de 10 à 30%, par rapport à leurs niveaux d’émission de 2020.
La deuxième édition des Perspectives en matière d’air propre (Second Clean Air Outlook) de la Commission européenne, publiée le 8 janvier 2021 (lire notre article), a conclu que les mesures prévues par les États membres dans leurs premiers programmes nationaux de lutte contre la pollution atmosphérique (NAPCP – voir encadré ci-dessous) ne suffiront pas à réduire les émissions de NH3 à un niveau nécessaire pour respecter leurs engagements post-2030 et que des mesures supplémentaires doivent être mises en place. La Commission actualisera son évaluation des perspectives de respect par les États membres des engagements de réduction des émissions en 2030 pour tous les principaux polluants dans la troisième édition (Third Clean Air Outlook) qui sera publiée d’ici fin 2022.
PM2,5
En 2020, sept Etats membres ont déjà respecté leurs engagements de réduction des émissions post-2030 alors que deux Etats membres (Hongrie et Roumanie) devront réduire de plus de 50% leurs émissions de PM2,5, par rapport à leurs niveaux d’émission de 2020, pour respecter leurs engagements. Quant à la France, la réduction supplémentaire nécessaire, par rapport à 2020 est inférieure à 10%.
NOx
En 2020, sept Etats membres ont déjà respecté leurs engagements de réduction des émissions post-2030. Pour plusieurs des autres 20 Etats membres, la réduction nécessaire est importante : pour sept d’entre eux, elle est de plus de 30% par rapport aux niveaux de 2020. En ce qui concerne la France, la réduction supplémentaire nécessaire se situe entre 10 et 30%.
COVNM
En 2020, 13 Etats membres (dont la France) ont déjà respecté leurs engagements de réduction des émissions post-2030 alors que pour 10 Etats membres, la réduction nécessaire est comprise entre 10 et 30%, par rapport à leurs niveaux d’émission de 2020.
SO2
La situation concernant le SO2 est globalement plus positive. Trois Etats membres devront réduire leurs émissions dans une fourchette comprise entre 10 et 30%, par rapport à leurs niveaux d’émission de 2020. La France a déjà respecté en 2020 son engagement de réduction des émissions de SO2 post-2030.
Tableau de synthèse de la performance des Etats membres au regard de leurs engagements de réduction
Réductions nécessaires par Etat membre et par polluant (en %) pour respecter leurs engagements de réduction pour la période 2020-2029 et pour la période post-2030 (au titre de la directive NEC 2), par rapport à leur niveau d’émission de 2020
Le tableau ci-après montre les efforts nécessaires par Etat membre et par polluant, par rapport aux niveaux d’émission de 2020, pour respecter leurs engagements de réduction. La réduction nécessaire est calculée comme étant l’écart en pourcentage entre les émissions que les Etats membres ont rapportées pour l’année 2020 et les engagements pour la période 2020-2029 ou ceux pour la période post-2030.
L’AEE a réparti les Etats membres en cinq groupes :
- les Etats membres dont les niveaux d’émission sont en dessous de leur engagement de réduction : ✔ (dans le tableau)
- les Etats membres qui doivent réduire leurs émissions de moins de 10% par rapport aux niveaux de 2020 : •
- les Etats membres qui doivent réaliser des réductions comprises entre 10 et 29,9% : •
- les Etats membres qui doivent réaliser des réductions comprises entre 30 et 49,9% : •
- les Etats membres qui doivent réduire leurs émissions de plus de 50% : •
Source : AEE, 11 juillet 2022.
En savoir plus
Voir la note d’analyse de l’AEE
Voir données d’émission par Etat membre 1990-2020 (page interactive).
Voir l’outil de suivi des politiques et mesures mises en place pour réduire les émissions de polluants atmosphériques
Lire aussi notre dossier de fond « Bilan provisoire de la mise en œuvre de la directive (UE) 2016/2284 Réduction des émissions nationales de certains polluants Directive dite NEC 2 », publié le 20 juillet 2020.
La directive NEC-2
La directive (UE) 2016/2284 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques (dite NEC 2) (lire notre dossier de fond sur le sujet) est venue réviser la directive 2001/81/CE relative aux plafonds d’émission nationaux, dite directive NEC 1. La directive NEC 2 étend la période de la directive NEC 1 de 2020 initialement à 2030 et au-delà. De plus, elle aligne le droit de l’UE sur les engagements découlant de la révision du Protocole de Göteborg adoptée le 4 mai 2012 (lire notre article sur le sujet). Entrée en vigueur : 31 décembre 2016, Date limite de transposition : 1er juillet 2018 (date à laquelle la directive NEC 1 a été abrogée).
Les engagements nationaux de réduction
La directive NEC 2 oblige les Etats membres à limiter leurs émissions anthropiques annuelles de cinq polluants : SO2, NOx, NH3, COVNM et PM2,5 conformément aux engagements nationaux de réduction fixés à l’annexe II de la directive (article 4). Ces engagements portent sur deux échéances : 2020 et 2030. Cela signifie que les engagements 2020 doivent être respectés sur l’ensemble de la période 2020-2029 (au moins).
Contrairement à la première directive NEC (directive 2001/81/CE), ces engagements ne sont pas des plafonds (en kt), mais des objectifs relatifs de réduction (en % par rapport à l’année de référence 2005). A noter qu’afin de garantir la continuité dans l’amélioration de la qualité de l’air, les plafonds d’émission nationaux établis par la directive 2001/81/CE ont continué de s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2019.
Les Etats membres doivent également prendre les mesures nécessaires visant à limiter leurs émissions anthropiques des cinq polluants de l’année 2025. Le niveau indicatif de ces émissions est déterminé par une trajectoire de réduction linéaire entre leurs niveaux d’émission définis par les engagements de réduction des émissions pour 2020 et les niveaux d’émission définis par les engagements de réduction des émissions pour 2030. La directive autorise les Etats membres à suivre une trajectoire de réduction non linéaire si celle-ci est plus efficace d’un point de vue économique ou technique, et à condition qu’à partir de 2025, elle converge progressivement vers la trajectoire de réduction linéaire et ne compromette pas les engagements de réduction des émissions pour 2030.
Engagements nationaux de réduction fixés pour la France (année de référence : 2005) (cf. annexe II)
Ces engagements ont été repris dans le plan national de réduction des émissions de polluants (PREPA), adopté le 10 mai 2017 (lire notre article sur le sujet).
Les programmes nationaux de lutte contre la pollution de l’air
Les Etats membres sont tenus d’élaborer et de mettre en œuvre un programme national de lutte contre la pollution de l’air, (National Air Pollution Control Programmes ou NAPCP), dont le contenu minimal est défini à l’annexe III. Les Etats membres devaient soumettre leur premier programme national avant le 1er avril 2019. Celui-ci est à mettre à jour au minimum tous les quatre ans par la suite (article 6). La France a transmis (avec six mois de retard) son premier NAPCP en octobre 2019.