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Au premier sommet sur les Océans, les sujet air et climat à l’ordre du jour

  • Réf. : 2022_02_a04
  • Publié le: 17 février 2022
  • Date de mise à jour: 28 février 2022
  • International

Le premier Sommet international sur l’Océan (One Ocean Summit), initiative de la France dans le cadre de la présidence française du conseil de l’Union européenne, s’est tenu à Brest du 9 au 11 février. Il a été organisé en coopération avec les Nations Unies, la Banque mondiale et de nombreux partenaires publics et privés. Ce sommet avait pour objectif de donner une impulsion politique forte sur la question des océans, et notamment des enjeux liés au changement climatique, en amont de la Conférence des Nations-Unies sur l’Océan qui se tiendra fin juin 2022 à Lisbonne. Le sommet, qui a porté à la fois sur les enjeux scientifiques, économiques et politiques, a rassemblé 42 pays (1).

 

L’Océan, un sujet de plus en plus abordé lors des COP

Le sujet des océans ne fait pas partie des négociations formelles au sein de la CCNUCC mais depuis la COP-23, il fait l’objet d’une plus grande attention. Lors de la COP-23 en 2017, le Partenariat Voies océaniques (Ocean Pathway) avait été lancé à l’initative des Iles Fidji qui présidaient cette COP. Il avait pour objectif de renforcer, avant 2020, l’action climat et le financement climat en lien avec une amélioration de l’état des océans, et d’intégrer la problématique des océans dans le processus CCNUCC. En 2019, la présidence chilienne de la COP-25 avait décidé d’axer celle-ci sur le rôle joué par les océans dans la lutte contre le changement climatique, en en faisant une « COP bleue ». Elle a porté une attention particulière au 3e rapport spécial du GIEC du 6e cycle d’évaluation, sur les océans et la cryosphère, publié le 25 septembre 2019 (lire notre brève), et avait demandé au SBSTA de lancer, lors du SBSTA-52, un dialogue sur les océans et le changement climatique afin de réfléchir à la question de savoir comment renforcer l’atténuation et l’adaptation dans ce contexte (décision 1/CP.25, § 31). Cependant, lors de la session du SBSTA de mai-juin 2021 (lire notre article), ce dialogue n’a pas été lancé. Enfin, lors de la 6e journée de la COP-26, le 5 novembre 2021 (lire notre article), a eu lieu un événement ministériel intitulé « Un appel à l’action en faveur des océans – vers une remise en état et la résilience des océans ».

 

Le Sommet a principalement porté sur les enjeux scientifiques, la biodiversité marine et les effets du changement climatique sur l’océan. Il a aussi été l’occasion d’une déclaration (« les engagements de Brest pour l’Océan ») qui présente des nouveaux engagements mais rappelle beaucoup d’engagements déjà existants :

  • Aires marines protégées: rappel de la Coalition de la Haute Ambition pour la Nature et les Peuples lancée lors du One Planet Summit de janvier 2021 (30 nouveaux pays l’ont rejoint, amenant leur nombre à 84) portant l’objectif de protéger 30 % des terres et des mers du monde d’ici à 2030 ;
  • Pêche durable: lancement par les pays présents au Sommet de la Coalition de la Haute ambition pour un traité de la Haute mer visant à conclure, en 2022, d’un accord mondial sur l’utilisation durable de la haute mer et la protection de sa biodiversité ; engagement de 14 pays de renforcer la lutte contre la pêche illégale ;
  • Transport maritime: engagement de 22 armateurs européens dans le nouveau label Green Marine Europe ; engagement de 35 acteurs (dont des ports) pour accélérer la fourniture d’électricité aux navires en escale pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques ; engagement des pays méditerranéens et de l’UE à demander à l’OMI (Organisation maritime internationale) la création d’une zone à faibles émissions de soufre sur toute la Méditerranée au 1er janvier 2025 ;
  • Carbone bleu : lancement d’une coalition internationale pour le carbone bleu portée par la France et la Colombie, visant à contribuer au financement de la restauration d’écosystèmes côtiers, sur la base de méthodologies communes et rigoureuses ;

 

L’éclairage du Citepa

Le carbone bleu

Les mers et océans ont la capacité de séquestrer et de stocker du carbone, notamment dans les fonds marins sédimentaires mais aussi dans les écosystèmes marins et littoraux (algues, mangroves…), comme l’avait montré en 2009 un rapport de référence sur le sujet sous l’égide du PNUE et de la FAO (Organisation des Nations-Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture) : Blue carbon : the role of healthy oceans in binding carbon (Nelleman et al., 2009). Ce « carbone bleu » n’est généralement pas comptabilisé dans les inventaires nationaux d’émissions de gaz à effet de serre, qui se concentrent sur les flux de carbone des terres gérées. En France, le rapport EFESE (2020) sur les services écosystémiques avait proposé des premières quantifications des stockages de carbone dans les eaux territoriales françaises.

Néanmoins, dans le contexte des objectifs de neutralité carbone portés par les Etats, territoires et entreprises, tous les moyens de générer des émissions négatives (absorptions de CO2) sont étudiés avec attention : la biomasse terrestre (forêts, haies…), les sols, les techniques de captage et stockage du carbone (CSC ou CCS en anglais)… et le carbone bleu.

Lire notre article : l’essor du carbone bleu ? 

 

  • Pollution aux plastiques: Engagement total de 4 Md € de la Banque européenne de reconstruction et de développement a rejoint la Banque européenne d’investissement et les banques de développement française (AFD), allemande (KfW), italienne (CDP), espagnole (ICO)dans le cadre de Clean Oceans Initiative pour réduire la pollution plastique en mer ; engagement de l’Inde et de la France sur une nouvelle initiative à visée multilatérale sur l’élimination de la pollution due au plastique à usage unique ;
  • Agenda international: Pour confirmer cette dynamique et construire un agenda international océanique ambitieux, la France et le Costa-Rica ont proposé d’organiser ensemble en 2024 la prochaine conférence des Nations Unies sur l’Océan ;
  • Science: l’UE s’est engagée à se doter d’un modèle numérique de l’océan, utilise à l’intégration des données et au test de scénarios ; L’Unesco s’est engagée à ce qu’au moins 80 % des fonds marins soient cartographiés d’ici 2030.

 

Si certaines questions économiques étaient à l’ordre du jour, comme les enjeux pour les ports, la pêche durable, elles n’ont pas donné lieu à d’importants échanges. Certaines questions ont ainsi été écartées, comme la fin de certaines pratiques de chalutage affectant les fonds marins (évoquée par le président colombien) ou l’abandon de projets d’exploitation de ressources minérales dans les grands fonds.

 

En savoir plus

Site du Sommet

Communiqué du Ministère de la Transition Ecologique

Discours du Président de la République

Engagements de Brest pour l’Océan

L’océan, un garde-fou climatique J.P. Gattuso & A.K. Magnan, dans la revue Polytechnique Insights

Océans et changement climatique

Les océans sont au cœur des enjeux climatiques – ceux-ci jouent en effet un rôle majeur dans le cycle du carbone à l’échelle global, entre atmosphère et biosphère, en absorbant une partie du CO2 atmosphérique et jouant un rôle de régulateur. D’une part, ils participent à séquestrer du CO2 hors de l’atmosphère. En effet, ils participent activement au cycle du carbone, et une importante partie des émissions de CO2, des activités humaines vers l’atmosphère, sont ensuite recaptées par les océans, en plus de la biosphère. D’après le rapport spécial du Giec sur les Océans et la cryosphère (2019), les océans ont absorbé plus de 90% de la chaleur excédentaire du système climatique, et ils ont absorbé 20 à 30% des émissions anthropiques de CO2 depuis les années 1980, ce qui a entraîné son acidification. D’autre part, ils constituent un important stock de carbone. Tout comme les sols et la biomasse terrestre, les fonds marins et la biomasse sous-marine contiennent des quantités de carbone. Les sédiments marins constitueraient même le plus grand réservoir de carbone organique de la planète : lorsqu’ils ne sont pas perturbés, ce carbone peut rester stocké plusieurs milliers d’années.

En décembre 2019, un rapport de l’IUCN (International Union for Conservation of Nature) alertait sur le risque de désoxygénation (baisse de la teneur en oxygène dans l’eau), qui a déjà commencé en 2021 dans les zones de profondeur moyenne (abritant la majorité des espèces pêchées) et qui d’ici 2080 pourrait affecter 70% des océans et ce même si les émissions de CO2 étaient arrêtées.

En novembre 2021, une étude proposait une synthèse de l’état des connaissances sur le rôle de l’Océan dans le cycle du carbone, la température mondiale, et la nécessité d’accroitre l’ambition politique en ce domaine : Laffoley, D., et al. (2022). The forgotten ocean: Why COP26 must call for vastly greater ambition and urgency to address ocean change. Aquatic Conservation: marine and freshwater ecosystems, 32(1), 217-228. Consulter.

Note

  1. Allemagne, la Barbade, Canada, Chine, Chypre, Colombie, Comores, Congo, Corée du Sud, Costa-Rica, Côte d’Ivoire, Croatie, Égypte, Espagne, États-Unis, France, Gabon, Ghana, Grèce, Inde, Irlande, Islande, Italie, Japon, Madagascar, Malte, Maroc, Mexique, Monaco, Namibie, Norvège, Palaos, Panama, Papouasie-Nouvelle Guinée, Portugal, Royaume-Uni, Sénégal, Seychelles, Tanzanie, Tonga, Tunisie.

 

 

 

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