Le Ministère de l’Agriculture adopte un plan d’actions pour réduire les émissions de NH3 de l’épandage
Le 31 mars 2021, le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation (MAA) a annoncé l’adoption, en janvier 2021, d’un plan d’actions ministériel visant à supprimer l’utilisation des matériels les plus émissifs en 2025 (dit plan matériels d’épandage moins émissifs ou PMEE). Ce nouveau plan vise tout particulièrement à réduire les émissions d’ammoniac (NH3) du secteur de l’agriculture, de loin le premier secteur émetteur de ce polluant en France (voir éclairage du Citepa ci-dessous).
Les travaux relatifs à ce plan d’actions ont été lancés fin novembre 2019 par le MAA et par le Ministère de la Transition écologique (MTE), en s’appuyant sur un groupe de concertation « gestion des éléments nutritifs et émissions vers le milieu » (GENEM).
Un plan prévu initialement en 2018 par le PREPA
Le Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA, adopté le 10 mai 2017 et couvrant la période 2017-2021) définit par secteur un certain nombre d’actions à mettre en œuvre pour atteindre les objectifs qu’il fixe pour les cinq polluants visés (dont le NH3) (voir éclairage du Citepa ci-dessous). Pour le secteur de l’agriculture, le PREPA prévoyait notamment la mise en place, avant fin 2018, d’un « plan d’actions pour assurer l’utilisation de matériels moins émissifs (pendillards, injecteurs) ou l’enfouissement des effluents, dans des délais adaptés, en distinguant les différents types d’effluents et leurs caractéristiques, ainsi que la nature et la taille des élevages, dans la perspective de supprimer l’utilisation des matériels les plus émissifs à l’horizon 2025 » (source : annexe de l’arrêté du 10 mai 2017 établissant le PREPA). Le PMEE a ainsi été adopté avec plus de deux ans de retard par rapport à l’échéance fixée par le PREPA.
Le PMEE se positionne par ailleurs dans la continuité des guides de bonnes pratiques agricoles existants aux échelles :
- internationale: dans le cadre de la Convention internationale sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance (CLRTAP et du Protocole de Göteborg relatif à a la réduction de l’acidification, de l’eutrophisation et de l’ozone troposphérique) : Framework Code for Good Agricultural Practice for Reducing Ammonia Emissions, publié en 2015 ; Guidance Document on Integrated Sustainable Nitrogen Management, adopté le 18 décembre 2020 ; et
- française: Guide de bonnes pratiques pour l’amélioration de la qualité de l’air (finalisé en juillet 2019), guide rédigé par le Citepa pour le compte de l’Ademe. (Voir étude complète et synthèse).
Le PMEE couvre la période 2020-2025.
Que contient le plan matériels d’épandage moins émissifs (PMEE) ?
L’ensemble du plan inclut :
- un diagnostic, qui réalise un état des lieux du parc matériels d’épandage des effluents existant dans les différentes régions françaises et des pratiques associées. Ce diagnostic permet également d’identifier les matériels agricoles et les pratiques associées réduisant le plus les émissions d’ammoniac ainsi que de caractériser et hiérarchiser les équipements d’épandage jugés comme étant les moins/plus émissifs ;
- une analyse Atouts – Faiblesses – Opportunités – Menaces et une analyse des besoins sur la base du diagnostic ;
- un plan d’actions pour répondre aux besoins identifiés, sous forme de 10 fiches-actions, couvrant quatre axes de travail (recherche et développement, formation ; volet financier ; volet réglementaire ; amélioration des inventaires). Pour chacune des actions, un pilote référent a été nommé et des indicateurs ont été définis.
Prochaines étapes
Il s’agit désormais de mettre en œuvre le PMEE de façon opérationnelle sur le terrain, au travers la réalisation des travaux prévus dans les fiches-actions du plan.
L’éclairage du Citepa
L’agriculture et les émissions de NH3 en France
Le NH3 (ammoniac) est un précurseur de particules secondaires : il réagit avec les composés acides tels que les oxydes d’azote ou de soufre (émis par d’autres secteurs d’activité anthropiques) pour former par nucléation des particules fines (PM2,5) de nitrate ou de sulfate d’ammonium. Ceci renforce donc l’impact de l’ammoniac sur la santé. Il contribue également à l’acidification et à l’eutrophisation des milieux (excès de dépôts d’azote).
En 2019, selon l’inventaire national élaboré par le Citepa pour le MTE, les émissions nationales de NH3 sont estimées, hors UTCATF, à 593 kt. En 2019, le secteur de l’agriculture a contribué à 93,4% du total des émissions nationales d’ammoniac.
Evolution et répartition des émissions de NH3 en France métropolitaine
(Source : Citepa, Inventaire national au format CEE-NU, mars 2021).
Les émissions issues des pratiques d’épandage représentent 46% des émissions totales du secteur de l’agriculture en 2019 (28% liées à l’application des engrais minéraux, 18% à l’application d’engrais organiques). En plus de conduire à l’acidification et à l’eutrophisation des milieux naturels, l’ammoniac peut se recombiner dans l’atmosphère avec des oxydes d’azote et de soufre pour former des particules fines contribuant ainsi aux pics de particules fines au début du printemps. (Source : Citepa, Inventaire national au format CEE-NU, mars 2021).
Plusieurs instruments législatifs et politiques aux niveaux international, européen et national ont fixé des objectifs de réduction des émissions de NH3 de la France :
– le Protocole de Göteborg (1999, amendé en 2012 mais non encore ratifié par la France) : objectif de -4% en 2020 par rapport à 2005 (soit un plafond calculé de 596 kt) ;
– la directive dite NEC 2 (directive 2016/2284 concernant la réduction des émissions nationales de certains polluants atmosphériques et révisant la directive NEC 1) : objectif de -4% en 2020 par rapport à 2005 et objectif de -13% en 2030 par rapport à 2005 ;
– le Plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (PREPA, 2017) qui reprend les objectifs fixés par la directive NEC 2 pour la France en 2020 et 2030 et ajoute un objectif intermédiaire pour la période 2025-2029 de -8% (base 2005) ;
– le décret n°2017-949 du 10 mai 2017 fixant les objectifs de réduction à horizon 2020, 2025 et 2030 pour les cinq polluants (dont le NH3) visés par le PREPA ;
– l’arrêté du 10 mai 2017 établissant le PREPA.
Evolution des émissions de NH3 en France [1990-2018] au regard des objectifs de réduction internationaux, européens et nationaux
L’objectif à atteindre en 2020 est de 596 kt : en 2019, le niveau d’émission national s’élevant à 593 kt, il est donc en bonne voie d’être respecté, à condition de ne pas dépasser le niveau actuel d’émission.
(Source : Citepa, Inventaire national au format CEE-NU, mars 2021).
En savoir plus
Communiqué du Ministère de l’Agriculture comportant des liens vers le PMEE et un diagnostic complet qui s’appuie notamment sur les données d’émission du Citepa.
Le chapitre de l’édition 2020 du rapport d’inventaire Secten du Citepa consacré à l’agriculture et à la sylviculture.
Visualiser les données d’émissions de NH3 en France en ligne
Rapport d’inventaire CEE-NU, édition 2021.