Dernière session de la CCC : la prise en compte des propositions initiales jugées très insuffisante
Après 17 mois de travaux, la huitième et dernière session de travail de la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC) s’est tenue en visio-conférence du vendredi 26 au dimanche 28 février 2021. L’objectif de cette session était de produire un avis sur les réponses apportées par le Gouvernement à ses propositions, et notamment le projet de loi Climat et Résilience qui reprend partiellement une série des propositions de la CCC, mais aussi la loi de finances 2021 et le plan de relance, ou via d’autres actions réglementaires ou de politique européenne et internationale. D’après le décompte du gouvernment, sur les 149 propositions initiales de la CCC, 75 seraient déjà en place et 17 en cours de mise en œuvre. Cet avis final était prévu dès l’origine de la création de la CCC : la lettre de mission du Premier Ministre du 2 juillet 2019 indiquait que la CCC « pourra […] exprimer un avis sur les réponses du gouvernement ».
La réponse du gouvernement aux propositions initiales a été analysée sous deux angles : le degré de reprise des propositions (mise en œuvre totale, partielle, très partielle…) et l’équivalence des effets d’après leur formulation juridique.
Analyse du groupe d’appui : degré de mise en œuvre des propositions
Le groupe d’appui de la CCC (groupe d’experts, formé par le comité de gouvernance) a classé chacune des propositions (ou des éléments des propositions) selon quatre grandes catégories : vert (mis en œuvre ou déjà existant) ; orange (partiellement mis en œuvre) ; jaune (mesure substituée par une autre ; mesure dépendant d’une autre instance ; non mis en œuvre mais demande difficile ; non vérifiable) ; rouge (non mis en œuvre, très partiellement mis en œuvre ; « joker » présidentiel).
D’après notre décompte, la majorité des propositions (43%, 66 éléments) sont classées dans la catégorie orange (partiellement mis en œuvre), suivi par la catégorie verte (25%, 39 éléments). 28 éléments (18%) sont classés dans la catégorie rouge.
Analyse du comité légistique : degré d’équivalence juridique
A cela s’ajoute une analyse du comité légistique de la CCC (groupe mandaté par le comité de gouvernance du CCC, composé surtout de membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE), visant à transcrire, dans des termes propres à la loi, les propositions). Il s’agit d’analyser si la formulation, en termes juridiques, était similaire ou non entre les mesures du gouvernement et les propositions initiales ; et si la portée juridique était similaire ou non. Il en ressort une classification en deux grandes catégories : « effet équivalent » (parfois sous réserve) ou « différences » (sur l’objet de la mesure, sur la nature des effets, sur le champ d’application, sur les seuils, sur le calendrier).
D’après notre décompte, la majorité des propositions présente des différences (39 propositions sur 77 éléments étudiés) ; 16 présentent un effet équivalent ; et 10 présentent un effet globalement équivalent, certaines avec des différences toutefois.
L’analyse des types de différences (pour les propositions de la catégorie « différences » et « effet globalement équivalent ») montre que les différences d’objet de la mesure et de champ d’application sont les plus représentées.
Une prise en compte très insuffisante selon les membres de la CCC
Les membres de la CCC (119 présents sur 150) étaient appelés à un vote (de 0 à 10) sur la prise en compte de chacune de leurs propositions. Ils considèrent, en majorité, que les mesures du gouvernement sont insuffisantes au regard de l’objectif de réduction de 40% des émissions de GES entre 1990 et 2030 (par rapport aux niveaux de 1990). La plupart des mesures ont obtenues une note inférieure à la moyenne (5/10), avec 3,4/10 en moyenne pour la thématique « se loger », 3,7/10 en moyenne pour les thématiques « produire et travailler », « se nourrir » et « se déplacer » ; 4/10 pour « consommer » et 4,1/10 pour les propositions relevant de la gouvernance. Il faut souligner que sur les 119 votes, un bloc de 15 à 20 membres ont quasi systématiquement voté zéro.
Prochaines étapes
La CCC a définitivement terminé ses travaux à la clôture de cette 8e et ultime session. L’association des 150, fondée par les membres de la CCC pour poursuivre leur engagement sur le sujet, pourra néanmoins continuer de suivre le devenir de leurs propositions. La vocation de la CCC ayant été purement consultative, il appartient désormais au Parlement de débattre, puis d’adopter ou non, les 69 articles du projet de loi Climat et Résilience (dont le nom complet est Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets).
Le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce projet de loi le 10 février 2021. Prévue par l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, elle permet au Gouvernement d’accélérer les délibérations parlementaires sur certains projets ou propositions de loi (une lecture du texte par chambre du Parlement avant d’être adopté, ce qui réduit donc la navette parlementaire à une unique transmission du texte). Une commission spéciale, composée de 71 membres et chargée de l’examen du projet de loi, a déjà auditionné des membres de la CCC par thématique, des représentants des collectivités, des partenaires sociaux et des ONG, ainsi que les Ministres concernés (la Ministre de la Transition écologique en tête). Du 8 au 19 mars 2021, les membres de la commission spéciale vont examiner les quelque 5 000 amendements déposés et décider si elles sont recevables ou non. Ensuite, du 29 mars au 9 avril 2021, les députés débattront du projet de loi en séance plénière, après quoi il sera soumis au Sénat pour délibération.
En savoir plus
Le programme de la 8e session de la CCC
L’analyse juridique du projet de loi d’après le comité légistique de la CCC
Le tableau du groupe d’appui de la CCC
Le dossier législatif du projet de loi climat et résilience (Assemblée nationale)