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NO2 : la Commission renvoie six Etats membres (dont la France) devant la CJUE

  • Réf. : 2018_05_a1
  • Publié le: 1 mai 2018
  • Date de mise à jour: 20 mai 2019
  • France
  • UE

Le 17 mai 2018, la Commission européenne a annoncé qu’elle allait saisir le jour même la Cour de Justice de l’UE (CJUE) contre six Etats membres (dont la France) pour :

Contexte

Les VLC fixées par la directive 2008/50/CE sont :

  • 40 µg/m3 en moyenne annuelle,
  • 200 µg/m3 en moyenne horaire, à ne pas dépasser plus de 12 fois par année civile [annexe XI].

Ces VLC sont juridiquement contraignantes depuis le 1er janvier 2010 et devaient donc être respectées à cette échéance. Cependant, la directive autorise les Etats membres à reporter ce délai jusqu’au 1er janvier 2015 au plus tard à condition qu’un plan relatif à la qualité de l’air soit établi pour la zone de dépassement des VLC à laquelle le report de délai s’appliquerait (article 22.1) .

Ces plans doivent prévoir des mesures appropriées pour que la période de dépassement soit la plus courte possible ( article 23.1). Le contenu minimal de ces plans est fixé en annexe (annexe XV, section A et article 24). Les Etats membres concernés devaient soumettre ces plans à la Commission le plus rapidement possible, et au plus tard deux ans après la fin de l’année au cours de laquelle le premier dépassement a été constaté.

La saisine de la CJUE constitue la 3 e étape de la procédure d’infraction formelle établie par le Traité sur le fonctionnement de l’UE [TFUE, article 258 ] . Elle fait suite aux avis motivés [2e étape de la procédure] adressés par la Commission aux neuf Etats membres [dont la France] convoqués au sommet ministériel sur la qualité de l’air du 30 janvier 2018 (lire notre article sur ce sujet).

En ce qui concerne la France , où 12 zones de qualité de l’air sont aujourd’hui concernées, le renvoi devant la CJUE vise le non-respect de la VLC du NO 2 en moyenne annuelle (comme pour l’Allemagne et le Royaume-Uni).

Pour la Hongrie , l’Italie et la Roumanie , le recours vise les concentrations élevées persistantes de PM10.

Selon le Commissaire européen à l’Environnement, Karmenu Vella, « les Etats membres qui sont aujourd’hui renvoyés devant la Cour se sont vu accorder suffisamment de ‘dernières chances’ d’améliorer la situation au cours des 10 dernières années […] mais une action en justice seule ne résoudra pas le problème« . Pour cette raison, il insiste sur l’aide concrète que peut apporter la Commission aux autorités nationales pour soutenir leurs efforts déployés afin d’améliorer la qualité de l’air en milieu urbain.

Quant aux trois autres Etats membres initialement visés par la Commission [Espagne , République tchèque et Slovaquie] , selon celle-ci, les mesures mises en place ou prévues qui lui ont été communiquées à la suite du sommet ministériel sur la qualité de l’air du 30 janvier 2018, «  semblent être de nature à pouvoir remédier aux insuffisances constatées, à condition qu’elles soient correctement mises en œuvre « .

Enfin, la Commission a publié une communication présentant les mesures disponibles pour aider les Etats membres à lutter contre la pollution atmosphérique. La Commission souligne par ailleurs la nécessité de renforcer la coopération avec les Etats membres en engageant de nouveaux  » Dialogues bilatéraux sur l’air propre  » (lire notre article sur ce sujet) avec les autorités nationales compétentes et en utilisant les fonds de l’UE pour financer des mesures de réduction des émissions.

Focus France : évolution des concentrations de NO2 et réaction du Gouvernement

La moyenne annuelle des concentrations en NO2 a diminué de façon progressive depuis 2000 pour tous les types de stations confondus [fond urbain, fond rural, à proximité d’industries et à proximité du trafic routier] . En 2016, la moyenne annuelle en fond urbain était de 19 µg/m 3  (27 µg/m 3  en 2000) et celle à proximité du trafic routier était de 39 µg/m 3   (50 µg/m 3 en 2000). Ainsi, à proximité du trafic routier, les concentrations moyennes annuelles sont deux fois plus élevées qu’en fond urbain (source : MTES, pollution de l’air par les NOx , 23/10/2017).

La Commission note que les concentrations annuelles déclarées en 2016 ont atteint 96 µg/m 3 à Paris [82 µg/m 3 à Stuttgart (Allemagne) et 102 µg/m 3 à Londres (Royaume-Uni)].

France : évolution des concentrations moyennes annuelles du NO 2 (2000-2016) par rapport à la VLC de 40 µg/m 3

Source : MTES, 23/10/2017

Le graphique ci-dessus met en avant qu’il ne s’agit pas d’une problématique à l’échelle nationale, mais locale. Par ailleurs, le nombre d’agglomérations ne respectant pas les VLC pour le NO2 est passé de 24 en 2000 à 16 en 2016 ( source : MTES/CGDD/SDES, Bilan de la qualité de l’air en France en 2016, 30/10/2017, p.8 ).

Dans un communiqué publié le 17 mai 2018, le Gouvernement prend acte de la décision de la Commission européenne du même jour et confirme sa détermination à accélérer les mesures en faveur de la qualité de l’air, afin de protéger la santé des Français et de mettre fin à ce contentieux le plus rapidement possible.

Le Ministre de la Transition Ecologique et Solidaire et la Ministre chargée des Transports présenteront en juin de nouvelles mesures qui seront intégrées dans la future loi d’orientation des mobilités, en cours d’élaboration.

Prochaines étapes  : conformément au Traité sur le fonctionnement de l’UE [TFUE, article 258 ] , si la CJUE juge qu’un Etat membre a manqué aux obligations qui lui incombent au titre de la législation de l’UE, il rend un arrêt l’obligeant à prendre les mesures nécessaires pour s’y conformer. En moyenne, la CJUE rend son jugement sur les contentieux au bout de deux années.

Si malgré ce 1 er arrêt, l’Etat membre ne remédie toujours pas au problème, la Commission peut saisir une 2 e fois la CJUE [ cf. article 260 du TFUE ] , en lui demandant d’imposer, via un 2 e arrêt, des sanctions financières sur la base du montant qu’elle propose. Ces sanctions financières peuvent prendre la forme :

  • soit d’une somme forfaitaire fondée sur le temps écoulé depuis le premier arrêt,
  • soit d’une indemnité journalière [astreinte] à dater du 2e arrêt de la CJUE jusqu’à ce qu’il soit mis un terme à l’infraction .

Ces sanctions sont calculées en tenant compte :

  • de l’importance des règles violées et de l’incidence de l’infraction sur les intérêts généraux et particuliers,
  • de la période pendant laquelle le droit de l’UE n’a pas été appliqué,
  • de la capacité de paiement de l’Etat membre, garantissant l’effet dissuasif de l’amende.

Dans son 2e arrêt, la CJUE peut modifier le montant proposé par la Commission.

La Bulgarie et la Pologne déjà condamnées par la CJUE

Le 5 avril 2017, la CJUE a rendu un arrêt à l’encontre de la Bulgarie pour non-respect des VLC des PM 10 sur la période 2007-2014 et pour non-adoption, dans des plans sur la qualité de l’air, des mesures appropriées visant à réduire la période de dépassement des VLC. C’est la première fois que la CJUE a rendu un jugement pour non respect de la législation de l’UE sur la qualité de l’air [directive 2008/50/CE].

Ce cas a créé un précédent car le 22 février 2018, la CJUE a rendu un 2 e arrêt , à l’encontre de la Pologne, pour non-respect des VLC des PM 10 sur la période 2007-2015, pour non-adoption, dans des plans sur la qualité de l’air, des mesures appropriées visant à réduire la période de dépassement des VLC, et pour transposition incomplète de la directive 2008/50/CE.

Lectures essentielles

(1) Voir ED n°168 p.I.119.

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