NO2 et PM10 : le Conseil d’Etat enjoint le Gouvernement de prendre des mesures de réduction
Par décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat enjoint le Premier Ministre et le Ministre de la Transition Ecologique de prendre toutes les mesures nécessaires pour que soient élaborés et mis en œuvre, pour chacune des zones dans lesquelles les valeurs limites de concentration (VLC) étaient encore dépassées en 2015, des plans « qualité de l’air » permettant de ramener les concentrations de NO 2 et de PM 10 en dessous des VLC fixées par la directive 2008/50/CE ( annexe XI ) et ce, avant le 31 mars 2018.
Le Conseil d’Etat est la plus haute juridiction administrative publique française. Il est notamment le juge administratif suprême qui tranche les litiges relatifs aux actes des administrations.
Chronologie
- 22 juin 2015 : l’ONG « Les Amis de la Terre » demande par lettre au Président de la République, au Premier Ministre et aux Ministres de l’Environnement et de la Santé de prendre des mesures pour ramener, sur l’ensemble du territoire national, les concentrations de NO 2 et de PM 10 en dessous des VLC de la directive 2008/50/CE ;
- 3 août 2015 : cette ONG demande aux mêmes autorités d’élaborer un ou plusieurs plans « qualité de l’air » ayant pour objet de définir des mesures appropriées pour ramener, dans les zones et agglomérations concernées, les concentrations des deux polluants précités en dessous des VLC de la directive 2008/50/CE ;
- 26 octobre 2015 : après rejet de ces demandes, l’ONG saisit le Conseil d’Etat, lui demandant d’annuler ces décisions implicites de rejet [absence de réponse] .
Dans sa décision du 12 juillet 2017, le Conseil d’Etat constate d’abord pour chaque année de 2012 à 2014 :
- que dans 16 zones administratives de surveillance de la qualité de l’air [zone urbaine régionale (ZUR) RhôneAlpes, Paris, Marseille, Toulon, Nice, Rouen, Saint-Etienne, Grenoble, Lyon, Strasbourg, Montpellier, Rennes, ZUR Champagne-Ardenne, Nancy, Metz et Toulouse] , les VLC applicables au NO2 ont été dépassées; et
- que dans trois zones [ZUR Rhône-Alpes, Paris et ZUR Martinique], les VLC pour les PM10 ont été dépassées ;
Par ailleurs, le Conseil d’Etat souligne :
- qu’eu égard aux dépassements persistants observés sur 2012-2014, les PPA [ Plans de protection de l’atmosphère] établis dans les zones concernées [conformément à la directive 2008/50/CE ( 23)] et leurs conditions de mise en œuvre doivent être jugés comme insuffisants au regard des objectifs et obligations de la directive 2008/50/CE ;
- que ces PPA n’ont donc pas permis d’assurer, dans un délai raisonnable, le respect des VLC et en déduit que de nouvelles mesures doivent être prises afin que soient respectées les obligations fixées par la directive.
En conséquence, le Conseil d’Etat a annulé les décisions implicites du Président de la République, du Premier Ministre et des deux Ministres de ne pas donner suite aux demandes de l’ONG. Pour parvenir à sa décision, le Conseil d’Etat s’est appuyé sur l’arrêt de la Cour de Justice de l’UE (CJUE) du 19 novembre 2014 dans l’affaire ClientEarth.
L’arrêt de la CJUE dans l’affaire « ClientEarth«
En 2011, l’ONG ClientEarth a demandé aux juridictions britanniques d’enjoindre le Gouvernement britannique de réviser ses plans « qualité de l’air » [établis au titre de la directive 2008/50/CE] pour que soient respectées les VLC pour le NO 2 au plus tard le 1 er janvier 2015. La Cour suprême du Royaume-Uni, saisie en dernière instance, a, à son tour, saisi la CJUE le 16 juillet 2013. Dans le premier arrêt de la CJUE visant à faire appliquer la directive 2008/50/CE, rendu le 19 novembre 2014, la CJUE a souligné que le respect des VLC de NO 2 de la directive 2008/50/CE constitue une obligation de résultat.
La réponse des deux Ministres concernés
Prenant acte de la décision du Conseil d’Etat, les Ministres de la Transition Ecologique et de la Santé ont indiqué par un communiqué le 13 juillet 2017, qu’ils échangeront prochainement avec les préfets concernés, afin de définir une méthode et élaborer, d’ici mars 2018, en partenariat étroit avec les collectivités territoriales, des feuilles de route opérationnelles permettant de respecter les deux directives et de ramener les concentrations de polluants en dessous des VLC. Ces feuilles de routes devront viser les sources d’émission de tous les secteurs, en adaptant les mesures aux spécificités des zones concernées.