Chine-USA : double ratification de l’Accord de Paris
A l’occasion de leur 4e rencontre bilatérale, le 3 septembre 2016 à Hángzhōu (en Chine) en amont du sommet du G20 (voir p.3), les Présidents des deux premiers pays émetteurs de gaz à effet de serre (GES) [Xi Jinping de la Chine et Barack Obama des Etats-Unis] ont annoncé leur ratification de l’Accord de Paris. Pour formaliser cette démarche, ils ont ensuite soumis leurs instruments de ratification [acceptation dans le cas des Etats-Unis – voir plus loin] au Secrétaire-Général des Nations Unis [conformément à l’Accord de Paris (article 26)].
L’Accord de Paris entrera en vigueur 30 jours après ratification par au moins 55 Parties représentant au moins 55% des émissions mondiales de GES (article 21).
De g. à dr. : Ban Ki-moon, Xi Jinping et Barack Obama à la cérémonie de ratification sino-américaine, Hángzhōu, Chine, 03/09/2016 © ONU/Eskinder, 03/09/2016
Cette double ratification constitue une avancée politique, stratégique et diplomatique majeure vers l’entrée en vigueur rapide de l’Accord de Paris. Ainsi, elle a fait brusquement passer la quantité des émissions mondiales de GES couvertes par ces Parties de 1,08% à 39,06% (source: données officielles CCNUCC [2016], voir p.32).
Processus de ratification interne : avant l’annonce conjointe, Barack Obama avait signé un décret présidentiel le 29 août 2016 portant acceptation de l’Accord de Paris par les Etats-Unis / . De son côté, le Comité permanent de l’Assemblée populaire natio-nale de la Chine (NPC) [Parlement monocaméral chinois] avait adopté la « proposition de ratification de l’Accord de Paris » le 3 septembre 2016. Lors de la cérémonie d’ouverture de la signature de l’Accord de Paris le 22 avril 2016 , le Vice-Premier ministre de Chine, M. Gaoli Zhang, avait indiqué l’intention de son pays de ratifier l’Accord avant le sommet G20 de Hángzhōu.
Cette ratification conjointe envoie un signal politique fort aux autres grands pays émetteurs [Australie, Canada, Inde, Japon, Russie, UE,…], en donnant l’exemple. Elle fournit une nouvelle impulsion à la dynamique politique engagée en amont et lors de la COP-21 et montre que les deux plus grands émetteurs de GES souhaitent jouer un rôle moteur dans les négociations climat internationales, rôle jusque-là assumé par l’UE. Comme l’a souligné Jean-Claude Juncker, Président de la Commission européenne, le 14 septembre, « l’Europe peine aujourd’hui à montrer la voie« , étant impliquée dans son lourd processus de ratification interne qui risque de ne pas être achevé avant 2018.
En outre, les deux présidents ont déclaré qu’ils élaboreront et adopteront leurs stratégies de développement à faibles émissions de GES pour 2050, les Etats-Unis « en 2016 » et la Chine « dès que possible« . La Chine et les Etats-Unis ont également soumis, le 3 septembre 2016, leur première contribution nationale (NDC) au titre de l’Accord de Paris (article 4). Il s’agit en réalité de leurs INDC respectives [sans mise à jour, ni renforcement de leurs objectifs], comme le permet la décision 1/CP.21 (paragraphe 22) .
Ces dernières années, le climat a été au cœur des relations bilatérales Chine/Etats-Unis dans un dialogue constructif entre les deux Présidents
[à l’occasion de trois rencontres avant Háng-zhōu : 12 novembre 2014, 25 septembre 2015 et 31 mars 2016 / / ].
Cette coopération étroite, inconcevable lors de la COP-3 à Kyoto et lors de la COP-15 à Copenhague, a également été un des principaux moteurs de l’action climat mondiale en amont de la COP-21 aboutissant à l’accord historique conclu entre les deux Présidents le 12 novembre 2014 par lequel ils ont conjointement annoncé leurs engagements nationaux de réduction des émissions de GES pour la période post-2020.
Cet accord bilatéral a posé les bases de l’adoption de l’Accord de Paris, puis de cette double ratification. Reste à savoir si cette coopération se poursuivra avec le nouveau (ou la nouvelle) Chef d’Etat américain(e) après les élections présidentielles du 8 novembre 2016.
Etant donné la dynamique engagée, s’il y a de fortes chances que l’Accord de Paris entre en vigueur bien avant 2020, échéance initialement envisagée , les négociations sur la mise au point des règles détaillées (rulebook) pour concrétiser l’Accord n’aboutiront sans doute pas avant 2018.