Secteurs Hors-SEQE : nouveau paquet de la Commission
Contexte
Le Conseil européen des 23-24 octobre 2014 a fixé les objectifs climat-énergie pour la période 2021-2030, dont l’élément clé est un objectif global contraignant de réduction des émissions de GES d’au moins 40% d’ici 2030 (base 1990). Tous les Etats membres (EM) et tous les secteurs doivent y contribuer. Il se décline en deux volets :
- -43% (base 2005) pour les secteurs visés par le SEQE,
- -30% (base 2005) pour les secteurs hors SEQE. Le Conseil européen a également prédéfini les critères de répartition de l’effort de réduction parmi les Vingt-huit pour ces secteurs.
Le paquet de mesures présenté par la Commission le 20 juillet dernier vise à mettre en œuvre le 2e volet précité.
La proposition de règlement pour les secteurs hors SEQE
L’élément clé du nouveau paquet de la Commission est une proposition de règlement visant à répartir l’effort de réduction des émissions de GES parmi les 28 EM de l’UE [y compris le Royaume-Uni] dans les secteurs hors SEQE sur la période 2021-2030. Ce texte prendra le relais de la décision 406/2009/CE [qui établit la répartition des efforts de réduction des 28 EM pour ces secteurs sur la période 2013-2020].
Les objectifs de réduction fixés par EM pour 2030 (base 2005) vont de 0% [stabilisation] pour la Bulgarie à -40% pour la Suède et le Luxembourg. La France se voit assigner un objectif de -37%, soit le sixième objectif le plus élevé parmi les Vingt-huit (article 4 et annexe 1, voir p.1). [A titre de comparaison, son objectif hors SEQE pour la période 2013-2020 était de -14%].
S’appuyant sur les orientations du Conseil européen [des 23-24 octobre 2015], la proposition définit la manière dont les quotas annuels d’émission (QAE) [limites annuelles contraignantes en CO2e] sont fixés sur la période 2021-2030 (article 4). Comme pour la période 2013-2020, le QAE de chaque EM est à déterminer sur la base d’une trajectoire linéaire, dont le point de départ est la moyenne des émissions de GES des secteurs hors SEQE pour la période 2016-2018 [car, souligne la Commission, 2018 sera la dernière année pour laquelle les données d’émission vérifiées seront disponibles en 2020]. Ce QAE sera fixé pour chaque année de la période par la Commission [dans un acte d’exécution (procédure de comitologie)].
Afin de favoriser son acceptation par tous les Etats membres, la proposition prévoit deux nouvelles « marges de manœuvre » [mécanismes de flexibilité] pour aider les Etats membres à respecter leurs objectifs hors SEQE sur 2021-2030 :
- mécanisme de flexibilité « ponctuel » (one-off flexibility) : neuf Etats membres [Autriche, Belgique, Danemark, Finlande, Irlande, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Suède] auront la possibilité d’annuler des quotas du SEQE pour les convertir en QAE (article 6). En d’autres termes, ces Etats membres pourront compenser une partie de leurs émissions hors SEQE par des quotas du SEQE, qui auraient autrement été mis aux enchères. Un plafond [niveau d’accès maximal exprimé en pourcentage des émissions de 2005] est fixé pour chacun de ces Etats membres (annexe II de la proposition). Enfin, la proposition fixe, pour ces 9 EM et pour l’ensemble de la période 2021-2030, une limite maximale totale
[plafond] de 100 millions de quotas du SEQE lesquels pourront être convertis en QAE; - mécanisme de flexibilité UTCATF : tous les Etats membres pourront utiliser les absorptions nettes [crédits] issues du secteur UTCATF pour compenser une partie des émissions des secteurs hors SEQE. Ce mécanisme est cependant plafonné pour chaque Etat membre [en CO2e sur la période 2021-2030 (annexe III)], totalisant un plafond global de 280 Mt CO2e d’absorptions nettes sur la totalité de la période 2021-2030 [France : 58,2 Mt CO2e, soit le plafond de loin le plus élevé des Vingt-huit, suivie de l’Espagne avec 29,1 Mt CO2e].
La Commission justifie sa nouvelle proposition en soulignant notamment que, si la tendance actuelle se poursuit et si les objectifs juridiquement contraignants et les politiques déjà en place sont intégralement mis en œuvre, les émissions des secteurs hors SEQE ne devraient baisser « que » d’environ 24% en 2030 (base 2005) (source : COM(2016)482 p.2). Cela signifie que les réductions réalisées seraient inférieures de 6% à l’objectif 2030 de -30% pour ces secteurs.
Déclaration des émissions et évaluation des progrès : la proposition maintient, sur la période 2021-2030, les obligations en matière de déclaration et de contrôle de la conformité établies par la décision 406/2009/CE pour 2013-2020 : la Commission évaluera chaque année les progrès accomplis par les Etats membres dans la réalisation de leurs objectifs et en rendra compte. Cependant, à la différence du régime 2013-2020, un réexamen complet et un contrôle de conformité plus formel auront lieu tous les cinq ans et non plus annuellement [afin de réduire la charge administrative pour les Etats membres]. Le 1er réexamen interviendra en 2027 pour les années 2021-2025 et le suivant en 2032 pour les années 2026-2030. La Commission vise ainsi à aligner la proposition sur le cycle de réexamen quinquennal établi dans l’Accord de Paris (article 4).
Plans d’actions : si, sur la base de l’évaluation annuelle réalisée par la Commission, les progrès des Etats membres s’écartent de leur QAE, ils devront élaborer un plan d’actions comportant des mesures supplémentaires à mettre en œuvre pour respecter leurs obligations.
La proposition de règlement hors SEQE, ainsi que celle sur l’UTCATF (voir p.1. Le CITEPA reviendra sur cette dernière dans un prochain CDL), ont été soumises au Parlement européen et au Conseil [dans le cadre de la procédure législative ordinaire].
La stratégie européenne « mobilité à faibles émissions »
Cette nouvelle stratégie intervient cinq ans après le Livre blanc sur les transports (2011). Si elle recense les travaux en cours ou prévus pour réduire les émissions de GES dans le secteur des transports, deux nouveautés sont à signaler :
- stratégie post-2020 pour les voitures particulières (VP) et les véhicules utilitaires (VUL) : la Commission travaille actuellement à l’élaboration de normes d’émission de CO2 pour les VP/VUL pour la période post-2020, assorties d’un objectif 2030 et d’un éventuel objectif intermédiaire. Elle réalise actuellement une analyse coûts-bénéfices de telles normes;
- stratégie post-2020 pour les véhicules lourds (VL) [camions, autobus et autocars] : jusqu’ici, l’UE n’a pas établi, pour les VL, de normes en matière de consommation de carburant, ni de régime de surveillance des émissions de CO2, comme c’est le cas pour les VP/VUL. S’appuyant sur sa
stratégie pour la réduction des émissions de CO2 des camions [du 21 mai 2014] , elle travaille actuellement sur deux propositions, l’une sur la surveillance des émissions de CO2 et la déclaration de données d’émission de CO2 certifiées et l’autre sur la certification des VL en matière de consommation de carburant et d’émissions de CO2.
L’UE envisage aussi d’introduire des mesures visant à limiter les émissions de CO2 des VL et ce, à l’instar d’autres régions du monde [Etats-Unis, Canada, Japon, Chine].
Parallèlement à ces travaux, la Commission a lancé deux consultations publiques sur les options à envisager pour ces deux volets de la stratégie, l’une sur les VP/VUL et l’autre sur les VL. Date limite de réponse : 28 octobre 2016.