Couche d’ozone : les concentrations de tétrachlorure de carbone diminuent moins vite que prévu (observations de la NASA)
Le 20 août 2014, l’Administration nationale de l’aéronautique et de l’espace (NASA) des Etats-Unis a rapporté la présence dans l’atmosphère de tétrachlorure de carbone (CCl4) en concentrations anormalement élevées. Les résultats des recherches sur le CCl4 menées par la NASA ont été publiés le 18 août 2014 dans la revue scientifique internationale Geophysical Research Letters.
Le CCl4 [utilisé notamment comme réfrigérant, fluide propulseur ou solvant] est une substance qui appauvrit la couche d’ozone (SAO). Rappelons par ailleurs que le CCl4 est un puissant gaz à effet de serre, contribuant ainsi au forçage radiatif : il a un pouvoir de réchauffement global (PRG) 1 730 fois plus élevé que le CO2 sur 100 ans (source : GIEC/AR5, valeurs 2013), soit un PRG supérieur à la quasi-totalité des HCFC [à la fois SAO et GES].
Le CCl4 est réglementé par le Protocole de Montréal sur les SAO (1987). Au titre de cet instrument multilatéral faisant l’objet, depuis le 16 septembre 2009, d’une ratification universelle [c’est-à-dire par l’ensemble des pays de la planète, soit 197 Parties], la production et la consommation du CCl4 sont ainsi interdites pour tous les pays [depuis 1996 pour les pays industrialisés et depuis 2010 pour les pays en développement (article 2D et annexe B)]. Les Parties au Protocole de Montréal n’ont donc pas déclaré d’émissions nouvelles de CCl4 pour la période 2007-2012. Sur cette base, ses concentrations atmosphériques auraient dû diminuer de 4% par an. Or, les stations de mesure terrestres ont mis en évidence une baisse de 1% par an seulement.
Selon la NASA, depuis près de 10 ans, les scientifiques s’interrogent sur les raisons pour lesquelles les niveaux de concentration de CCl4 observés dans l’atmosphère diminuent plus lentement que prévu. Les connaissances acquises jusqu’ici s’appuient sur les processus naturels de destruction, comme le rayonnement solaire.
Pour mieux comprendre l’écart observé, la NASA a mené des recherches combinant, d’une part, des données de mesure relevées par les réseaux d’observation terrestres [notamment ceux de l’Administration nationale américaine de l’étude des océans et de l’atmosphère (NOAA)] et, d’autre part, des travaux de modélisation de la chimie de l’atmosphère globale et des pertes de concentrations de CCl4 à la suite des interactions avec les sols et les océans.
Les résultats obtenus ont donné lieu à la première estimation quantitative des émissions moyennes mondiales sur la période 2000-2012. La diminution plus lente que prévu du CCl4 pourrait résulter, d’après la NASA, de « fuites industrielles non identifiées, d’émissions importantes de sites contaminés ou de sources d’émission inconnues« . Ainsi, selon cette hypothèse, cela représenterait en moyenne 39 kt d’émissions mondiales par an, soit environ 30% du niveau maximal estimé avant l’entrée en vigueur du Protocole de Montréal [1er janvier 1989]. Les émissions de CCl4 étaient pourtant censées avoir cessé grâce à la mise en œuvre efficace du Protocole de Montréal.
Enfin, les travaux de modélisation de la NASA font ressortir une durée de vie du CCl4 dans l’atmosphère de 40% supérieure à celle estimée jusqu’ici [26 ans (source : GIEC/AR5, valeurs 2013)].
- nasa.gov/press/2014/august/ozone-depleting-compound-persists-nasa-research-shows (communiqué de la NASA)
- http://ozone.unep.org/Publications/MP_Handbook/MP-Handbook–2009-fr.pdf (voir pp.9 et 34 pour l’article 2D et l’annexe B)
- ineris.fr (rubrique Rapports d’étude > Fiches de données toxico-logiques et environnementales. Voir fiche n° 56-23-5 sur le CCl4)