La Commission propose un nouveau « Paquet » climat/énergie pour 2030
Le 22 janvier 2014, la Commission européenne a présenté un ensemble de propositions, essen-tiellement d’ordre politique [plutôt que législatif], définissant le nouveau cadre politique climat/énergie de l’UE pour la période 2020-2030. Le « Paquet » est composé de plusieurs éléments, dont une étude d’impact [environnemental et socio-économique], mais d’une seule proposition d’acte législatif contraignant (voir l’essentiel des éléments présentés ci-contre). L’élément clé de ce Paquet est un objectif de réduction des émissions de GES de 40% d’ici 2030 (base 1990).
Ce Paquet s’appuie notamment sur les conclu-sions de la consultation publique menée par la Commission suite à la publication de son Livre vert sur le sujet [27 mars 2013] , en particulier sur les avis concernant le type, la nature et le niveau d’ambition des objectifs 2030 en matière de politique climat/énergie. En outre, il est en cohérence avec les objectifs intermédiaires 2030 préconisés par la Commission dans sa feuille de route 2050.
Le CITEPA vous propose ce mois-ci l’essentiel sur ce nouveau Paquet climat/énergie dont une mise en contexte.
Le Paquet climat/énergie de la Commission
- cadre politique en matière de climat/énergie pour la période 2020-2030 : communication de la Commission au Parlement européen (PE) et au Conseil [COM(2014) 15],
- proposition de décision du PE et du Conseil sur la création et le fonctionnement d’une réserve de stabilité du marché pour le système d’échange de quotas d’émission de GES de l’UE [COM(2014) 20],
- étude d’impact de la politique climat/énergie 2030 : version intégrale (235 p) et résumé (18 p),
- communication sur l’exploration et la pro-duction des hydrocarbures (gaz de schiste) par fracturation hydraulique à grands volumes,
- recommandation relative aux principes minimaux applicables à l’exploration et à la production des hydrocarbures (gaz de schiste),
- étude d’impact (gaz de schiste) : version intégrale (70 p + annexes) et résumé (8 p),
- « Tendances 2050 : émissions de GES de l’UE », scénario de référence (2013),
- prix et coûts de l’énergie en Europe, communication de la Commission au Parlement européen (PE) et au Conseil [COM(2014) 21].
Contexte
Le cadre politique actuellement en place en matière de climat/ énergie a été défini en 2007, couvrant la période jusqu’en 2020. Dans le cadre d’une approche intégrée, la Commission a proposé, le 10 janvier 2007(1), un Paquet climat/énergie fixant entre autres trois principaux objectifs pour l’UE à l’horizon 2020 (dits les 3 x 20). Ceux-ci ont été avalisés par le Conseil européen [8-9 mars 2007](2) :
- climat : réduction de 20% des émissions de GES (base 1990) : réparti entre -21% pour les secteurs du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) et -10% pour les secteurs hors SEQE [transports, résidentiel/tertiaire, agriculture, déchets,..] (base 2005). L’objectif pour les secteurs hors SEQE a été réparti en objectifs nationaux entre les Etats membres [-14% pour la France];
- énergies renouvelables (EnR) : part de 20% dans la consommation finale brute d’énergie: réparti en objectifs nationaux entre les Etats membres [23% pour la France];
- efficacité énergétique (EE) : réduction de la consommation d’énergie primaire par rapport au scénario tendanciel en 2020.
Seuls les objectifs climat et EnR sont contraignants, celui pour l’EE n’étant qu’à caractère indicatif.
Deux autres objectifs sectoriels contraignants ont également été adoptés pour 2020 :
- biocarburants : proportion minimale de 10% dans la consommation totale d’essence et de gazole destinés au transport (tous modes confondus) au sein de l’UE(3);
- carburants : réduction de l’intensité carbone de 6% des fournisseurs [compagnies pétrolières] sur la période 2011-2020 (réduction des émissions de GES produites sur l’ensemble du cycle de vie des carburants fournis)(3).
L’ensemble du Paquet climat/énergie 2007 s’est traduit en six actes législatifs fixant des mesures pour mettre en œuvre les objectifs précités (publiés au JOUE du 5 juin 2009(4)).
Progrès réalisés : selon les dernières données publiées par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), à huit ans de son échéance, l’UE est près d’atteindre, voire de dépasser son objectif de réduction des émissions de GES : -18% en 2012 pour l’UE-28 (base 1990) (Source : AEE, rapport n°10/2013, p.10). Quant aux EnR, la part était de 13% en 2011 (Source : idem, p.117). Enfin, pour ce qui est de l’objectif EE, la Commission juge probable que l’UE ne l’atteindra pas : la consommation d’énergie primaire était de 1 730 Mtep en 2011, soit de 17% supérieure à l’objectif 2020 (1 483 Mtep) (Source : idem, p.128 + MEMO/14/40 de la Commission).
Objectifs 2050 : s’appuyant sur les préconisations du 4e rapport d’évaluation (2007) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)(5), le Conseil européen [des 29-30 octobre 2009] a soutenu un objectif de réduction de GES à long terme pour l’UE : réduction des émissions de GES de 80 à 95% d’ici 2050 par rapport aux niveaux de 1990. Cet objectif a été réaffirmé depuis lors à plusieurs reprises, et notamment par le Conseil Environnement [du 14 octobre 2010] et par le Conseil européen extraordinaire consacré à l’énergie [du 4 février 2011].
Le 8 mars 2011, la Commission européenne a publié une feuille de route sur la transition de l’UE vers une économie sobre en carbone à l’horizon 2050. Elle définit la trajectoire à suivre pour atteindre l’objectif de l’UE fixé pour 2050. Elle recommande que l’UE atteigne un objectif de -80% d’ici 2050 (base 1990) au moyen de mesures internes uniquement [sans recours aux crédits internationaux donc], ce qui impliquerait des réductions intermédiaires de 40% d’ici 2030 et de 60% d’ici 2040 (base 1990).
Enfin, la Commission a présenté, le 28 mars 2011, un Livre blanc « Transports 2050 » sous forme de feuille de route fixant plusieurs objectifs à cet horizon, dont :
- tous modes confondus : réduction des émissions de GES d’au moins 60% (base 1990),
- transport maritime : réduction des émissions de CO2 de 40% provenant des combustibles de soute,
- aviation : part de 40% de carburants à faible teneur en carbone.
Les objectifs du Paquet climat/énergie 2030
Réduction des émissions de GES
L’élément clé de la nouvelle politique proposée est un objectif global contraignant de réduction des émissions de GES de 40% pour l’UE d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990, à atteindre uniquement par la mise en œuvre de mesures à l’échelle nationale
[c’est-à-dire sans recours aux crédits d’émissions internationaux issus des mécanismes de projet (MDP et MOC) au titre du Protocole de Kyoto].
Pour atteindre cet objectif global, la Commission estime que les objectifs de réduction sectoriels devraient être :
- -43% pour les secteurs visés par le SEQE (base 2005),
- -30% pour les secteurs hors SEQE (base 2005). Cet effort serait partagé équitablement entre les Etats membres mais pour l’heure, la Commission n’apporte aucune précision sur cette répartition du futur effort.
Année de référence 1990 ou 2005 ?
Alors que les objectifs de réduction de GES sont en général exprimés par rapport à l’année de référence 1990 [aux niveaux de l’UE et international (surtout dans le cadre de la Convention Climat et du Protocole de Kyoto)], comme c’est le cas pour l’objectif global de -40% du Paquet climat/énergie 2030, les objectifs de réduction SEQE et hors SEQE 2030, eux, sont exprimés par rapport à l’année de référence 2005 [suivant en cela les objectifs SEQE et hors SEQE fixés par le Paquet climat/énergie 2007].
Afin d’obtenir les réductions d’émissions de GES requises dans les secteurs couverts par le SEQE, la Commission propose de porter le facteur linéaire de réduction annuelle du plafond de quotas de l’UE [qui limite les émissions de ces secteurs] de 1,74% actuellement [cf. directive 2003/87/CE modifiée, article 9](6) à 2,2% après 2020 (voir réforme structurelle du SEQE p.3).
Quant à la répartition de l’effort collectif de réduction dans les secteurs hors SEQE, la Commission estime que pour le cadre 2030, l’objectif de réduction pour chaque Etat membre devrait être fixé sur la base des mêmes facteurs que pour la répartition des efforts en 2007, à savoir la richesse relative des Etats membres déterminée par le biais du PIB/habitant.
Enfin, à ce stade, la Commission ne voit pas d’intérêt à proposer un objectif global de réduction conditionnel plus élevé [que celui de -40%] pour l’UE avant l’issue des négo-ciations internationales dans le cadre de la Convention Climat. Au cas où celles-ci déboucheraient fin 2015 sur un objectif plus ambitieux pour l’UE, la Commission autorisera l’accès aux crédits internationaux pour assurer l’effort supplémentaire.
Energies renouvelables (EnR)
Le nouveau Paquet fixe un objectif global contraignant : au moins 27% d’EnR dans la consommation d’énergie de l’UE d’ici 2030. Contrairement au Paquet climat/énergie de 2007 (voir ci-contre), la Commission ne propose pas d’objectifs individuels contraignants pour chaque Etat membre en matière d’EnR à l’horizon 2030. Elle déclare préférer laisser aux Etats membres une plus grande souplesse pour transposer cet objectif global en objectifs nationaux en vue d’atteindre leurs objectifs de réduction des émissions de GES de la manière la plus rationnelle possible, compte tenu de leur situation spécifique, de leur bouquet énergétique et de leur capacité à produire des EnR. Chaque Etat membre devra donc prendre des engagements concrets en matière d’EnR pour contribuer à l’objectif collectif de 27% et établir les modalités pour les respecter. Ces engagements et modalités devront être notifiés à la Commission et seront évalués dans le cadre d’un processus de gouvernance basé sur des Plans nationaux « pour une énergie compétitive, sûre et durable« , à établir par les Etats membres (voir section Gouvernance plus loin). Selon les résultats de l’examen des engagements nationaux en matière d’EnR, ceux-ci seront complétés, le cas échéant, par de nouvelles mesures et de nouveaux instruments au niveau de l’UE visant à atteindre l’objectif de 27%.
Carburants : pas d’objectifs 2030
Dans sa communication sur le cadre politique climat/énergie 2030, la Commission souligne qu’elle n’estime pas utile de fixer de nouveaux objectifs en matière d’EnR ou d’intensité d’émissions de GES des carburants utilisés dans le secteur des transports ou dans tout autre sous-secteur pour la période post-2020.
L’évaluation des possibilités de réduction des émissions liées aux changements indirects d’utilisation des terres (dits ILUC) montre que les biocarburants de 1ère génération ne joueront qu’un rôle limité dans la « décarbonisation » du secteur des transports.
La Commission a déjà indiqué que les biocarburants de 1ère génération ne devraient plus bénéficier d’aides publiques après 2020
[COM(2012) 595]. Elle mise plutôt sur la réduction de la consommation des carburants dans le secteur des transports, la poursuite du développement et le déploiement des véhicules électriques, des biocarburants de 2e et de 3e génération, ainsi que d’autres carburants de substitution durables en cohérence avec la stratégie européenne sur les carburants de substitution adoptée le 24 janvier 2013 [COM(2013) 17] .
Efficacité énergétique (EE)
Pour l’heure, la Commission ne prévoit aucun objectif contraignant ou indicatif visant à renforcer l’EE d’ici 2030. Elle souligne néanmoins que la question fera l’objet d’une analyse détaillée dans le cadre de l’évaluation qu’elle doit réaliser d’ici le 30 juin 2014 au titre de la directive 2012/27/UE relative à l’EE [articles 3.2 et 24.7].
Cette évaluation portera sur les progrès accomplis pour atteindre l’objectif EE fixé pour 2020 (voir encadré contexte p.2). La Commission s’attend d’ores et déjà à ce que les Etats membres n’atteignent pas cet objectif. Sur la base des résultats de cette évaluation, elle décidera donc s’il est nécessaire de proposer de nouvelles mesures en guise de modification de la directive 2012/27/UE.
SEQE : les deux étapes de la réforme
La création de la réserve de stabilité du marché viendrait en complément du gel de quotas (backloading), mesure provisoire proposée par la Commission le 12 novembre 2012 et approuvée par le Parlement européen et le Conseil le 17 décembre 2013 [décision n° 1359/2013/UE, JOUE L 343 du 19/12/2013]. Cette mesure a constitué une 1ère étape pour rectifier à court terme le déséquilibre entre l’offre et la demande de quotas, caractérisé par un surplus total cumulé d’environ 2 milliards de quotas au début de la 3e période (2013) (source : COM(2014) 20, p.2).
Dans son rapport sur le fonctionnement du SEQE publié le 14 novembre 2012 , la Commission a proposé six options de réforme structurelle du SEQE pour résorber ce surplus. La création d’une réserve de stabilité du marché a été proposée comme option supplémentaire dans le cadre d’une réunion de consultation organisée par la Commission avec les parties prenantes, le 19 avril 2013, sur ces options envisagées.
La réforme structurelle du SEQE
La proposition de décision sur la mise en place et le fonctionnement d’une « réserve de stabilité du marché » pour le SEQE constitue la seule proposition d’acte législatif contraignant du Paquet climat/énergie de la Commission.
Ainsi, cette réserve, qui sera établie à partir de 2021 (pour la 4e période d’échange du SEQE donc), permettrait un ajustement automatique à la hausse ou à la baisse de l’offre de quotas à mettre aux enchères, conformément à un ensemble de règles prédéfinies qui ne laisserait aucun pouvoir d’appréciation ni à la Commission, ni aux Etats membres en ce qui concerne sa mise en œuvre. Par ailleurs, souligne la Commission, cette réserve améliorerait la résilience aux chocs sur le marché et renforcerait la stabilité du SEQE. Concrètement, pour chaque année N à compter de 2021, sur la base des données d’émission vérifiées publiées l’année N-1, 12% de la quantité totale des quotas en circu-lation pourront être placés dans la réserve si cette quantité totale est égale ou supérieure à 100 millions de quotas.
Méthodologie : les scénarios étudiés
Pour élaborer son Paquet climat/énergie 2030, la Commission s’est appuyée sur une étude d’impact environnemental, sanitaire et socio-économique, ainsi que sur une analyse détaillée des prix et coûts de l’énergie en Europe. Ces deux études ont été publiées parallèlement aux autres documents du Paquet 2030.
Le nouveau scénario de référence 2013, qui présente les tendances en matière d’émissions de GES à l’horizon 2050 [réalisé conjointement par les DG Climat, Energie et Transports et publié le 18 décembre 2013], constitue le point de départ de l’étude d’impact. Le scénario de référence part de l’hypothèse d’une mise en œuvre intégrale des politiques climat de l’UE adoptées avant l’été 2012, y compris la réalisation des objectifs 3 x 20 en 2020. Il a été élaboré notamment à l’aide de travaux de modélisation (PRIMES, GAINS et d’autres modèles associés) et sur la base d’avis d’experts des Etats membres.
L’étude d’impact présente et compare trois principales options politiques étudiées par la Commission pour la période 2020-2030 outre le scénario de référence. Ces options sont centrées sur la fixation ou non d’objectifs chiffrés pour les trois volets constituant la politique climat/énergie de l’UE (GES, EnR et EE). Pour évaluer la faisabilité de ces options, plusieurs scénarios combinant objectifs de réduction [-35%, -40% et -45% en 2030 (base 1990)] et niveaux d’ambition associés ont été analysés. L’option finalement retenue correspond au scénario dit « GHG40″.
La gouvernance européenne pour le cadre 2030
Pour la période post-2020,la Commission estime nécessaire de simplifier et de rationaliser les processus, actuellement séparés, de notification des informations et données sur la réduction des émissions de GES, sur les EnR et sur l’efficacité énergétique, et de renforcer « la gouvernance » avec les Etats membres. La réalisation des objectifs climat/énergie pour 2030 passerait par une combinaison de mesures adoptées par l’UE et au niveau des Etats membres. Les mesures nationales seront décrites dans les Plans nationaux « pour une énergie compétitive, sûre et durable« , à établir par les Etats membres.
Etude d’impact : coûts/bénéfices du cadre politique 2030
Selon les projections de la Commission (voir tableau ci-dessous), les investissements supplémentaires annuels moyens nécessaires sur la période 2011-2030 pour atteindre les objectifs fixés pour 2030 s’élèveraient à 38 milliards (Md) € pour l’ensemble de l’UE. Ces coûts seraient en grande partie annulés par la réduction de la consommation de combustibles/carburants. Plus de la moitié
de ce total devra être investi dans le secteur résidentiel/tertiaire.
La Commission estime que le surcoût total pour le système énergétique de l’UE en 2030 induit par la mise en œuvre d’un objectif de réduction des émissions de GES de 40%, par rapport au scénario de référence, entraînerait une hausse de 0,15% du PIB en 2030. Ces coûts reflètent les surcoûts engendrés pour les consommateurs finaux (industrie, usagers des transports,…).
Quant aux bénéfices pour l’UE, selon les estimations de la Commission, la mise en œuvre des objectifs 2030 conduira à une réduction des émissions de certains polluants (-100 kt de SO2, -100 kt NOX et -25 kt de PM2,5 d’ici 2030). Ces réductions auront un impact positif sur la santé publique, ce qui se traduirait par une baisse des coûts induits par les maladies liées à la pollution de l’air. (Source : étude d’impact, tableau 11 p.64 et tableau 40, pp.136-138).
Le paquet climat/énergie 2030 fera l’objet d’une Fiche de Synthèse (FdS) du CITEPA qui examinera plus en détail les textes clés. Cette FdS sera disponible d’ici fin mars 2014.
UTCF : vers la prise en compte dans l’objectif -40% ?
Les émissions de GES hors CO2 du secteur agricole relèvent de la décision 409/2009/CE sur la répartition de l’effort de réduction(7) mais les émissions et absorptions de CO2 liées à l’utilisation des terres, leurs changements et la forêt (UTCF) ne sont pas prises en compte dans l’objectif de réduction des émissions de GES pour 2020 (-20%) alors qu’elles sont comptabilisées dans le cadre des engagements internationaux de l’UE conformément aux règles fixées en application du Protocole de Kyoto et ce, tant pour la 1ère période (2008-2012) que pour la 2e (2013-2020) [cf. décision 2/CMP.7 adoptée à Durban fin 2011].
Dans sa communication sur le cadre politique climat-énergie 2030, la Commission souligne qu’il conviendra désormais d’intégrer le secteur UTCF dans l’objectif de réduction des émissions de GES de -40% pour 2030. Cette préconisation constitue un changement de cap important par rapport à sa politique climat actuelle. La Commission justifie cette démarche par le fait que « tous les secteurs doivent contribuer aux efforts de réduction d’une manière efficace au regard des coûts« . Elle va donc réaliser une analyse plus approfondie pour déterminer l’approche la plus appropriée [intégration du secteur UTCF dans une future décision de répartition de l’effort hors SEQE ou mise en place d’un pilier UTCF distinct, ou une combinaison des deux].
Ces Plans nationaux « pour une énergie compétitive, sûre et durable » devraient définir une approche claire pour atteindre les objectifs nationaux, notamment en matière de réduction des émissions de GES dans les secteurs hors SEQE, d’EnR et d’économies d’énergie. L’objectif des Plans sera de renforcer la sécurité, la prévisibilité et la transparence pour les investisseurs, ainsi que d’améliorer la cohérence, la coordination et la surveillance au sein de l’UE. La Commission estime que les Plans nationaux devraient être opérationnels bien avant 2020 [échéance exacte non précisée] afin d’orienter l’action des Etats membres en temps utile pour la période 2020-2030 et d’encourager les investis-sements nécessaires.
Que retenir du Paquet climat/énergie 2030 ?
Le nouveau cadre politique en matière de climat/énergie, proposé par la Commission, couvre la période de 2020 à 2030 et fixe deux principaux objectifs pour l’UE à l’horizon 2030 :
- climat : réduction de 40% des émissions de GES (base 1990), objectif global contraignant à atteindre uniquement par la mise en œuvre de mesures de réduction à l’échelle nationale, soit sans recours aux crédits d’émission nationaux. Cet objectif global devrait être réparti entre les secteurs du SEQE (-43%, base 2005) et les secteurs hors SEQE (-30%, base 2005). L’objectif pour les secteurs hors SEQE sera, à son tour, réparti en objectifs nationaux entre les Etats membres;
- énergies renouvelables (EnR) : part d’au moins 27% dans la consommation finale brute d’énergie, objectif global contraignant qui ne sera pas réparti en objectifs nationaux entre les Etats membres ;
- efficacité énergétique (EE) : aucun objectif n’est fixé pour l’instant pour la période post-2020. La Commission attend les résultats du bilan des progrès réalisés par les Etats membres [qu’elle dressera avant le 30 juin 2014] pour atteindre l’objectif d’EE pour 2020 avant de proposer de nouvelles mesures d’EE,
- carburants : aucun nouvel objectif n’est fixé en matière d’EnR ou d’intensité d’émissions de GES des carburants utilisés dans le secteur des transports pour la période post-2020.
La seule proposition d’acte législatif du nouveau Paquet climat/énergie 2030 est une proposition de décision sur la mise en place, à compter de 2021, d’une réserve de stabilité du SEQE [réforme structurelle destinée à résorber le surplus de quotas].
Enfin, la Commission compte rationaliser et simplifier les processus de communication des informations et données GES/ EnR/EE dans le cadre d’une nouvelle « gouvernance » européenne.
Prochaines étapes
Le Paquet climat/énergie 2030 a été transmis au Parlement européen et au Conseil pour examen. La Commission invite ces deux co-législateurs à approuver d’ici fin 2014 l’objectif de réduction des émissions de GES de 40% afin que l’UE puisse le soumettre en tant que « contribution » à la CCNUCC avant le 31 mars 2015 en amont de l’adoption du nouvel accord multilatéral sur le climat pour le régime post-2020, prévue à Paris fin 2015 [21e Conférence des Parties ou COP-21].
La Commission invite également les deux co-législateurs à approuver l’objectif de 27% pour les EnR, l’approche proposée vis-à-vis des futures politiques climat/énergie, ainsi que sa proposition d’établir un système simplifié de gouvernance pour atteindre les objectifs climat/énergie 2030.
Tous les yeux sont désormais rivés sur le Conseil européen [réunion des 20-21 mars 2014] où les Chefs d’Etat et de Gouver-nement des Vingt-huit examineront le Paquet climat/énergie 2030 avant de prendre position sur les objectifs proposés.
(1) Voir ED n°162 p.I.257. (2) Voir ED n°162 p.I.395. (3) Voir SD’Air n°173 p.35. (4) Voir SD’Air n°172 p.57. (5) Voir ED n°163 p.III.7. (6)Voir SD’Air n°172 p.72. (7) Voir SD’Air n°172 p.61.
- europa.eu/clima/policies/2030/documentation_en.htm (les pages de la DG Climat consacrées au Paquet climat/énergie 2030)
- europa.eu/energy/2030_en.htm (les pages de la DG Energie consacrées au Paquet climat/énergie 2030)
- eur-lex.europa.eu/fr/prep/latest/index.htm (rubrique Documents COM : stratégie et propositions législatives en français, recherche par année et date : 2014 > 18 décembre. N.B. Les numéros de référence de ces documents sont indiqués dans l’encadré, p.1)
- europa.eu/clima/policies/ets/reform/docs/com_2014_20_en.pdf (proposition de décision sur la réserve de stabilité du marché)
- europa.eu/environment/integration/energy/unconventional_en.htm(recommandation et communication sur les gaz de schiste)
- europa.eu/clima/policies/2030/models/eu_trends_2050_en.pdf (scénario de référence – tendances jusqu’en 2050)