Loi Finances 2014 : les bases d’une fiscalité écologique renforcée sont posées (1ère partie)
La loi de Finances pour 2014 (LF 2014) [loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013, JO du 30] comporte plusieurs dispositions visant à renforcer la fiscalité écologique existante pour mieux appliquer le principe pollueur-payeur afin de renchérir le coût de l’inaction, tout en favorisant le recours aux procédés moins émetteurs ou aux moyens de dépollution.
Les éléments clés de la nouvelle fiscalité écologique établie par la LF 2014 sont présentés ci-après.
Elargissement de l’assiette de la TGAP
TGAP : catégories de redevables (Code des Douanes, article 266 sexies)
La TGAP est due par tout exploitant d’une installation classée soumise à autorisation [au titre du livre V (titre Ier) du Code de l’Environnement] dont la puissance thermique maximale est d’au moins 20 MW [installations de combustion], ou dont la capacité est supérieure à 3 t/h [installations d’incinération d’ordures ménagères] ou dont le poids d’au moins une des substances visées émises en une année [lorsque l’installation n’entre pas dans les catégories pré-citées] dépasse les seuils d’assujettissement fixés (voir tableaux).
Afin de répondre aux objectifs de la directive 2008/50/CE relative à la qualité de l’air ambiant(1), la LF 2014 étend l’assiette du volet « émissions polluantes » de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) à sept nouvelles substances : plomb, zinc, chrome, cuivre, nickel, cadmium et vanadium [article 33]. Le Gouvernement vise ainsi à renforcer la réduction de ces émissions à la source, à réduire les nuisances liées à l’émission de ces substances et à réduire leur impact sur la santé publique.
TGAP : taux et seuils d’assujettissement fixés pour 2014
par nouveau polluant visé
Polluant |
Seuils (kg) |
Taux (€) |
Plomb |
200 |
10 |
Zinc |
200 |
5 |
Chrome |
100 |
20 |
Cuivre |
100 |
5 |
Nickel |
50 |
100 |
Cadmium |
10 |
500 |
Vanadium |
10 |
5 |
Les taux 2014 fixés pour les polluants déjà visés par la TGAP sont les suivants :
Polluant |
Seuils |
Taux (€) |
SOX et autres composés soufrés |
150 t/an |
138,60 |
Acide chlorhydrique |
150 t/an |
47,17 |
N2O |
150 t/an |
70,77 |
|
150 t/an |
167,30 |
Hydrocarbures non méthaniques, solvants et autres COV |
150 t/an |
138,60 |
Poussières totales en suspension |
5 t/an |
264,80 |
Arsenic |
20 kg/an |
509,50 |
Sélénium |
20 kg/an |
509,50 |
Mercure |
10 kg/an |
1 019,00 |
Benzène |
1 000 kg/an |
5,10 |
HAP |
50 kg/an |
50,95 |
Le décret n° 2013-1300 du 27 décembre 2013 vient modifier le décret de base de la TGAP [décret n° 99-508] afin de fixer les seuils d’assujettissement des cinq substances dont les émissions sont soumises à la TGAP depuis le 1er janvier 2013 [celles indiquées en italiques dans le tableau ci-dessus] conformément à la LF 2013 [article 18].
L’ensemble de ces nouvelles dispositions s’appliquent aux émissions constatées depuis le 1er janvier 2014.
Enfin, un tableau de synthèse présentant les taux 2014 de la TGAP a été publié sur le site des Douanes (au sein du Ministère de l’Economie et des Finances – voir lien ci-dessous).
Contribution Climat Energie
Annoncée par le Président de la République lors de la 2e Conférence environnementale (20-21 septembre 2013 ), une contribution climat énergie (CCE) est créée dans la LF 2014 [article 32]. Celle-ci n’est pas une nouvelle taxe mais un aménagement d’une taxe existante : la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Ainsi, une composante « CCE » est y ajoutée.
S’appuyant sur les propositions du Comité pour la fiscalité écologique (CFE) rendues le 18 juillet 2013 , cette nouvelle mesure prévoit une augmentation progressive des taux de la TICPE proportionnellement au contenu en CO2 des différents produits énergétiques visés (combustibles et carburants fossiles). Le caractère progressif de la mesure vise à lisser les effets induits par cette réforme de la fiscalité écologique, notamment dans le contexte d’une situation économique toujours difficile. Il vise également à permettre une adaptation progressive des comportements, en orientant la consommation de produits énergétiques vers des produits moins émetteurs de CO2.
Le taux de la CCE est fixé pour chaque produit de manière à tenir compte de son impact sur l’effet de serre, en intégrant la valeur de CO2 contenu dans le produit et ce, à partir d’une valeur de base de 7 €/tonne de CO2 en 2014, de 14,50 € en 2015 et de 22 € en 2016. Les fondements de la CCE sont donc établis sur trois ans. L’assiette de lancement de la CCE (7 €) correspond à la moyenne des prix des quotas observés dans le cadre du système d’échange de quotas de CO2 en 2012. Cette valeur a été préconisée par Christian de Perthuis, Président du CFE, dans ses conclusions .
Concrètement, la hausse de la TICPE ne s’applique en 2014 qu’au gaz naturel, au fioul lourd et au charbon. Elle s’appliquera à partir de 2015 aux autres produits énergétiques (carburants, fioul domestique). En d’autres termes, la mise en œuvre de la CCE aura un impact nul en 2014 sur les carburants et le fioul domestique.
La LF 2014 prévoit certains cas spécifiques d’exonérations des dispositions de la CCE [navires de pêche, installations visées par le système d’échange de quotas d’émission de GES,…].
Le dispositif CCE s’inspire de la proposition de révision de la directive 2003/96/CE sur la taxation de l’énergie, en cours de discussion [depuis le 03/04/11] et soutenue par la France .
A noter enfin que contrairement ce qui s’est passé fin 2009 avec les dispositions sur la contribution carbone prévues par le projet de loi de Finances pour 2010, celles de la LF 2014 sur la CCE n’ont pas été déférées au Conseil constitutionnel par des députés ou sénateurs. Ceci a donc permis de les maintenir inscrites dans la LF 2014.
(1)Voir ED n°168 p.I.119.
- legifrance.gouv.fr/initRechTexte.do (PLF 2014. Voir JO du 30/12/13)
- douane.gouv.fr/data/file/8773.pdf (tableau des taux TGAP 2014)