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Effet pervers du MDP : la controverse autour du HFC-23

  • Réf. : 2010_10_a7
  • Publié le: 1 octobre 2010
  • Date de mise à jour: 24 mai 2019
  • International

Mi-juin 2010, un groupe d’ONG piloté par CDM Watch, ONG spécialisée dans la surveillance et l’analyse des projets mis en œuvre dans le cadre du mécanisme de développement propre (MDP ou CDM en anglais), a alerté le Secrétariat à la Convention Climat (CCNUCC) sur une faille de ce dispositif, prévu par le Protocole de Kyoto (article 12).

Au cœur du problème : le HFC-23, puissant gaz fluoré à effet de serre (GFES) ayant un pouvoir de réchauffement global (PRG)(1) de 11 700 fois celui du CO2 sur 100 ans. Le HFC-23 est un sous-produit émis lors de la fabrication du HCFC-22, GFES utilisé principalement comme frigorigène dans la réfrigération et la climatisation, ainsi que comme matière première dans la production du polytétrafluoroéthylène (PTFE).

Dans le cadre du MDP, le captage et la destruction (par oxydation) du HFC-23 donnent lieu à des crédits d’émission (unités de réduction certifiée des émissions ou URCE(2)) délivrés par le Comité exécutif du MDP (CDMEB). Ceux-ci représentent 52% des quelque 420 millions de crédits URCE délivrés à ce jour. Selon la CDM Watch, les crédits URCE rapporteraient 60 à 75 fois plus que les coûts liés à l’opération de captage et de destruction, rendant rentable ainsi la production de HCFC-22 dans le seul but de détruire le HFC-23 associé. Effet pervers du MDP, cette situation aurait donc incité certains exploitants industriels peu scrupuleux à surproduire du HCFC-22 et donc à accroître le rythme de production de HFC-23 pour en détruire de plus grandes quantités afin d’obtenir ainsi un plus grand nombre de crédits URCE à échanger sur le marché international de carbone. Onze des 19 projets de destruction du HFC-23 enregistrés sont situés en Chine, cinq en Inde, et les trois autres étant en Corée du Sud, en Argentine et au Mexique. Au final, le CDMEB aurait donc certifié des crédits d’émission qui ne représentent pas de réelles réductions d’émission de gaz à effet de serre.

La méthodologie en vigueur sur la comptabilisation de la destruction du HFC-23 et donc sur l’éligibilité des projets aux crédits URCE, définie par le Groupe de travail Méthodologies au sein du CDMEB, fixe :

  • un plafond pour la quantité de production du HCFC-22 pouvant faire l’objet de crédits, lequel est basé sur la production annuelle maximale réalisée entre 2000 et 2004,
  • un plafond pour le ratio d’émissions de HFC-23/production de HCFC-22.

S’appuyant sur une analyse approfondie des données d’exploitation des usines concernées par les 19 projets précités, la CDM Watch a pointé la faille du dispositif du MDP, exemples concrets à l’appui. Elle a également soumis au CDMEB une
proposition formelle de révision de la méthodologie sur la destruction du HFC-23. Elle préconise un durcissement des critères d’éligibilité aux crédits URCE par l’introduction d’un référentiel correspondant mieux aux coûts actuels de destruction afin de rétablir l’intégrité du dispositif.

Après avoir examiné cette proposition lors de sa réunion du 21 au 25 juin 2010, le Groupe de travail Méthodologies a remis une note d’information au CDMEB sur le dossier HFC-23. Publiée le 1er juillet 2010, celle-ci conclut :

  • que les installations de production de HCFC-22 visées par le MDP et qui ont fabriqué des quantités de ce GFES jusqu’au plafond autorisé par la méthodologie auraient sans doute produit de plus faibles quantités en l’absence du MDP, et ce en raison de l’incitation des crédits URCE,
  • que vu les avantages du MDP, il existe une très forte incitation pour prolonger l’exploitation des usines de production de HCFC-22 visées par le MDP au-delà de leur durée de vie normale et/ou de ne pas améliorer l’efficacité du ratio d’émissions de HFC-23/production de HCFC-22 (c’est-à-dire de retarder la mise en place d’améliorations technologiques),
  • qu’il faut donc mener une investigation approfondie sur ce problème en vue d’améliorer la méthodologie en vigueur.

Lors de sa 55e réunion (26-30 juillet 2010), après avoir examiné la note du Groupe de travail Méthodologies, le CDMEB lui a demandé de fournir, pour la 58e réunion (fin 2010), de plus amples précisions sur plusieurs questions clés, et notamment sur les évolutions de l’offre et de la demande du marché mondial du HCFC-22 depuis l’an 2000 (couvrant donc des projets MDP et non MDP).


(1)
Voir SD’Air n°172 p.146 (2e encadré). (2)Voir ED n°159 p.III.5.

www.cdm-watch.org

cdm.unfccc.int/Panels/meth/meeting/10/044/mp44_an02.pdf (rapport)

 

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